Le Mali se trouve à la croisée des chemins. Blotti dans une crise institutionnelle, sécuritaire et humanitaire depuis six ans, sans réel lueur d’espoir, le Mali fait face aujourd’hui à un islamisme radical et aveugle sur certains sujets brûlants tel que la pratique de l’excision, laquelle est une pratique animiste qui remonte à l’ère pharaonique.
L’excision est une pratique antérieure non seulement à la naissance de l’islam, mais à toutes les autres religions monothéistes. Dans sa définition la plus générale, l’excision est l’ablation du capuchon clitorien, voire du clitoris qui est une mutilation génitale féminine (MGF) impliquant l’ablation de la partie externe prépondérante du clitoris et de son capuchon.
Cette pratique est une atteinte à l’intégrité physique et morale des victimes elle est aux antipodes du respect de l’être humain. Les inconvénients liés à cette pratique vont du risque accru de mortalité infantile de la jeune fille par hémorragie incontrôlable, à la perte du plaisir sexuel chez la femme, et à l’apparition de graves douleurs empêchant les rapports sexuels, avec un risques accru en matière de rétention urinaire et d’incontinence urinaire quotidienne etc…
L’excision est un acte grave et injuste chez les occidentaux et au niveau des organismes internationaux en charge des droits de l’homme à savoir les Nations-Unies, l’organisation mondiale de la santé (OMS), et l’UNICEF. Elle est interdite dans les pays occidentaux. En Afrique 28 pays sur 54 pratiquent l’excision à des degrés différents. Si en Egypte à Djibouti en Erythrée en Guinée au Mali en Serra Léone, en Somalie, au Soudan 90% des femmes sont excisées, au Burkina, en Centrafrique, en Côte d’Ivoire, en Gambie, en Guinée Bissau, au Kenya, au Libéria, en Mauritanie, au Sénégal et au Tchad, la proportion de la femme excisées est comprise entre 25% et 85%.
La proportion de femmes excisées à hauteur de moins 25% existe au Benin, au Cameroun, au Ghana, au Niger, au Nigeria, en RDC, au Congo, en Tanzanie et au Togo. Notons que 13 pays ont adopté en Afrique, une loi réprimant l’excision. Le Mali va-t-il être le quatorzième pays à l’interdire en Afrique ?
Cela n’est pas évident pour plusieurs raisons.
Premièrement, le meeting de protestation du 9 août 2009 des religieux manipulés par le Haut Conseil Islamique (HCIM) contre certains articles du code de la famille, qui pourtant apportaient, un honneur et une dignité à la jeune fille et à la femme en général. Ce code était bien apprécié par les organisations de défense des droits de la femme. Sous la pression des religieux guidés par le Haut Conseil Islamique du Mali (HCM), ATT a été obligé d’ecourter ses congés en Libye et de revenir au Mali afin de renvoyer en seconde lecture le dit code, en insistant sur la suppression des parties contestées par le Haut Conseil Islamique du Mali.
Deuxièmement, lors de la campagne électorale de 2013, cinq candidats se sont prêtés aux questions réponses du Mouvement Sabati 2012. Il s’agit de Cheick Modibo Diarra, Choguel Kokala Maïga, Moussa Mara, Mountaga Tall et IBK en dernière position. Si les quatre premiers candidats se sont dérobés en prétextant qu’ils allaient analyser d’abord le contenu du mémorandum, quant à IBK, il a dit tout de suite séance tenante que l’offre est très acceptable. C’est à la suite de cet accord que le mémorandum a été signé entre les parties.
Que prévoyait ce mémorandum ?
La remise en cause de la laïcité de la République pour certains de ses passages à savoir :
- La relecture du code de la famille non plus par les administrateurs, mais par un groupe de travail sous la supervision du HCIM,
- L’interdiction des débits de boisson, night-club et les maisons closes, des films pornographiques et érotiques,
- La réorganisation des critères de censure notamment ceux relatifs à l’Audio-visuelle à l’ORTM, et les médias privés,
- L’interdiction totale des jeux de hasard,
- L’aménagement des lieux de prière dans les services publics, les hôpitaux, les aéroports,
- La médicalisation de l’excision et non la suppression de cette pratique,
- Une prime mensuelle spéciale pour les imams et imams adjoints des mosquées du vendredi pour la somme de 300 000F CFA pour l’imam et 200 000F CFA pour l’imam adjoint,
- Prévoir une allocation annuelle pour les mosquées du vendredi,
- La création de tribunaux islamiques,
- La création d’un ministère des affaires religieuses.
Troisièmement, les medias privés et publics notons que sur les antennes de l’ORTM, il y a deux semaines de cela, le Ministre de la justice, Maitre Mamadou Ismaël Konaté, disait ceci :
« Pour cette loi portant interdiction de l’excision au Mali, je m’engage. Je m’engage aux côtés de vous Madame la Ministre et on se confie tous les deux à Monsieur le Président de l’Assemblé Nationale pour qu’avant le 31 décembre 2017, nous puissions avoir définitivement une loi contre les violences faites aux femmes ».
Et sur les antennes de TV5, il a précisé que : « je n’ai pas mission aujourd’hui à rester en dehors du concert des nations pour prendre une loi adaptée dans ce domaine-là aujourd’hui. J’ai pris des engagements forts, je me suis engagé à avoir une loi effectivement mise en œuvre par les procureurs, par les tribunaux et de sorte que le corps de la femme et l’esprit de la femme soient totalement protégés ».
Face à la sortie musclée du Président du HCIM, au Palais de la Culture le 26 février 2017 contre cette sortie médiatique du Ministre de la justice, Me Mamadou Konaté s’est dégonflé jusqu’à aller diffusé un communiqué pour nier le fait qu’il qu’il n’a pris aucun engagement visant à faire adopter une loi interdisant l’excision au Mali. Ce rétropédalage du Gouvernement n’est pas le premier du genre.
Nous nous rappelons que le 21 décembre 2015, à 48 heures de la tenue du Maouloud, un conseil de Ministre extraordinaire s’est tenu à Koulouba, pour décréter l’Etat d’urgence qui interdisait les rassemblements. Face à la vive réaction des religieux contre ce décret, les visant particulièrement, des Ministres de la République se sont succédés sur le plateau de l’ORTM pour donner une autre définition à l’Etat d’urgence.
Quatrièmement le Chérif Ousmane Haïdara, dans sa conférence de presse relative au Maouloud dont la célébration a failli être empêchée, a dit ceci : «Partout où IBK passe, ne dit-il pas qu’il doit son élection aux musulmans ? Comment alors pourrait-il ignorer ceux qui l’ont élu ? »
‘’Si les autorités ne font pas attention, les musulmans prendront le pouvoir. Nous ferons en sorte que nul ne devienne Président de la République s’il n’est pas issu du rang de l’imama ! Je jure au nom d’Allah que nous le ferons si les autorités ne font pas attention ! Pour qu’on n’en arrive pas là, respectons-nous mutuellement’’.
C’est pour cela que certains hommes politiques faisant allusion à cette déclaration et aux nombreuses visites actuellement en cours dans les villes et les cercles de l’intérieur du pays par le groupement des leaders et guides spirituels du Mali pensent que la campagne de soutien d’un candidat à l’élection présidentielle a déjà commencé sous le prétexte de conscientiser les jeunes musulmans contre le fanatisme religieux.
Cette idée semble ne pas être fausse. Certaines sources nous révèlent qu’une tendance des religieux du Mali qui se considère comme étant la principale force ayant élu le Président IBK à Koulouba qualifie désormais et ouvertement leur acte de ‘’YABE’’ c’est-à-dire d’auto-goal, au vu du bilan de leur candidat.
Certaines sources vont jusqu’à dire que cette tendance des religieux est à sa dernière phase de sélection entre les deux futurs candidats Moussa MARA et Cheick Modibo DIARRA. Un chef d’Etat amis d’IBK a intervenu semble-t-il auprès de Ousmane Cherif Haïdara.
Est-ce cette information qui l’a poussé à démarcher le guide religieux Chérif Ousmane Madani HAÏDARA enfin de renoncer à son projet. La question reste pendante
Ce régime n’a pas encore compris que la laïcité est un comportement d’indépendance vis-à-vis de toute religion. Tous les régimes précédents depuis 1960 l’ont compris sauf IBK qui dit à qui veut l’entendre qu’il a été élu par les religieux et non les militants du RPM. Ce que le Président IBK oublie, c’est que les religieux sont issus du peuple malien, et le peuple malien se trouve sur le territoire du Mali ou cohabitent diverses religions. A vouloir confondre les responsables religieux et le peuple malien, cela amènera un jour IBK à considérer les religieux comme l’être suprême ?
Au rythme où va le phagocytage de l’Etat par la religion, il faudra de notre point de vue, un ‘’Sissi Egyptien’’ à la malienne pour recadrer le rôle de chaque composante de la nation.
B S K
Source: Le Carréfour