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Violation des droits à l’emploi des personnes handicapées au Mali : Les organisations des personnes handicapées comptent récidiver des actions de manifestation pour se faire entendre

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Comité Scientifique pour la Promotion de l’Emploi des personnes handicapées S/c Collectif des Handicapés Diplômés du Mali (COHD) Lettre ouverte à son Excellence, Monsieur Ibrahim Boubacar Kéita, Président de la République Monsieur le Président, Nous, personnes en situation de handicap, diplômées et non diplômées, regroupées au sein du Comité Scientifique pour la Promotion de l’Emploi des personnes handicapées, qui rassemble, en son sein, toutes les Organisations de Personnes Handicapées en République du Mali, souhaiterons vous faire part de la violation des droits à l’emploi de la couche susmentionnée. Et nous espérons trouver à travers votre personne la juste solution.

Monsieur le Président,

Souffrez que nous vous remercions pour votre engagement sans faille aux côtés des personnes handicapées, en 1997. Cet engagement vous a amenés, M. le Président, à recevoir en cette année des camarades, à l’occasion de leur sit- in devant la primature, pour revendiquer leurs droits à l’emploi. Ils étaient tous des diplômés. Vous les avez accueillis en tant qu’êtres humains et citoyens à part entière. Après les avoir écoutés, vous avez été justes en ordonnant l’intégration d’eux tous dans la fonction publique sur la base de la Convention No. 159 du BIT sur la réadaptation professionnelle et l’emploi des personnes handicapées. Vous ne vous êtes pas arrêtés là. Mais, vous avez aussi ordonné le décaissement de 100 000 000 de FCFA pour la création des activités génératrices de revenu (AGR) en faveur des personnes handicapées non diplômées.

Toutes les personnes en situation de handicap se rappellent encore de votre acte combien magnanime et salvateur, et tout le peuple, avec celles- ci, se souvient que vous avez été l’initiateur de l’instauration de l’intégration directe des handicapés dans la fonction publique. Votre sens de justice a été fort apprécié et a fait un effet dominos dans la sous-région puisque bon nombre de pays sont venus s’inspirer de l’exemple malien pour trouver un palliatif à l’emploi des personnes handicapées.

Monsieur le Président,

Ce qui était considéré comme un droit, en faveur des personnes handicapées du Mali, est aujourd’hui remis en cause, et cela à partir de 2012, avec la survenue du pronunciamiento militaire. A cette date, une liste de 70 personnes, ainsi que son élargissement, avait été approuvée par Mme Cissé Mariam Kaïdama Sidibé, Premier ministre d’alors. Mais, prétextant un argumentaire contraire au votre d’il y a 20 ans, les autorités de la transition de 2012, qui avaient hérité du dossier, ont tout simplement remis en cause l’intégration des personnes handicapées diplômées dans la fonction publique.

Avant cette date, nous nous permettons de vous dire, M. le Président, que grâce à votre action, les personnes handicapées se sentaient comme citoyennes, à part entière, jouissant des droits humains en leur faveur. Mais, hélas, de nos jours, notre couche se sent reléguer au second plan dans les politiques nationales, notamment, en ce qui concerne l’emploi.

Monsieur le Président,

Le calvaire des personnes diplômées en situation de handicap a donc commencé en 2012 lorsqu’on a refusé d’entériner et de publier la liste des 70 dossiers. Pour chercher un aboutissement heureux à la situation, la Fédération Malienne des Associations de Personnes Handicapées (FEMAPH) a mené des démarches pour expliquer le bien-fondé de cette intégration directe dans la fonction publique. Elle s’est heurtée au refus catégorique des autorités concernées. Après la transition, une prolifération de rencontres se sont opérées auprès de vos différents gouvernements pour décanter la situation en vue d’obtenir l’approbation et l’élargissement de la liste en suspens, comme voulu par Son Excellence Mariam Kaïdama Sidibé, l’administration étant une continuité.

Mais, votre premier gouvernement a voulu instituer un système de quota réservé aux handicapés diplômés, qui ne prend pas en compte le respect des droits de ceux-ci. D’abord, ce système défavorise nos camarades non-voyants car ne pouvant participer à aucun concours parce qu’aucune mesure d’accompagnement n’est prise pour les amener à concourir. Ensuite, ce système crée une inégalité et une injustice dans l’intégration professionnelle des camarades, car toutes les spécialités ne sont pas concernées. Cela a contribué à exacerber le taux de chômage chez les personnes handicapées diplômées. Leur nombre a quadruplé depuis 2012. Enfin, le quota dont il est question n’est même pas spécifié. Depuis son instauration, on a assisté à un recrutement timide des camarades. Aussi, considérons- nous que ces succès relèvent de leur mérite excluant tout respect des dispositions de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, de la Convention du BIT, et même de l’article 18 du statut général de la fonction publique qui prévoit des mesures spéciales pour les handicapés.

Monsieur le Président,

Face à cette situation, le Collectif des Handicapés Diplômés du Mali a pris l’initiative de rassembler toutes les organisations de personnes handicapées dans un Comité Scientifique pour la promotion de l’emploi des membres. Auparavant, il avait privilégié la négociation en voulant rencontrer Mme le Ministre de la Fonction Publique pour asseoir un partenariat et un cadre de dialogue. C’est un chargé de mission qui nous a reçus tout en promettant que Mme le Ministre allait nous rencontrer ultérieurement. Nous lui avons expliqué avec moult détails les fondements de la nécessité voire de l’obligation de donner du travail aux personnes handicapées. Lorsque nous quittâmes le Ministère ce jour-là, c’était dans l’espoir d’y retourner, et nous asseoir avec la Cheffe du Département, comme il nous avait été promis, pour comprendre davantage le point de blocage à notre intégration. Rien à faire!

Monsieur le Président,

Par lettre No. 000417/MTFPSG adressée à la FEMAPH, en date du 18 avril 2016, le Ministère du Travail, de la Fonction Publique et de la Réforme de l’Etat, chargé des relations avec les Institutions remettait ouvertement en cause notre intégration dans la fonction publique. Cette lettre précisait que les précédentes intégrations étaient des faveurs et qualifiait tacitement les personnes handicapées d’inaptes. C’est donc par manque d’interlocuteurs, et face à l’injustice qui nous avait jetés dans le désarroi, que nous avons pris toutes nos responsabilités en faisant un sit- in devant ledit ministère, le 5 octobre 2016. Constatant l’agitation des camarades, aux confins de la colère et de la détermination, la ministre,

Mme Diarra Raky Talla, nous a reçus, dans la foulée. Dans ses propos, elle a maintes fois affirmé que seule une volonté politique pouvait résoudre notre problème d’emploi.

Comme connu de tous, la presse nationale et internationale a fait échos de notre manifestation. Et, nous avons été sollicités pour privilégier le dialogue, par le Ministère de la solidarité et de l’action humanitaire; mais aussi par le Conseil National de la Société Civile.

Avec la société civile, nous avons de nouveau rencontré la ministre dont l’assentiment avait été acquis pour la mise en place d’une commission pour cogiter sur le rétablissement de l’intégration directe des personnes handicapées diplômées dans la fonction publique, ainsi que le déblocage et l’élargissement de la liste des 70. Dans la même optique, nous avons, par la suite, été reçus par le ministre de la Solidarité qui avait promis de trouver la solution aux cinq points de revendication contenus dans notre cahier de charges. Il s’agit, en l’occurrence, du rétablissement de l’intégration directe, l’approbation de la liste des 70 de 2012 ainsi que son élargissement, l’emploi des camarades ayant fait des études de la langue Arabe, le financement des activités génératrices de revenus pour les camarades non diplômés, le recrutement de nos militants dans le barreau. Sur ce dernier point, le ministre avait donné son accord tout en promettant de travailler étroitement avec son collègue de la fonction publique pour la prise en compte des autres points. C’était à la veille du concours de recrutement des avocats stagiaires, mais aucun camarade n’a été recruté.

D’octobre 2016 à janvier 2017, nous avons été figés dans une sempiternelle attente, les yeux tournés vers le bon office de notre ministère de tutelle pour voir le bout du tunnel. Mais, aussi que cela peut paraitre paradoxal, le ministère de la Solidarité a réquisitionné notre Fédération pour modifier la liste des 70, en y enlevant tous ceux qui ont dépassé l’âge d’intégration dans la fonction publique. Or, ils accomplissaient le critère d’âge au moment où on élaborait la liste en 2011.

Monsieur le Président,

L’incohérence entre les promesses et les actions achevèrent de désorienter les camarades. Mais en tant que citoyens, nous estimons encore avoir des droits et devoirs. Nous attirons votre attention que si rien n’est fait, les personnes handicapées risqueront de récidiver des actions de manifestation pour se faire entendre. Car c’est la seule arme qu’elles disposent face à l’incertitude de la vie quotidienne.

Nous sommes des filles et fils de ce pays. Et nous ne souhaitons aucun mal pour ce pays qui nous a vus naître et qui nous a permis d’aller à l’école pour participer à son édification. C’est pourquoi, loin de nous l’idée de poser des actes qui pourraient attirer les opinions et ternir son image.

Nous exprimons ici toute notre croyance en votre bon sens et votre esprit de justice et vous demandons, en toute justice, de refaire un clin d’oeil à notre couche comme vous l’avez fait en 1997, au nom du Droit.

Fait à Bamako, le 06 février 2017

Boubacar Djigui Diarra

Tél : 76283717

Président du Comité Scientifique

pour la Promotion de l’Emploi des Personnes Handicapées

S/c Collectif des Handicapés Diplômés du Mali (COHD)

 

Source: Le Républicain

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