Comme le constate le site d’information congolais Cas-Info, « on entre dans le dur. […] Jusque-là réservé, Joseph Kabila est passé à l’offensive. A l’issue de sa rencontre, hier lundi 20 février, avec les évêques membres de la Cenco, le chef de l’Etat a fait passer un message clair, net et précis à l’opposition : il attend toujours une liste de trois noms avant de faire son choix du futur Premier ministre devant conduire le gouvernement de Transition. Autrement dit, le Rassemblement qui s’est déjà rangé derrière le seul nom de Félix Tshisekedi, fils du leader de l’UDPS décédé le 1er février dernier à Bruxelles, doit revoir sa copie. »
L’opposition ne l’entend pas de cette oreille… « Dans les rangs de la coalition, rapporte encoreCas-Info, l’analyse reste différente et elle se radicalise même pour certains, à l’image de Jean Bertrand Ewanga. Pour le président du Front Citoyen pour la République, il n’est pas question de proposer trois noms. “Ce n’est pas ce que dit l’accord”, a-t-il répété à Cas-Info. Plus incisif encore, François Mwamba, ex-coordonnateur du Mécanisme de suivi de l’Accord d’Addis Abeba passé dans l’opposition, a lui, renvoyé le chef de l’Etat dans les cordes de l’accord de la Cenco. “Ce n’est pas lui qui choisit. On lui propose un nom et il nomme”, a assené le président de l’ADR. »
Un plan B ?
« Alors que va-t-il, que peut-il se passer ? Va-t-on vers l’exécution d’un Plan B, s’interroge Le Potentiel à Kinshasa, dont l’opinion ne connaît ni les tenants ni les aboutissants ? Selon des indiscrétions, les prélats catholiques risquent de jeter l’éponge et de demander à la population de se prendre en charge. Puisque le pouvoir, qui vient de jeter l’huile sur le feu, est dans la logique de la confrontation. Toutes les intrigues et manigances du camp présidentiel ne visent que la non-application de cet accord. Ce qui amènerait le chef de l’Etat à demeurer au pouvoir et le renvoi des élections aux calendes grecques. Désormais, conclut Le Potentiel, le bras de fer entre le Rassemblement et la Majorité présidentielle est engagé. L’obscurité envahit le microcosme politique congolais, car cette situation conduit droit vers l’impasse. »
« Les évêques congolais vont-ils rendre la soutane ? », s’interroge pour sa part L’Observateur Paalga au Burkina. « La réponse dans les jours qui suivent. Il faut espérer que, malgré les difficultés et l’adversité qu’ils rencontrent, les hommes de Dieu tiendront bon ; car constituant les derniers remparts, s’ils venaient à céder, ce sont les portes de l’enfer qui s’ouvriraient devant les 80 millions de Congolais. »
Aujourd’hui, toujours à Ouaga, résume ainsi la situation : « en RD Congo, il y a désormais un illustre cadavre, celui de l’opposant Etienne Tshisekedi à plus de 6 000 km de Kinshasa, dont les politiques se disputent les dividendes relatifs à son inhumation. Une opposition prise dans son propre piège, née de divisions internes et un président calfeutré dans son palais qui boit du petit lait. A 10 mois de la présidentielle, les eaux du fleuve Congo restent toujours troubles et les sauriens avancent prudemment. »
Massacre filmé
Par ailleurs, l’émotion est vive dans le pays, et même hors des frontières, après la diffusion d’une vidéo montrant un massacre perpétré par des militaires congolais…
« Une vidéo de près de 7 minutes, relate le site Afrikarabia, où l’on voit une colonne de soldats en uniforme de l’armée régulière congolaise progressant sur une route de terre. Au loin, des chants se font entendre, provenant d’un groupe de personnes que l’on distingue au fond de l’image. Une voix ordonne alors de faire feu. Les silhouettes s’écroulent. Après plusieurs rafales, les soldats se rapprochent de leurs victimes, toutes à terre, toujours suivis par l’homme au téléphone portable qui continue de filmer. Les soldats se mettent alors à achever à bout portant, une à une, les personnes encore agonisantes. […] Dans cette séquence vidéo, poursuit Afrikarabia, les victimes sont toutes affublées d’un bandeau autour de la tête, caractéristique de la milice de Kamwina Nsapu, ce chef traditionnel tué en août 2016 au cours d’une opération de police dans la province du Kasaï Central, et qui avait suscité la colère de la population. Depuis cette date, le groupe refuse l’autorité de Kinshasa dans la région. Pour les ONG des droits de l’homme congolaises consultées, ce massacre aurait eu lieu il y a une dizaine de jours. »
Pour leur part, les autorités congolaises ont d’abord nié l’authenticité de cette vidéo avant de reconnaître les « excès » de certains militaires. En tout cas, la Monusco, la mission de l’ONU en RDC, a ouvert une enquête et Washington, Paris et Bruxelles ont exigé toute la lumière sur cette affaire.
Source: RFI