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Démocratie et bonne gouvernance : pour un nouvel État

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Par ces temps de crises sans fin, d’incertitudes et de graves menaces, la question de l’État revient au centre du débat politique. Il faut aller à la création d’un État nouveau, en rupture avec l’État colonial qui n’est plus en mesure de répondre aux aspirations légitimes des Maliens. Ce projet nouveau s’inscrit dans la filiation politique et idéologique de nos illustres dirigeants africains, notamment les Présidents Modibo Keita, Ahmed Sékou Touré, Kwameh N’krumah, Amilcar Cabral, Julius Nyerere…

Dans le projet politique de ces dirigeants, l’État indépendant devait résulter d’un effort collectif déployé pendant une longue période par une avant-garde décidée à briser la domination étrangère. Construire un État indépendant supposait une mobilisation de toutes les entités ethniques et régionales autour de la conquête d’une identité nationale commune. L’Union Soudanaise-RDA a conduit une expérience très ambitieuse dans un grand pays enclavé et sous-peuplé. Elle posa des actes forts de rupture avec l’économie de traite coloniale imposée par la France, dénonça le pacte colonial, l’extraversion de notre économie, créa une monnaie nationale pour financer le développement, mit en place une stratégie de développement autocentrée, basée sur un modèle d’accumulation interne du capital à partir de la mobilisation du surplus agricole destiné à être investi prioritairement dans l’industrialisation.

Le coup d’État de 1968 a non seulement mis fin à cette expérience, mais il a aussi mis fin à la construction d’un État indépendant, libre de ses choix, maître de son destin. De cette époque à l’avènement de la démocratie et du multipartisme, le dépérissement progressif de l’État national s’est manifesté de façon logique et systématique : d’un côté il y’a l’effet de la domination coloniale, de l’autre, les agissements d’une couche de prébendiers qui, en alliance ouverte avec la bourgeoisie bureaucratique et la bourgeoisie compradore, a conduit le pays au désastre économique, à la banqueroute financière. La mauvaise gestion, la corruption et le népotisme des dirigeants ont été érigées en mode de gestion. Le recours à l’aide étrangère pour redémarrer notre système productif est devenu systématique. Les institutions financières internationales vont s’installer en force. Sur la base d’un encadrement institutionnel, ils réorganisent en permanence la prise du pouvoir d’État sur la base d’une alliance politique entre les forces qui sont en mesure de préserver leurs intérêts et légitimer le pillage organisé des ressources stratégiques. Cette alliance exclut naturellement les forces progressistes et anticolonialistes, les syndicats progressistes, les paysans et les ouvriers.

Aujourd’hui, notre pays est complètement mis sous tutelle de la communauté internationale, avec un État totalement anéanti, une classe politique transformée en girouette, discréditée aux yeux du peuple. L’État néocolonial ne peut que gérer l’instabilité permanente et sera incapable d’assurer l’ordre. Il perdra tous ses rôles et fonctions classiques d’orientation, de conception, de pilotage, de coordination et de mise en œuvre, d’impulsion de l’économie nationale. Or, le défi actuel est de construire un État nouveau, poser les bases d’un développement autonome, mettre en place des procédures démocratiques nouvelles, des hommes nouveaux, construire un système démocratique qui donne tout le pouvoir au peuple. C’est la condition préalable pour poser les bases d’un État souverain qui préserve l’unité, l’intégrité territoriale et la cohésion nationale, et qui est capable de mettre en échec les ingérences extérieures.

Nouhoum KEÏTA

 

Source: Le Réporter

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