Lors de l’avant dernier conseil des ministres, Thierno Hass Diallo, le ministre des Affaires religieuses et du Culte a fait une communication écrite relative à la proposition de création de la Direction nationale des Affaires religieuses et du Culte. En vaut-elle la peine ?
L’inquiétude et l’exaspération des maliens se sont réveillées après avoir entendu cette communication qui, à plus d’un titre au lieu d’être une solution, servirait à renforcer une situation déplorée par les plus avertis: l’autonomisation et la forte implication des religieux dans la sphère politico-administrative.
A chaque problème sa solution, même temporaire.
L’ignoble et l’égoïste coup d’Etat de 2012 a poussé notre pays dans les tréfonds de la barbarie, de l’animosité. Il a aussi ouvert la voie du banditisme de grand chemin à des individus d’un autre âge qui ont prêché la différence et la haine au nom d’un islam autre que celui prôné par Mahomet (PSSL), couplé à la mauvaise foi de certains leaders religieux du centre et du sud du Mali. Ce qui a valu la création d’un ministère en charge de ce domaine pour asseoir une ligne de repère dans la voie de la cohabitation des croyances. Mais, le dialogue religieux prôné dans cette communication est une aberration lorsqu’on sait que les religions abrahamiques furent introduites au Mali depuis plusieurs siècles et que les peuples de différentes obédiences religieuses ont vécu dans la cohésion totale tout en mettant les anciennes valeurs traditionnelles au service de la cohabitation.
Pendant ces trois dernières années, on assiste au Mali à une implication sans précédent des religieux à tous les niveaux des problèmes d’administration et de décision publique. Ce n’est point une manière ou une intention d’ôter à cette couche ses droits de citoyenneté mais de conserver le caractère républicain et laïc du pays.
Le Mali en proie à une crise multiforme, avait besoin d’une synergie d’actions et de réflexions pour mettre hors d’état de nuire les bandits fous de Dieu.
Ainsi, la période transitoire a créé un ministère dédié à ce secteur. Les musulmans majoritaires comme d’autres confessions ont tout le temps été considérés dans les prises de décisions capitales pour le pays.
L’amalgame
L’arbre ne doit pas cacher la forêt, il faut faire attention à ne pas faire un alliage entre devoir et droit. Ainsi dans la forme républicaine de l’Etat tout malien, quelque soit son appartenance religieuse, est représenté dans toutes les sphères de décision à l’issue des élections auxquelles leurs candidats ont participé.
Ce ministère devait se charger des questions relatives au dialogue interreligieux, de culte, de lutte contre l’extrémisme religieux. Les terroristes au nom d’un autre Dieu que celui d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, de Joseph, de Moïse, de Jésus, de Mahomet qui sont tous des prophètes ayant prôné la paix et la justice, tuent encore au jour le jour et sèment la terreur partout au Mali. A quoi aura servi ce dialogue interreligieux tant vanté par M. Diallo ?
Que dire lorsqu’un département qui a du mal à s’assumer veut se renforcer par la création d’une direction nationale ? Tous les jours, on assiste à une flambée de l’intégrisme et du radicalisme religieux contre lesquels notre fameux ministère a montré son impuissance à faire sortir le pays du gouffre par sa « coordination et son contrôle technique de la mise en œuvre de cette politique, de la règlementation et de l’application des règles relatives à l’exercice de la liberté religieuse. »
La laïcité en mal
Il est aussi fait référence dans la communication que la création de la direction vise, au niveau national, à asseoir une conception étatique de la laïcité et de sa pratique. Illogisme ? Certes, lorsqu’on sait qu’au Mali les religions ont été écartées explicitement du jeu politique sauf mauvaise foi. L’Etat malien a toujours eu cette considération de libre arbitre quant aux pratiques des religions en préservant sa laïcité.
La « célèbre » communication du ministre Thierno Hass Diallo fait allusion à l’effectivité du libre exercice des croyances religieuses et des croyances traditionnelles dans les limites du respect de l’ordre public. Ironie du sort. L’ordre public est troublé et hanté par des supercheries de toutes sortes. Qu’a fait le ministère de tutelle pour identifier les fautifs de ces pratiques véreuses et les sanctionner ?
Que ne font pas les religieux et les tradipraticiens au Mali aujourd’hui ? Ils sont, avec la profusion des radios libres, entrain de tromper, escroquer et aussi illusionner plus d’un à travers la promotion de produits dont tout le monde ignore la provenance et les conséquences sur la santé publique.
Une incongruité
La montée de l’intégrisme religieux est quelque part la résultante du défaut de normalisation des prêches et hymnes religieux par les leaders confessionnels. Les écoles ou courants religieux bâtis sur les adversités et les inimitiés ont pourri et dépourvu de tout sens, le phénomène religieux.
La nouvelle direction nationale, aux dires du ministre « vise à renforcer le climat de cohabitation pacifique des différentes confessions et des croyances traditionnelles à travers la promotion du dialogue interreligieux, l’encadrement du système d’enseignement confessionnel ». Une incongruité, dira l’autre, pour qui sait qu’au Mali contemporain, les hommes ont toujours cohabité harmonieusement et que problème, s’il y en a, serait interpersonnel. Jamais dans ce pays les systèmes d’enseignement confessionnel n’ont été source de discorde et conflit entre les hommes.
Il revient au ministère des affaires religieuses et du culte de prendre les taureaux par les cornes en inspirant les croyants et non-croyants au respect des valeurs humaines et sociales qui se caractérisent par la probité, l’amour, la convivialité et le respect de l’autre. Alors !
Place à la revue des copies, M. Diallo des croyances.
Badara ALOU
Source:Le Soft