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Dr Brahima Fomba à propos de la DISSOLUTION Du Comité exécutif de la FEMAFOOT : Les arguments qui éventrent la décision du ministre Poulo !

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Dr Brahima Fomba propos DISSOLUTION Comité exécutif FEMAFOOT arguments éventrent décision ministre Poulo

Chaque jour que Dieu fait, les Martyrs de 1991 doivent sans doute se retourner dans leurs tombes, car ne pouvant comprendre comment aujourd’hui au Mali, les idéaux de la Révolution de Mars sont quotidiennement foulés au pied sous cette IIIème République en état de délabrement juridique et institutionnel avancé sous la férule du régime du Président IBK. Depuis son accession au pouvoir en 2013, ses gouvernements successifs ont pris un vilain plaisir à souiller les principes élémentaires de l’Etat de droit et de la démocratie au Mali. C’est bien parce que notre pays n’a désormais plus rien à envier des Républiques bananières de ces espèces d’Etats voyous dont on parle souvent, qu’un ministre de la République peut apposer sa signature sur un acte comme la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 portant dissolution de l’organe directeur de la fédération malienne de football et mise en place d’un comité provisoire. Indépendamment de l’odeur nauséabonde de manipulation et d’instrumentalisation politicienne, voire de velléité de convoitise de la manne financière du football qui se dégage de cette Décision manifestement injustifiée et inopportune de la part de ce ministre chef de micro parti, sa légalité qui nous intéresse dans cette modeste contribution est fortement sujette à caution. En particulier, nous contestons ici la façon dont le ministre a décidé qui, de notre point de vue, entache ce que les juristes appellent la légalité externe de sa décision. La Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 est en effet frappée d’un vice de forme patent. Pourquoi ?

UNE DECISION AU FONDEMENT JURIDIQUE DOUTEUX

Pour bien le comprendre, il faut d’abord rappeler que la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 a été prise soi-disant en application de l’article 49 du Décret n°98-215/P-RM du 2 juillet 1998 régissant les activités physiques et sportives. Cet article 49 est ainsi libellé : «En cas de violation grave par une fédération des statuts ou de la législation en vigueur ou lorsque son fonctionnement ou ses activités portent préjudice à sa discipline, le ministre chargé des Sports peut dissoudre l’organe directeur fédéral. A cet effet, il prendra toutes mesures utiles et désignera un comité provisoire chargé d’assurer la gestion de la fédération jusqu’à l’élection d’un nouveau bureau. Cette élection doit intervenir dans un délai qui ne saurait excéder un an ». Déjà, une lecture attentive de l’article 49 incite à jeter un doute sur la régularité de la Décision du ministre, tant il ne paraît pas du tout évident que cet article puisse valablement lui servir de fondement juridique. La dissolution prévue à l’article 49 suppose au moins deux conditions qui doivent être remplies. D’abord une « violation grave par une fédération des statuts ou de la législation en vigueur». Au regard de cette première conditionnalité, la preuve est -elle faite et de quelle manière, de cette «violation grave par la FEMAFOOT des statuts ou de la législation en vigueur» ? Rien n’est moins sûr ! Ensuite, l’article 49 pose la deuxième conditionnalité qui suppose que «le fonctionnement ou les activités de la fédération portent préjudice à sa discipline». Tout comme pour la première conditionnalité, la réalité du préjudice causé au football par le fonctionnement de la FEMAFOOT ne paraît pas non plus concrètement établie. Ce qui saute aux yeux dans cette affaire de la FEMAFOOT, c’est que des individus se sentant suffisamment protégés d’en haut ne conçoivent pas un seul instant qu’on puisse leur appliquer les textes de l’Association. Dès lors, les responsables de la FEMAFOOT dont le seul tort est de veiller au respect des statuts et règlements intérieur, sont sommés par le pouvoir et ses soi-disant médiateurs de s’asseoir sur leurs propres textes et de distribuer des médailles de récompense à ceux qui ont fauté !

Dans quel Etat de droit sommes-nous, lorsqu’un simple ministre assimile l’application par une organisation de ses propres statuts et règlements, à un acte de «violation grave des statuts ou de la législation en vigueur» ? Ne sommes-nous pas en véritable République bananière lorsque le gouvernement lui-même, pendant que la FEMAFOOT et quelques individus en rébellion contre les statuts et règlements de l’Association sont en contentieux, prend fait et cause pour ces derniers sans attendre la solution juridictionnelle ? En quoi le préjudice éventuel porté au football en raison du comportement de personnes qui refusent de se soumettre aux statuts et règlements de la FEMAFOOT doit-il être payé par celle-ci et l’ensemble du monde du football ? Un gouvernement respectueux de la légalité et des principes de l’Etat de droit pour lesquels des Maliens ont sacrifié leur vie, doit-il à chaque occasion s’évertue à troquer l’application des textes de droit contre des compromissions grotesques qui piétinent les principes de l’Etat de droit ?

UNE DECISION NON MOTIVEE EN VIOLATION DE LA LOI N° 98-012 DU 19 JANVIER 1998 REGISSANT LES RELATIONS ENTRE L’ADMINISTRATION ET LES USAGERS

DES SERVICES PUBLICS

Toutes ces interrogations montrent bien que si le ministre-un homme politique de surcroît- n’est pas cerné par des contraintes juridiques, sa tentation arbitraire peut très vite prendre le dessus dès lors qu‘il vise des objectifs politiques voire politiciennes. Ainsi, sous le prétexte de servir la République, le ministre peut être amené à se servir de la République pour régler des comptes personnels ou même défendre des intérêts qui n’ont rien à voir avec l’intérêt général. C’est justement dans le but de conjurer ces dérives potentielles et protéger les administrés qu’est intervenue la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics ainsi que son Décret d’application n°03 – 580/P-RM du 30 décembre 2003.

Cette loi implique que si le ministre des Sports est habilité à infliger une sanction de dissolution à la FEMAFOOT en application de l’article 49 du Décret n°98-215/P-RM du 2 juillet 1998 régissant les activités physiques et sportives, il ne saurait le faire dans l’arbitraire et au mépris de la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 qui limite sérieusement son pouvoir d’intervention en le soumettant notamment à l’obligation de motivation. La motivation d’un acte administratif consiste en l’exposé des raisons de fait et de droit qui justifient cet acte. Elle revient à exiger des autorités administratives de faire connaître le pourquoi de leurs décisions. Son but est de garantir les droits des usagers en les informant des motifs de droit et de fait ayant fondé une décision défavorable qui les concernent.

Tel le veut l’Etat de droit en République du Mali pour la conquête duquel des Martyrs reposent aujourd’hui dans nos cimetières. Le Président IBK, ses gouvernements successifs et son fameux ministre des Sports en particulier l’auraient-ils oublié ? L’on est bien en droit de se poser la question. Car la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 portant dissolution de la FEMAFOOT ne comporte aucune motivation. Or la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics ainsi que son Décret d’application n°03 – 580/P-RM du 30 décembre 2003 a prescrit l’obligation juridique de motivation des décisions administratives.

Aux termes de l’article 8 de cette loi dont les dispositions sont pour l’essentiel reconduites dans son Décret d’application n°03-580/P-RM du 30 décembre 2003, «l’obligation de motivation s’applique aux décisions qui infligent une sanction ; retirent un avantage dont l’attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l’obtenir ; subordonnent l’octroi d‘une autorisation à des conditions restrictives ou imposant une sujétion ; retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; opposent une prescription, une forclusion ou une déchéance».

Au regard de la question de la dissolution de la FEMAFOOT, il découle évidemment de cet article 8 que la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 s’inscrit parfaitement dans le cas de figure des « décisions qui infligent une sanction » et qui, pour ce motif, sont soumises à l’obligation de motivation. Nul ne peut le contester, car la Décision a été prise sous l’empire de l’article 49 du Décret n°98-215/P-RM du 2 juillet 1998 régissant les activités physiques et sportives, un article qui se trouve justement logé dans le Titre V intitulé «DES SANCTIONS». Le ministre des Sport ne peut, au risque d’entacher sa décision d’illégalité flagrante, infliger sans aucune motivation, une quelconque sanction de dissolution à la FEMAFOOT au titre de l’article 49 du Décret n°98-215/P-RM du 2 juillet 1998. D’ailleurs, la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics est encore plus explicite à ce sujet, puisque son article 9 précise que « la motivation doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent les fondements de la décision ».

La Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 portant dissolution de l’organe directeur de la fédération malienne de football et mise en place d’un comité provisoire, a totalement foulé au pied les articles 8 et 9 de la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics. Pour défaut de motivation, la Décision est illégale, arbitraire et donc indigne d’un Etat de droit.

UN SIMPLE « CONSIDERANT » POUR FOULER AU PIED L’OBLIGATION LEGALE DE MOTIVATION DE LA DECISION DE SANCTION

L’absence de motivation de la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 ressort clairement de sa contexture comprenant les visas, un considérant et les articles qui en constituent le corps.

On peut ainsi se rendre à l’évidence que la Décision comprend deux grandes parties. Une première partie constituée d’une part des Visas se référant à la Constitution, à deux lois et à trois décrets et d’autre part d’un Considérant se référant à la «situation de crise au sein du football». Quant à la deuxième partie constituée du corps même de la décision, elle se ramène à 5 articles. Le premier article dissout sèchement, sans autre forme de procès ni aucune explication, la FEMAFOOT. Les autres articles sont relatifs au fameux Comité provisoire substitué à la FEMAFOOT dissoute.

Comme on peut le constater, la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 n’est nullement motivée. Le seul élément de motivation de cette décision semble se réduire au Considérant sur « la situation de crise au sein du football». Si le ministre a pu rêver un seul instant que l’exigence légale de motivation est satisfaite par cette pitoyable expression «Considérant la situation de crise au sein du Football», ce rêve ne peut être qu’un cauchemar juridique. Le ministre ferait mieux de se réveiller ! La formule bateau de ce Considérant qui ne permet pas d’expliciter les raisons juridiques précises de sa décision, ne sert en réalité qu’à occulter les velléités d’instrumentalisation et de manipulation inavouables à son origine. Le ministre des Sports ignore certainement que l’expression «situation de crise au sein du football» généralement utilisée par l’homme de la rue au détour de conversions sur le football malien, ne veut absolument rien dire et témoigne davantage de son incapacité à établir de manière concrète, les circonstances de fait et de droit qui ont concouru à faire tomber la FEMAFOOT sous le coup des sanctions prévues à l’article 49 du Décret n°98-215/P-RM du 2 juillet 1998 régissant les activités physiques et sportives. Il est triste de constater qu’un ministre de la République peut à ce point faire preuve de légèreté et saper ainsi les principes élémentaires de la légalité républicaine. Comme précisé à l’article 9 de la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics comme quoi «la motivation doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent les fondements de la décision », la décision de dissolution devait être motivée de manière claire et précise.

Cela signifie que les éléments précis de droit et de fait auraient dû être incorporée à l’acte lui-même, c’est à dire faire corps avec lui de telle manière qu’à la seule lecture de la décision, la FEMAFOOT puisse en connaître les motifs précis.

En aucune façon, la motivation ne peut être générale et imprécise, à l’instar du considérant bateau qu’on peut lire sur la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 faisant allusion à la « situation de crise au sein du football » comme s’il s’agissait d’une décision de justice. Ce Considérant ne peut aucunement tenir lieu de motivation de la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017, non seulement au sens des articles 8 et 9 de la loi n° 98-012 du 19 janvier 1998 régissant les relations entre l’Administration et les usagers des services publics, mais également au sens de la jurisprudence administrative établie et consolidée en la matière. En présentant ses motifs conformément à la loi et à la jurisprudence, le Ministre des Sport auraient donné la possibilité à la FEMAFOOT de pouvoir comprendre le bienfondé de sa décision, d’être édifiée réellement sur les bases légales et les motifs précis de fait qui ont fondé sa dissolution et de la contester éventuellement devant le juge. Le défaut de motivation de la Décision n °2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 a ainsi eu pour effet de priver, de manière illégale et arbitraire, la FEMAFOOT de ce droit. A cause du défaut de motivation qui la caractérise, la Décision n°2017-0011/MS-SG du 8 mars 2017 portant dissolution de l’organe directeur de la fédération malienne de football et mise en place d’un comité provisoire est entachée d’illégalité pour vice de forme.

Dr Brahima Fomba propos DISSOLUTION Comité exécutif FEMAFOOT arguments éventrent décision ministre Poulo

Dr Brahima FOMBA

Chargé de Cours à Université des SciencesJuridiques et Politiques de Bamako(USJP)

Source: Aujourd’hui-Mali

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