Immixtion religieux sphère politique faut craindre
En ces derniers temps dans notre pays, l’on assiste à une présence accrue et active des hommes de Dieu sur la scène politique. Certes, les religieux ont une place importante quant à l’apaisement et l’instauration d’un bon climat social, mais de là à influencer les politiques ou à se faire servir par des hommes politiques, cela n’est pas sans susciter l’inquiétude, surtout si l’on sait que la religion comme la politique est architecturée sur des courants de pensée. Faut-il admettre une guerre ouverte entre ces différents courants par la faute de leurs leaders dans notre pays.
Le Mali est un pays de croyance et de foi, une nation où la population, dans sa soumission à Dieu, respecte majoritairement les hommes religieux. Islam ou christianisme, les fidèles se rangent souvent derrière les idéaux de leurs leaders. En ce sens, ils ne contredisent ou ne rejettent aucunement les choix de ces derniers. Cette disposition des choses a conféré aux religieux, respect et crainte.
A cause de Dieu et dans le souci de ne pas céder à la tentation des hommes politiques, les leaders d’opinions, les religieux se sont toujours tenus en marge de la politique sans pourtant faillir à jouer leur partition dans le développement du pays à travers un enseignement adéquat afin d’éclairer la lanterne des fidèles à la lumière des écritures saintes. Ils n’étaient question pour eux, en aucune manière d’influencer le choix de leurs fidèles, d’ exiger et/ou du moins se substituer aux politiques. La religion avait pris ses distances vis-à-vis de la politique politicienne. D’ailleurs, même à la faveur de l’avènement de la démocratie, l’on ne constata l’existence d’une moindre formation politique d’obédience religieuse. Cela en raison du fait que, durant le parti unique, l’on a eu tendance à mettre dans le même panier l’imam de la grande mosquée de Bamako avec les anciens dignitaires.
Qu’est ce qui a donc favorisé des religieux sur le paysage politique national ? Quelles pourront être les conséquences d’un excès d’implication des hommes religieux dans la sphère politique ?
De l’avis de nombreux observateurs, cela a été favorisé par ATT, qui n’est jamais arrivé à délimiter les domaines d’intervention des différentes couches de la nation. C’est pourquoi, à la faveur de la gestion concertée du pouvoir, l’on n’ arrivait plus à faire la distinction entre les acteurs de la société civile (religieux, chefs coutumiers, syndicats, associations, ONG…), ceux du monde des affaires, avec les hommes politiques. Du coup, tout le monde se considérait en premier chef dans la gestion des affaires publiques et dans les prises de position. D’où la véritable levée de boucliers des religieux contre le code de la famille. Avec la chute de ce régime et l’arrivée de la junte, l’on avait estimé que la transition allait tracer les cadres d’intervention de chaque couche. Mais cela fut impossible en raison de la situation d’occupation du territoire du pays.
Partant, à la surprise générale, les élections électorales de 2013 ont été fortement influencées par les religieux. Certaines sources indiscrètes ont révélé que des consignes de vote ont été données dans plusieurs mosquées et Eglises du Mali. D’autres précisent même un certain compromis entre certains leaders religieux et des hommes politiques.
Ainsi, au regard de la personnalité de celui qui est sorti vainqueur de ces élections l’on avait espéré un retour à la normale du paysage politique. Cela fut possible avec les militaires qui sont retournés dans leurs casernes. Mais impossible avec les religieux qui ont d’ailleurs gagné en notoriété, plus que les acteurs politiques.
Quand les religieux sont divisés entre Oui et Non !
Certains sujets récents de notre pays, notamment la révision constitutionnelle, ont entériné ce constat. Cependant, il est plausible de voir plusieurs leaders religieux se positionner dans cette bataille politique et faire des déclarations. Et même de se manifester sur les estrades des marches et meetings, de véhiculer des messages de révolte dans leurs prêches sur les ondes. Cela, en remontant l’opinion publique contre d’autres chefs religieux, qui ne seraient pas de leur camp
Certes, comme tout citoyen les leaders religieux ont le droit de donner leur avis sur la politique du pays. Mais, une influence au nom de la religion sur le choix de leurs fidèles n’est pas sans conséquence. Dans l’histoire des civilisations humaines, les expériences de gouvernance ont montré la limite et l’inefficacité d’une gestion confondue du pouvoir entre les hommes politiques et les leaders religieux[1]. D’ailleurs ce mode de gestion ne sied plus face aux exigences de gouvernance de notre ère.
L’implication des religieux dans la sphère politique, peut favoriser l’anarchie. De même, elle peut provoquer une baisse de l’estime des fidèles en leur leader.
Donc il est important aussi bien pour les leaders religieux que pour les hommes politiques de faire la part des choses. Comme le disait un prophète aux juifs: « donnez à César ce qui est César et à Dieu ce qui est à Dieu ».
Immixtion religieux sphère politique faut craindre
Par Moïse Keïta
Source: Le Sursaut