Il n’est pas aisé de connaître la vraie trajectoire de la mouvance présidentielle au Mali. Sous Alpha Oumar Konaré, il y existait une lisibilité bien claire de la scène politique avec, d’une part, l’ADEMA et ses alliés fidèles au pouvoir et, d’autre part, les partis de l’opposition. Sous ATT, ce fut une situation plutôt inédite avec, à la tête de l’Etat, un apolitique qui n’entendait point laisser les partis politiques constituer un front contre lui ; d’où l’instauration de ce qui fut présenté comme une gestion consensuelle du pouvoir mais qui, en réalité, s’apparentait plutôt à un « partage du gâteau ». Durant les dix ans de magistrature de celui qui était surnommé « le soldat de la démocratie », la chose politique a été reléguée au second plan, même si les dirigeants politiques qui avaient choisi de soutenir le régime se faisaient entendre. A la différence de ces deux précédents régimes, actuellement, l’on constate l’enlisement total des regroupements politiques qui ont décidé d’apporter leur soutien à l’action du président de la République. Quand l’opposition, avec ses chefs de file rassemblés derrière un chef, ne cessent de monter aux créneaux pour fustiger, la majorité se signale à l’attention du public par son mutisme.
A la veille du second tour de la présidentielle de 2013, des observateurs avaient parié sur une dislocation rapide de la majorité présidentielle, compte tenu du nombre élevé de partis (plus de 80) ayant choisi de se regrouper autour du nouvel élu. La plupart de ces soutiens, estimait-on, n’étaient que de façade, ces différents partis ne pouvant pas nullement s’épanouir auprès du grand nombre de leaders des associations islamiques et autres organisations corporatistes qui occupaient les premiers rangs lors de la campagne pour l’élection du président IBK.
Partant, après trois ans de gestion, l’histoire a fini par donner raison à ces observateurs : la majorité n’est pas complètement disloquée, mais l’on compte par bout des doigts les vrais soutiens du président. Le responsable d’une telle situation est, non le regroupement qui s’est constitué pour soutenir l’action du président de la République, mais le parti du président de la République lui-même, le RPM, un parti miné par des querelles de personnes, ne jouant pas franc jeu avec les alliés du pouvoir avec des dirigeants à l’ego démesuré qui ne font que polluer la vie politique autour du pouvoir.
Leur sert de justification, la traversée du désert subie par leur chef depuis son fracassant départ de l’ADEMA : des années de galère au cours desquelles le RPM s’est effiloché, les uns et les autres lorgnant vers d’autres horizons. Aussi, ayant accédé au pouvoir par un heureux hasard, ils n’entendent rien partager avec leurs rivaux d’hier.
Du coup, les entités politiques qui ont fait le choix d’être de l’opposition présentent un visage plus solidaire et s’activent plus que ceux de la majorité. Leurs manifestations drainent du monde, leurs actions animent la presse et leurs messages (même saugrenus) font des échos sur les réseaux sociaux. Ainsi, l’idée que l’opposition nationale puisse arriver au pouvoir de manière démocratique en 2018 fait son chemin, prend consistance et soigne l’image de ceux qui n’avaient aucune chance de sortir la tête après la gaffe de « l’initiative riz » ou des forages de l’UEMOA.
En revanche, au sein de la mouvance présidentielle, des responsables illustrent la culture de l’échec qui se concrétise par un bilan de plus en plus catastrophique à l’égard duquel le peuple ne cesse de manifester par son indignation. Ces responsables ont manifesté leur hostilité à l’égard de tous ceux qui ne sont pas de leurs rangs, à commencer par les différents Premiers ministres que la chef de l’Etat a pris soin de choisir hors de leur cercle. Ils n’acceptent aucune alliance locale lors des joutes électorales et s’attèlent à fragiliser de jour en jour l’extraordinaire mouvance formée autour du pouvoir.
Ces caciques du RPM continueront-ils à susciter la fracture entre le parti au pouvoir et ses alliés et par ricochet entre le président de la République et son peuple ?
La redaction