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Habaye Ag Med à propos de la mise en place des autorités intérimaires au Nord : “Si nous ne sommes pas entendus, nous allons créer l’enfer au Nord”

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La crise du Nord, même avec la mise en place des autorités intérimaires, est loin de trouver une solution définitive. En effet, le Congrès pour la justice dans l’Azawad (Cja), un mouvement politico-militaire dissident de la Cma, lancé sur les fonts baptismaux les 1er et 2 décembre 2016, vient de désapprouver le choix des hommes pour les autorités intérimaires dans la région de  Tombouctou. Les responsables de ce mouvement estiment qu’ils ont été exclus du processus de mise en œuvre de l’Accord, notamment dans la désignation des membres des autorités intérimaires. Ils étaient devant la presse le samedi 18 février 2017 à l’hôtel Salam pour dénoncer cet état de fait, tirer la sonnette d’alarme et interpeller l’Etat pour qu’il prenne toute sa responsabilité à revenir sur le choix des hommes à Tombouctou. Si non, ont-ils prévenu, les choses risquent de mal tourner au Nord.

Au cours de cette conférence de presse, Habaye Ag Med (membre du bureau du Cja) a fait la genèse des préoccupations de son mouvement politico-militaire tout en proférant des menaces qui risquent de déstabiliser le processus de paix.  Il a laissé entendre que s’ils ne sont pas écoutés et inclus, les choses risquent de mal tourner. “Nous avons participé à l’accord de paix et de réconciliation issu du processus  d’Alger. Nous avons participé aux négociations pour l’aboutissement de cet accord. Mais au moment de la mise en œuvre de cet accord, une bonne partie des membres du Cja se sont retrouvés éjectés de cette mise en œuvre de l’Accord. Nous parlons bien entendu au nom des populations. Il se trouve que ces populations aujourd’hui ont été purement et simplement méprisées dans le cadre de cet accord. Nous disons simplement que l’Accord ne donne pas un blanc-seing à  la médiation internationale et aux parties signataires pour mépriser ces populations. A titre d’exemple, on donne un quota de 13 personnes à la région de Tombouctou.

Nous ne voyons aucun inconvénient à ce chiffre. Mais quand il s’agit de désigner les 13 personnes  de Tombouctou, ce n’est pas quelqu’un de Bamako, de Kidal ou de Kayes qui doit désigner ces personnes à la place des populations de Tombouctou. C’est aux populations de Tombouctou de choisir leurs représentants. Cela ne s’est pas fait dans les règles de l’art dans les régions de Tombouctou, Gao et Taoudenit. Voilà ce qui nous a amenés à dire non à mal gouvernance, non à l’injustice, non au parachutage, non à la spoliation dans le cadre d’un processus qui est fondé sur l’exclusivité. A partir de ce moment, nous nous sommes constitués en un mouvement qui s’appelle Congrès pour la justice dans l’Azawad (Cja). Ce mouvement n’est pas né de la dernière pluie, il n’est né comme ça. Ce mouvement, dans les régions de Tombouctou et de Taoudenit, c’est 40 % de l’ancien Mnla, les 30 % de l’ancien Hcr. Donc, on n’est pas une génération spontanée ni sur le plan politique ni sur le plan militaire, encore moins sur les plans sociologique et territorial dans la région de Tombouctou, dans l’Azawad et au Mali en général.  Donc, qu’on fasse très attention.

Nous ne sommes pas les seuls groupes à avoir été marginalisés. D’autres groupes ont été écartés dans les régions de Ménaka et Gao. Donc, qu’on fasse très attention, que les parties signataires, la médiation internationale, la communauté internationale ne nous obligent aujourd’hui à aller dans le sens négatif. Mais s’ils continuent aujourd’hui  à procéder ainsi, il va de soi que les gens ne resteront pas les bras croisés. Je suis désolé, je ne suis pas partisan de la violence. Je suis désolé, si nous ne sommes pas écoutés, si nous ne sommes pas inclus, les choses risquent de mal tourner au Nord. Je suis désolé de le dire ainsi. Il ne faut pas qu’on nous pousse à agir négativement. Il ne faut qu’on pousse 80 % des forces de la Cma, il ne faut qu’on pousse 90% de la population du Nord au pied du mur afin qu’ils réagissent négativement. Voilà notre message qui est assez clair”, a-t-il indiqué.

“Nous avons assisté au partage du Nord”

Habaye Ag Med de poursuivre : “Nous avions pensé que la réunion de haut niveau était l’occasion de débattre de toutes les questions, de prendre conscience de nos préoccupations. A notre grand étonnement, au lieu de la prise en charge de tous les problèmes, on assiste à la réédition de Berlin 1884 pour le partage du Nord entre les parties signataires et l’exclusion de ceux qui sont concernés. Qu’on ne se leurre pas. Que les faiblesses et les problèmes internes ne nous amènent pas à prendre des décisions et des actes dont les conséquences seront désastreuses. Au Cja, nous disons de façon très claire qu’il y a le gouvernement malien, partie signataire de l’Accord. Nous sommes conscients aussi qu’il y a l’Etat malien en tant que partie souveraine chargée de la mise en œuvre  de l’Accord. A ce titre, l’Etat malien a des responsabilités qui dépassent sa simple qualité de partie signataire de l’Accord. Donc, il doit assumer pleinement sa responsabilité. Nous avons été très bien écoutés par la partie gouvernementale, par la médiation internationale. Nous alertons, nous faisons des propositions, mais nous constatons malheureusement que les choses ne font que s’aggraver et aller dans le sens négatif”, a-t-il expliqué, avant d’ajouter qu’ils vont entamer toutes les actions pour restituer leur dignité.

“L’Etat malien n’entend que les bruits des canons”, dixit Alassane Aba

L’ancien député Alassane Bah dira que le Cja est un mouvement né pour désapprouver les actions qui se passent à l’intérieur de la Cma. “C’est sûr que le Cja n’aura jamais la reconnaissance de la Cma. Et nous n’allons jamais attendre de la Cma une reconnaissance. Et cela n’enlève en rien à notre vision, à notre ambition. Parce que pour nous, s’il y a authenticité à Tombouctou, c’est le Cja qui est la plus autorisée à parler au nom de la population. Parce que tous ces mouvements sont déclenchés au nom des populations de la région de Tombouctou. Donc, on n’attend pas de la Cma une reconnaissance. C’est à l’Etat malien de prendre toutes ses responsabilités. Ce sont les partenaires qui doivent comprendre, parce que c’est de la stabilité du Mali qu’il est question. Nous ne quémandons pas notre reconnaissance. Mais nous supplions, nous implorons l’Etat malien pour qu’il se ressaisisse et qu’il prenne ses responsabilités et toutes ses responsabilités. Sinon, qu’est-ce qui va se passer demain ? Parce qu’il nous semble que c’est un Etat qui n’entend que le bruit des canons, ceux qui sont prêts à canonner tout le temps. Nous ne voudrions pas glisser de ce côté. Et c’est la raison pour laquelle on s’est démarqué de la Cma. Parce que nous nous sommes dit que nous sommes légalistes, nous sommes pour la paix, que nous sommes de la paix. Et le premier signal pour dire que nous sommes de la paix, c’est de renoncer à quoi que ce soit concernant les empiètements sur les façons de faire. Nous sommes vraiment désolés. Nous attirons l’attention de l’Etat de nous prendre très au sérieux. Car les plus dangereux se sont toujours tus. La région de Tombouctou est connue comme une région pacifiste de tout temps. Il ne faudrait pas qu’on nous amène à nous réveiller et à comprendre qu’il faut des cornes. Dans notre jargon, il est dit que le lapin est animal inoffensif. Mais il arrive des moments où il essaie de glisser. Il arrive des moments où il essaie d’avoir des cornes. Nous n’entendons pas que Tombouctou soit géré par des gens qui ne sont pas de Tombouctou. Nous voulons être entendus et compris. Si nous ne sommes pas entendus, nous allons créer l’enfer au Nord. Car, c’est l’Etat malien qui n’entend que le bruit des canons. Les plus dangereux, ce sont ceux qui ne parlent pas”, a-t-il averti.

                 Siaka Doumbia

Source: Aujourd’hui-Mali

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