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Mali : l’appel à l’aide du propriétaire du Campement, l’hôtel visé par une attaque terroriste

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Hervé Depardieu a créé le Campement, où cinq personnes ont été tuées. Il veut le reconstruire et appelle à la création d’une police touristique. Le président Macron le rencontrera dimanche, en marge du sommet G5 Sahel.

C’est arrivé. Ça pouvait arriver n’importe où. Dans un pays voisin, une ville voisine ou un hôtel voisin. Mais ils ont choisi le Campement. Pourquoi ? Peut-être parce que c’est un symbole : un symbole de paix, de beauté et d’harmonie.

La mission des terroristes est de faire peur. Ils ont réussi. Leurs commanditaires sont satisfaits. Nous, nous pleurons les morts et l’anéantissement d’une aventure collective, d’amour et d’amitiés qui a commencé il y a dix ans.

Lire aussi :   Au Mali, l’« attaque djihadiste » a fait au moins cinq victimes

L’histoire démarre en 2007. Ma compagne, Mariane Montaut, et moi avons créé le Campement, animés par notre goût de l’artisanat et le plaisir de travailler au Mali. Le Campement a commencé par accueillir des touristes, voyageurs en route pour le pays dogon, ou le festival de Ségou. Certains depuis Mopti embarquaient sur des pirogues vers Djenné ou Tombouctou. Des rallyes transsahariens faisaient escale, et de paisibles retraités arrivaient en camping-car par le nouveau goudron mauritanien. Nous croisions des dizaines d’associations et d’ONG faisant une halte avant de se rendre comme chaque année, dans le village où elles menaient leur projetamical et solidaire. Nous organisions des colonies de vacances pour les scolaires de Bamako, et des festivals de musique « les 24 heures en brousse » où Bamakois et voyageurs dansaient sur la musique de Habib Koité, Kar Kar, ou de Mangala Camara…

Le Campement était un lieu de rencontres, où se mêlaient toutes les cultures, tous les âges et toutes les religions. Le Mali était perçu par ceux qui le découvraient comme le pays le plus accueillant et le plus pacifique du monde. La fréquentation touristique était en forte croissance. Cette époque fait figure de paradis perdu pour tous ceux qui l’ont connue. Pourtant, c’était il y a moins de dix ans…

Sur le site du Campement, près de Bamako au Mali, avant l’attaque du 18 juin 2017.

Puis en 2008, les prises d’otages ont commencé au Sahel. Et avec elles, les consignes de sécurité. Les zones classées rouge et orange sont devenues des « no go zones ». Les ONG ont reçu l’interdiction de s’y rendre, et les associations et touristes en ont été suffisamment dissuadés, pour disparaître totalement en quelques années du paysage malien.

Lire le reportage :   De Bamako à Tombouctou, les touristes ont déserté le Mali et les artisans attendent leur retour

Or cette présence étrangère, populaire, diverse et généreuse était essentielle : elle générait une vraie économie, un apport important après l’agriculture, et touchait toutes les couches de la population. Elle améliorait sensiblement l’éducation et la connaissance. Les rencontres, les échanges, les nombreuses amitiés et unions finissaient par créer un réel rapprochement entre nos deux mondes, le Nord et le Sud. C’était aussi la fonction du Campement et celle de nombreuses entreprises où travaillent ensemble, main dans la main, Maliens et étrangers.

Quand la guerre a commencé, on a déployé sur le terrain des soldats et des humanitaires. Toujours plus de soldats, toujours plus de forces. Pourtant la situation sécuritaire continue à se dégrader. La force G5 Sahel va-t-elle pouvoir inverser la tendance ?

Dans un combat qui est autant idéologique que militaire, tous les acteurs comptent. Or on ressent une totale déconnexion entre nous, qui sommes tout autant des cibles, et ceux qui ont mandat de maintenir la paix. Le Campement en est le symbole emblématique car les militaires des ambassades, de l’EUTM, de « Barkhane » et de la Minusma y venaient régulièrement se détendre, sans se sentir concernés par le besoin de le protéger. Ce n’était pas leur mission. Le problème est que personne d’autre n’avait les moyens de le faire…

A ceux qui ont fait allusion à l’article que j’avais publié dans le Monde Afrique en janvier, dans lequel je soulignais le tort que nous causaient les consignes de sécurité, je réponds : ce ne sont pas des consignes de sécurité dont nous avons besoin, mais des mesures de sécurité.

Lire la tribune publiée en janvier :   La vie à Bamako, au rythme des SMS d’alerte et des « conseils aux voyageurs »

Un des trois piscines du site du Campement, près de Bamako au Mali, avant l’attaque du 18 juin 2017.

A l’instar du Maroc, de la Turquie, de la Thaïlande et de beaucoup d’autres pays, je demande à ce que l’on crée au Mali une police touristique, chargée de la protection des hôtels, des lieux fréquentés, et des entreprises qui peuvent être des cibles. Et elle devra avoir les moyens humains et matériels de parer les attaques du type de celle que nous avons subie.

Le 18 juin 2017, dix ans après son ouverture, le Campement a été attaqué par des terroristes. A présent que pouvons-nous faire ? Avons-nous un avenir ? Sommes-nous toujours assez combatifs pour défendre nos idéaux ? Devons-nous partir ? Ne laisser sur place que des soldats ? Mais les soldats peuvent-ils faire un Campement ? Le Campement est-il totalement superflu dans le contexte actuel ?

Tant de questions se posent à nous aujourd’hui.

Partir ? Nous qui avons cru si longtemps à notre projet, et qui lui avons tant donné ? Que dire à notre équipe ? Que dire aux milliers de personnes qui nous encouragent à tenir ? Que dire aux familles des victimes ? Que les terroristes ont gagné ?

Rester ? Effacer l’ignominie, panser les plaies, et reconstruire notre ouvrage, oui nous pouvons le faire. A condition qu’on nous soutienne et qu’on nous protège.

C’est un appel à l’aide que nous lançons, pour le Campement, pour le Mali et pour la Paix.

Nous avons envie d’y croire : dans l’Histoire, il y a eu un autre 18-Juin, où l’on appelait tout le monde à résister : pas seulement les soldats, mais tous les citoyens et ça a marché !

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Source: Le Monde

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