Huit membres d’un groupuscule d’extrême droite allemand qualifié de “terroriste” comparaissent à partir de mardi pour une série d’attaques menées en 2015 contre des réfugiés et des adversaires politiques, dans une ex-RDA gangrenée par la xénophobie.
Ces sept hommes de 19 à 39 ans, ainsi qu’une femme de 28 ans, sont jugés au moins jusqu’en septembre pour “constitution d’une entreprise terroriste”, “tentative de meurtre” et “blessures corporelles”, parmi d’autres charges.
L’accusation leur attribue cinq attaques à l’explosif menées entre juillet et novembre 2015 à Freital, dans la banlieue de Dresde (est), contre des foyers de demandeurs d’asile et des cibles de la gauche locale. Elles ont fait deux blessés.
“Par ce biais, ils ont voulu créer un climat de peur et de répression”, affirmait en novembre le parquet fédéral, seul compétent en matière de terrorisme, en renvoyant le “groupe de Freital” devant le tribunal de Dresde.
Ce procès fleuve doit se tenir dans une salle spécialement aménagée à la périphérie de la capitale saxonne, avec ses propres cellules de prison, dans un bâtiment initialement prévu pour accueillir des réfugiés.
Les travaux ont coûté plus de 5 millions d’euros et l’audience sera placée sous haute sécurité, dans un Etat-région berceau du mouvement islamophobe Pegida, devenu emblématique de l’hostilité aux migrants.
‘Grande quantité’ d’explosifs
L’affaire commence à l’été 2015, alors que Freital faisait déjà les gros titres pour ses manifestations houleuses, dans lesquelles on conspuait les “étrangers criminels” et les “cochons de demandeurs d’asile” en faisant le salut hitlérien.
Selon le parquet fédéral, les accusés s’étaient procuré “une grande quantité d’explosifs” en République Tchèque pour viser des foyers de réfugiés, ainsi que les “appartements, bureaux et véhicules” de leurs adversaires politiques.
L’accusation leur attribue une première attaque contre la voiture du chef de file du parti de gauche radicale Die Linke à Freital, dans la nuit du 27 au 28 juillet 2015, sans faire de blessés.
Dans la nuit du 19 au 20 septembre, au plus fort de l’afflux de demandeurs d’asile auxquels la chancelière Angela Merkel venait d’ouvrir les portes, ils auraient jeté une charge par la fenêtre de la cuisine d’un centre de réfugiés.
Le souffle a projeté des morceaux de verre dans le mur opposé, quatre mètres plus loin, mais les résidents du foyer dormaient déjà et personne ne se trouvait à proximité de l’explosion.
La nuit suivante, d’après le parquet, ils ont lancé des pavés et des engins artisanaux à l’acide butyrique contre un projet d’habitat associatif, blessant un habitant.
Dix attaques par jour
Enfin, dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre, trois charges ont explosé sur les fenêtres d’un centre de réfugiés. Par miracle, un seul habitant a été blessé, souffrant de “multiples coupures” au visage.
Les deux meneurs présumés, Timo S. et Patrick F., ont été arrêtés fin 2015. Le premier a déjà été condamné l’an dernier à la prison avec sursis pour avoir frappé à coups de batte de baseball la voiture de manifestants pro-réfugiés.
Le reste du groupe a été interpellé en avril 2016 au moment où le parquet de Dresde, critiqué pour son enquête poussive, passait la main au parquet fédéral, avec une qualification désormais “terroriste”.
Impliqués à des degrés divers dans les attaques, les accusés encourent la perpétuité si la “tentative de meurtre” est reconnue, et un à dix ans de prison pour la seule “entreprise terroriste”.
L’Allemagne a enregistré l’an dernier quelque 3.500 attaques contre des réfugiés et demandeurs d’asile, soit près de dix actes de ce type par jour. Cinq cent soixante personnes ont été blessées dont 43 enfants, selon le ministère de l’Intérieur.
Dans le seul Etat-région de Saxe, qui représente 5% de la population allemande, l’association RAA d’aide aux victimes a dénombré l’an dernier 437 agressions racistes, contre 477 l’année précédente.
Avec AFP