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Trump, Poutine et franc CFA

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Le 20 janvier, le premier président noir de l’histoire des États-Unis va céder la place au premier président ouvertement soutenu par le Ku Klux Klan.

Pur produit de la démocratie libérale et défenseur d’une conception du droit international guidée certes par les intérêts de l’Amérique mais aussi par la morale et la rationalité, Barack Obama quitte le Bureau ovale de la Maison-Blanche, alors qu’un impulsif ultraconservateur, capable de lâcher un Tweet vengeur à 3 heures du matin parce qu’un commentaire l’aura blessé, s’apprête à y entrer.

Avec Donald Trump et pendant quatre ans au moins, le monde entre dans l’ère de l’incertitude, dans la dictature de l’émotion et de l’instantanéité, du conspirationnisme et de la confusion entre la vérité et le mensonge. En cela, le nouveau président américain est à la fois d’hier – le populisme et ses recettes vieilles comme les démocraties – et de demain : son imprévisibilité et son absence de recul sont parfaitement en phase avec l’invasion des réseaux sociaux.

Comme dans les War Games, la géopolitique de Trump n’est pas une affaire d’intérêts classiques mais de personnalités rivales ou alliées, parfois irrationnelles, avec lesquelles il convient de « dealer » ou de faire la guerre. En réalité, personne ne sait au juste ce que sera la politique extérieure de Donald Trump, à commencer sans doute par l’intéressé lui-même.

Son entourage compte autant d’identitaires racistes et décomplexés que de néoconservateurs bellicistes orphelins de l’époque Bush, d’antisémites avérés que de sionistes acharnés, de paganistes revendiqués que d’évangéliques créationnistes : ce qui sortira de ce chaudron a de quoi inquiéter a priori – c’est la seule certitude à notre disposition.

S’entendra-t-il avec Vladimir Poutine ? Le maître du Kremlin est l’un des rares chefs d’État (le Turc Erdogan en fait aussi partie) avec lesquels Trump partage une grammaire et un logiciel communs : tous deux sont les produits d’eux-mêmes plus que ceux d’un système ou d’un parti ; tous deux croient en la force et à la négociation en position de force ; tous deux puisent leur popularité dans cet angle mort de l’intérêt médiatique, systématiquement oublié ou négligé, qu’est le sentiment d’humiliation – celui du peuple russe après l’effondrement de l’URSS, celui des classes ouvrière et moyenne blanches paupérisées de l’Amérique profonde – et la restauration de la puissance perdue.

Ni Trump ni Poutine ne croient en l’ONU

Face à ce bloc nationaliste autoritaire Ouest-Est, une Europe malade de ses faiblesses, en pleine crise d’identité, ne pèse guère. L’ONU ? Le départ de Ban Ki-moon, imposé par l’administration Bush et qui s’est depuis distingué à la fois par sa transparence et son alignement quasi total sur les États-Unis, est certes une bonne nouvelle. Son successeur, Antonio Guterres, a une vision européenne des relations internationales et une vraie capacité à comprendre la complexité du monde.

Reste que ni Trump ni Poutine ne croient en l’ONU : le premier la méprise et le second rêve de l’instrumentaliser comme au temps de la guerre froide. Paradoxalement, la Chine apparaît donc désormais comme le seul repère sûr dans cet océan d’incertitude : son jeu est réfléchi, rationnel, soumis aux règles usuelles de la géopolitique et des intérêts nationaux, bref : prévisible.

 

Source: Jeune Afrique

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