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Lettre à mon oncle Bass

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Cher oncle,

Bonjour !

J’ai bien reçu ta toute dernière lettre et te remercie pour les éternels mots d’encouragement et de consolation que tu m’y adresses.

Mais, les bonnes paroles, l’espoir du lendemain, ne sont qu’opium grâce auxquels les désespérés et les malheureux gardent le moral et se trouvent une raison de ne pas avoir recours au suicide. En somme, il faut souvent vivre d’illusions et de rêves pour tenir sur cette terre (malienne à nous tous pourtant) de misère. Mais, Walahi, Bilahi, moi, j’en ai jusque-là… Alors, je t’annonce que ton petit Ablo vient de décider d’en finir et de la manière la plus définitive.

Oui, oui, cher oncle Bass, il s’agit bien de ça… « l’auto euthanasie».

D’ailleurs, où est le problème ? Un malheureux de moins ou de plus ne dérangera personne.  Walahi, Bilahi ! Je vais, Oncle Bass, me suicider !

Lâcheté ou lassitude, choisis le mot qui te convient, mais, ma décision est prise et elle est irrévocable…  A moins que, par miracle, l’ambassadeur de la France au Mali, ne consente à me délivrer gratuitement, sans condition et dans un délai très bref, un visa pour la France. Sinon, mon pauvre oncle, dès que tu apprendras qu’un jeune homme a été retrouvé suspendu par le cou au bout d’une corde, (la langue en « récréation » et les yeux hors de leur orbite) sur un garde-fou du pont des “ Martyrs ”, sache qu’il ne s’agit de personne d’autre, que ton petit Ablo.

Oui, tonton, j’ai désormais perdu et la voix, et la foi. Je le dis pian ! Parce que, c’est ça qui est ça !

D’ailleurs, puisque, tu envisages de venir pour quelques jours à Fantambougou – Bamako, tu te rendras compte de cette arrogante et inadmissible réalité du Mali qui me révolte et tue.

Tu verras, des routes luxueuses, des véhicules des plus sophistiqués et, entre autres, des châteaux et villas dorés, appartenant aux anciens et nouveaux riches.

Tu verras aussi d’anciens « fantambougou », complètement effacés et remplacés par des appartements cossus, mais, point d’illusions.

Tout ce que tu avais laissé ici (les hangars, poulaillers humains, immondices, déchets plastiques et… humains, crève-la-faim, malades mentaux errants) est toujours là, rejeté un peu plus loin de toutes ces modernités, ce Paradis dont ne jouissent que quelques Maliens d’en haut.

Eh oui, cher Bass, même si, la République nous a-t-on dit, a aboli la peine de mort, il faut dire que cela n’est que pure théorie.

En effet, lorsque, des fils du pays, parce que pauvres et fils de pauvres n’ont aucune chance de manger à leur faim, de se soigner, d’avoir des toits, de croire en l’avenir, ne sont-ils pas des condamnés à mort ?

Lorsque, dans un pays, parce que misérables, sans soutien, ni protection d’un Malien d’en haut, sans argent pour corrompre les juges, les citoyens sont spoliés de leurs biens, leur honneur et leur dignité, ne sont-ils pas des condamnés à mort ?

Combien sommes-nous, les Maliens survivant dans ces conditions ?

Au moins 15 millions 500 mille, sur les 16 millions que dit-on, compte le Mali. Walahi, Bilahi !

Enfin Tonton, des nouvelles de la République d’en haut ou du marigot politique, je n’ai cette fois rien à  t’envoyer. Il arrive dit-on que le marabout n’ait rien d’autre dans la tête que ses soucis pour la survie.

Que Dieu sauve les « parties sacrées » des nageurs  !  Amen.

 

A lundi prochain Inchallah !

Par ton petit Ablo !

 

Source: Le 26 Mars

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