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Révision constitutionnelle au Mali : Un vent violent souffle sur notre pays !

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Le philosophe allemande Hegel disait à propos du pouvoir: «Chaque époque, chaque peuple se trouve dans des conditions particulières, forme une situation si particulière que c’est seulement en fonction de cette situation qu’il doit se décider. Dans le tumulte des événements du monde, une maxime générale est d’aussi peu de secours que de se souvenir des situations analogues qui ont pu se produire dans le passé. Car, un pâle souvenir est sans force dans la tempête qui souffle sur le présent. Il n’a aucun pouvoir sur le monde libre et vivant de l’activité.»

Pour rappel historique, les devins du Djoliba, les charlatants qui ne dorment que d’un œil, les hommes avertis de la scène politique nationale et internationale, les anges des cieux et de la terre, les politiciens se couvrant du drapeau Mali (vert, or, rouge), les sages, amis et griots et ennemis (chacun à son niveau de possibilité) n’ont pas manqué de dire à Moussa Traoré qu’un vent violent se préparait à l’horizon et qu’il pourrait emporter bien de choses.

Les Latins, au regard des positions d’entêtement ont coutume de conseiller «qui aurès audiat audiendi» (que celui qui a des oreilles pour entendre entendre). Pendant que le général promettait aux manifestants la couronne  d’enfer, le vent de la contestation l’a emporté dans le labyrinthe  de l’histoire. Le 26 mars 1991, qui a toujours raison, a eu raison du déluge de feu du général assassin.

Le deuxième événement, qui n’a pas été étalé au grand jour, c’est que selon les indiscrétions de la République, Alpha Oumar Konaré aurait voulu forcer la main au peuple malien pour lui dénicher un troisième mandat. Ayant mesuré la direction du vent, en sa qualité d’intellectuel, Alpha a laissé son projet mourir dans l’œuf. Il est parti au terme de son second mandat sans réveiller les démons de la violence. Il a fait la lecture intelligente des cours des événements.

Le troisième événement en date et qui doit servir de phare au régime Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), c’est l’entêtement du général Amadou Toumani Touré (ATT) de réaliser à tout prix son projet de Sénat et donc du bicaméralisme en République du Mali.

Et pour noyer le poisson, comme si les Maliens sont des imbéciles, ATT a voulu la tenue concomitante du référendum sur un projet de Constitution (qui n’a reçu que l’adhésion des opportunistes sans vergogne) avec le premier tour de la présidentielle.

Pendant que les apatrides battaient tambours et trompettes pour la mise en place du Sénat dont rêvait le général conteur, le feu faisait des ravages dans le septentrion de notre pays et cela à la faveur d’un vent violent qui n’a dû s’arrêter qu’en balayant de Koulouba ATT et son pouvoir.

Partout, le peuple entendait le cri de cœur et de raison de ce qu’on appelait «génération consciente» qui a bien compris l’appel de Frantz Fanon qui disait de façon solennelle: «Chaque génération, dans une relative opacité doit découvrir sa mission et la remplir ou la trahir.»

ATT a été chassé du pouvoir par un groupe de militaires patriotes ayant lu dans le cri de cœur de notre peuple qui a saigné pour l’événement de la démocratie et qui continuait à pleurer l’assassinat de bien de ses vaillants soldats sans armes pendant que les ténors du régime ATT nageaient dans le beurre et dans le miel de la trahison.

Aujourd’hui, même si l’histoire ne se répète pas, les démons de la révision constitutionnelle. Pendant que le président IBK s’attèle à organiser son référendum pour faire avaler à notre peuple travailleur la quinine amère du projet de Sénat, les diables protecteurs du Mali s’activent, s’organisent à travers tout le peuple, dans tous ses coins et recoins. Ce climat de plus en plus délétère qui se prépare mérite que les adeptes de la révision constitutionnelle lui accordent une attention responsable car il y va de notre avenir commun.

Certes, la Cour constitutionnelle a tenté de soigner la plaie sur du pus. Mais l’arbre ne saurait cacher la forêt. Cette Cour ne peut clairement s’afficher contre IBK même si elle voit le danger venir. En tout cas, les cours de Moussa Traoré et de ATT n’ont pas, en leur temps, été sensibles au cri de détresse de notre peuple.

Comme dirait l’autre, le droit est manipulable à souhait et dans tous les sens. Mais le cri de cœur du peuple reste un et indivisible : de nos jours, dire qu’on est en situation de paix, c’est vraiment tailler la réalité du terrain.

Chaque jour que Dieu fait, ce sont des Maliens qui meurent sous les balles, les explosifs, les mines des frères qui ont pris les armes contre leur peuple. Chaque jour que Dieu fait, la misère humilie les Maliennes et les Maliens sans qu’il y ait la moindre solution en vue. Pendant ce temps de galère généralisée, IBK entend mobiliser des milliards de nos francs pour un référendum dont notre peuple n’a que faire.

Partout, les marches de protestations décentralisées s’organisent aux quatre coins du Mali. Ces mobilisations, sans doute, l’expression de la détresse réelle  des Maliens. Cette détresse, que Dieu nous en garde, peut entraîner des affrontements aux conséquences imprévisibles. Il convient, une fois encore, abandonner purement et simplement cette histoire de révision constitutionnelle car le Mali est loin de recouvrer l’intégrité de son territoire et pour preuve, le président ne voyage jamais sur la région de Kidal. Comme pour dire que lorsqu’on aime tant soit peu ce pays, on doit cesser de distraire notre peuple. Notre peuple vient de loin.

Si les amis ne disent pas à IBK d’abandonner son projet qui ne passera pas ici, il vaut mieux écouter avec courage les critiques des observateurs avertis. Le bon dirigeant écoute beaucoup. Le président doit s’assurer que le vent se prépare et qu’il peut l’éviter, rien en revisitant ces propos Mme Marie Tamafo N’Kom lancés ici à Bamako à l’occasion du sommet Afrique-France de 2005.

N’Kom disait à la face des chefs d’Etat de France et d’Afrique en parlant au nom de la jeunesse africaine: «Nous ne voulons plus de déclarations et d’énièmes plans d’actions, mais plutôt des mesures politiques structurées et opérationnelles par les Etats en vue d’améliorer efficacement les conditions de vie de la jeunesse africaine. Si les politiques ne s’occupent pas de la jeunesse, le vent du changement, en contexte démocratique, conduira la jeunesse à s’occuper des politiques afin que les engagements aient un sens.»

Aujourd’hui, nous n’avons nul besoin de référendum pour fonder un Sénat budgétivore au service d’une bourgeoise nationale et contre le peuple. En conséquence, IBK doit se rassurer, qu’au-delà de la chanson de ceux qui veulent lui faire, notre peuple ne cautionne nullement son projet. Il faudrait qu’il se rassure et prenne bonne note de cette réflexion de Louis Auguste Martin: «Le silence d’un peuple n’est qu’un effet de contrainte et  non une adhésion volontaire à la servitude ; c’est, le plus souvent, le couvre-feu d’une révolte à venir.»

Nos propos ne doivent pas être interprétés comme soutien comme un soutien à ceux qui se font abusivement appeler «opposition», car pour nous, ces têtes qui unissent la scène politique nationale depuis la chute de Moussa Traoré, n’ont jamais bien servi notre peuple et ne se sauraient défendre sa cause. Ce n’est donc pas parce que «l’opposition» s’oppose à la révision constitutionnelle qu’il faut réserver des lendemains difficiles à nos masses laborieuses.

Karl Marx disait que l’épanouissement de la société doit être le gage de tous et de chacun. Lisons ces lignes: «La nature de l’homme est ainsi faite qu’il ne peut atteindre sa perfection qu’en agissant par le bien de la perfection de l’humanité ».

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Fodé KEITA

Source: Inter de Bamako

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