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États-Unis: le progressiste Pete Buttigieg candidat à l’investiture démocrate

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Le maire de South Bend, Pete Buttigieg, prend la parole lors d'un rassemblement pour annoncer sa candidature à la présidence démocrate de 2020 à South Bend, le 14 avril 2019.

Surdiplômé, vétéran de la guerre en Afghanistan, catholique pratiquant et ouvertement homosexuel, Pete Buttigieg est considéré comme l’étoile montante du Parti démocrate en vue des primaires. Il vient de se porter officiellement candidat à l’investiture, ce dimanche 14 avril.

« Les gens ont du mal à prononcer mon nom, mais au moins ils savent qui je suis », a récemment déclaré celui qui était encore un illustre inconnu aux yeux du grand public il y a quelques semaines. Pete Buttigieg – prononcez « boute-edj-edj », si l’on en croit la bio de son compte Twitter – a officiellement lancé sa candidature à l’investiture démocrate pour 2020, ce dimanche 14 avril, depuis South Bend, dans l’Indiana.

En prenant la parole dans une ancienne usine automobile transformée en pépinière de start-up, il a déclaré : « Mon nom est Pete Buttigieg. On m’appelle “Mayor Pete” (Pete le maire, ndlr). Je suis un enfant de South Bend, dans l’Indiana, et je me présente à l’élection présidentielle américaine ».

Une ascension fulgurante

Fort d’une carrière universitaire exemplaire, marquée par des passages par Harvard et Oxford, le démocrate polyglotte (il a appris sept langues, dont le français) épate par ses qualités d’orateur. Sa voix apaisée, sa confiance en lui et son visage poupon ont séduit les médias (voir son passage dans l’émission phare de NBC, Meet the Press)… et les téléspectateurs. À tel point que ce descendant d’un immigrant maltais a obtenu des 11 % d’intentions de vote dans l’Iowa, selon un récent sondage, derrière les mastodontes Joe Biden et Bernie Sanders. Ce score est plus qu’honorable, dans cet État est souvent révélateur des tendances des électeurs.

Autre indicateur de son présent succès, celui qui briguait la présidence du Comité national démocrate en 2017 est parvenu à lever pas moins de 7 millions de dollars en un trimestre pour financer sa campagne. Un total bien inférieur aux 18 millions de Bernie Sanders ou aux 12 millions de Kamala Harris, mais qui souligne l’espoir qu’il suscite. « Avec ses 37 ans, il incarne la jeunesse dans un parti en quête de renouveau, dont les têtes d’affiche ont plus de 70 ans », note Corentin Sellin, professeur d’histoire, spécialiste des États-Unis, joint par RFI. « Il excède d’ailleurs de peu l’âge minimal pour se présenter, qui est de 35 ans. C’est assez exceptionnel dans l’histoire des États-Unis. »

Un « capitaliste progressiste »

En dépit de son jeune âge, Buttigieg attaque sa septième année comme maire de South Bend (Indiana), ville de plus de 100 000 habitants située dans le Midwest, avec un premier mandat entrecoupé par un déploiement de 7 mois en Afghanistan en tant qu’officier de contrespionnage. Une prouesse pour ce chrétien pratiquant, ouvertement homosexuel, crédité de 80 % des voix lors de sa réélection, le tout dans un État plutôt conservateur.

« Il a le sens du contact, il serre des mains mais n’a pas de côté rockstar », poursuit Corentin Sellin. « Aux États-Unis, on parle de “retail politics” : il incarne cette politique du porte-à-porte. » « Mayor Pete », comme il est surnommé par ses administrés, est parvenu à remettre sur les rails une ville dont l’économie s’est effondrée suite à la fermeture d’usines automobiles en jouant la carte de la modernisation. Son plus grand fait d’arme : avoir fait chuter le chômage de 10,2 % à 4,3 %. Des progrès notables bien que « des efforts restent à faire », concède l’intéressé : le taux de pauvreté est aujourd’hui de 25 %. À ceux qui pointent son manque d’expérience, il martèle en avoir engrangé bien plus que Donald Trump avant son élection.

« L’emballement qu’il suscite est plus lié à son personnage qu’à son programme, encore relativement flou », tempère l’historien. Pour l’heure, seules quelques grandes lignes ont fuité au travers de ses interviews. Celui qui se décrit comme « capitaliste » mais « progressiste » penche pour une réforme constitutionnelle visant à réviser la nomination et le nombre de juges de la Cour suprême, ainsi que pour une suppression du collège électoral. Pro-syndicats, il embrasse les combats de son parti : un contrôle plus strict des armes à feu et la lutte contre le changement climatique. Buttigieg est contre la peine de mort et prône enfin l’instauration d’une couverture santé universelle. Pour Corentin Sellin, il constitue « une synthèse de l’électorat démocrate ».

Une carte à jouer pour 2020

À l’instar de Barack Obama et au contraire du plus clivant Beto O’Rourke, le jeune vétéran tente de rassembler l’électorat démocrate autour de lui sans viser une communauté en particulier. Néanmoins, le portrait-robot de son électeur type semble d’ores et déjà dessiné : le millennial. Autrement dit, ces 18-35 ans qui ont boudé Hilary Clinton en 2016, notamment dans les États comme le Michigan ou le Wisconsin.

Reste pour Pete Buttigieg à surfer sur cette vague de notoriété jusqu’aux primaires, dont le coup d’envoi est fixé à février 2020, sans exploser en vol. « Il faut se méfier de l’emballement. Chez les démocrates, on compte plusieurs occurrences de candidats qui se sont effondrés après avoir bien débuté. D’autant que jusqu’ici, les victoires aux primaires n’ont concerné que des sénateurs, des gouverneurs, etc. Pete Buttigieg n’est que maire », rappelle Corentin Sellin. Mais l’historien l’assure : « Il aura une carte à jouer. »

RFI

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