Libye veut tête de Saïf al-Islam
Quarante-et-un jours après la libération officielle de Saïf al-Islam Kadhafi à Zintan, le fils de l’ancien guide libyen n’est pas encore réapparu. Des spéculations sur son sort vont jusqu’à le donner pour mort. Mais la réalité est toute autre. Il ne se montre pas pour des raisons de sécurité. Plusieurs personnes et partis veulent sa tête. Ses sympathisants sont aujourd’hui convaincus que l’Otan, qui n’a pas réussi à le tuer en 2011, cherche encore à avoir sa tête.
En dépit de l’intime conviction des sympathisants de Saïf al-Islam, l’Occident ne voit pas encore en la personne du fils cadet de Mouammar Kadhafi un nouveau dirigeant pour la Libye. En tout cas pour le moment. Il reste réclamé par le Tribunal pénal international (TPI) pour des crimes de guerre qu’il aurait commis durant la révolte de 2011, mais il ne se livrera pas et ses avocats disent que son dossier manque de contenu.
Détenteurs de secrets d’Etat et possédant des dossiers sur certains dirigeants et services occidentaux, son existence embarrasse et les dossiers sensibles finiront tôt ou tard par sortir. Du coup, la tentation de réduire au silence ce potentiel héritier du pouvoir en Libye s’avère grande.
A l’intérieur de la Libye, les islamistes cherchent à l’exclure du paysage politique. Il les connait à la perfection. C’est d’ailleurs lui qui les a libérés des prisons de son père, à condition de quitter les armes. Des armes qu’ils ont reprises en 2011. Saïf al-Islam considère qu’ils l’ont trompé malgré le dialogue qu’il a instauré avec eux.
Actuellement, le conseil militaire de Zintan est fortement divisé. Al Ajmi Al Eteiri, chef de la brigade chargée de garder Saïf al-Islam, est sanctionné et sa brigade Abou Bakr Al Siddik est dissoute. Non seulement elle a libéré Saïf al-Islam mais cette katiba avait empêché son assassinat à plusieurs reprises pendant son emprisonnement.
Oussama Jouayli, à la tête du conseil militaire de la ville de Zintan et ministre de la Défense en 2011, est réputé proche du courant de l’islam politique. Il s’est opposé à la libération de Saïf al-Islam et voulait mettre la main sur lui sans jamais réussir. Jouayli est soupçonné d’être l’allié d’Ali Al Sallabi, un islamiste vivant au Qatar. Ancien prisonnier en tant qu’islamiste, il a été libéré par Saïf al-Islam lui-même. Jouayli et Sallabi cherchent à le livrer au TPI.
Le rôle flou du Qatar
Des sources libyennes bien informées ont affirmé que le Qatar, moyennant des islamistes libyens Fajr Libya, avait essayé plusieurs fois de tuer Saïf al-Islam. Son lieu de détention a été visé par l’aviation à plusieurs reprises en 2014 et 2015. Sa vie sauve, Saïf al-Islam la doit à des fuites.
Les commanditaires de l’assassinat de son père ne seront pas non plus tranquilles avec Saïf al-Islam en liberté. Les accusations se dirigent alors vers le Qatar, mais aussi vers la France qui a frappé le convoi du guide libyen. L’islam politique, il connait.
Les islamistes savent très bien qu’avec Saïf al-Islam au pouvoir ils n’auront pas la place qu’ils cherchent à avoir au sein du pouvoir en Libye. Ils militent de toutes leurs forces donc pour l’éjecter de la scène politique du pays.
La presse libyenne et des internautes évoquent des paroles qu’ils attribuent à Saïf al-Islam lors de sa libération. Il aurait dit qu’il allait assigner le Qatar devant le TPI pour avoir commandité l’assassinat de son père.
Contre tous ceux qui veulent la tête de Saïf al-Islam, pour prendre le pouvoir ou pour cacher des secrets, il y a ceux, nombreux, qui veulent le mettre à la tête du pays, et surtout les tribus, élément fondateur et influent dans la société libyenne. Ces tribus voient en Saïf al-Islam le prochain sauveur et l’unique personne capable de diriger les efforts de réconciliation dans le pays.
Libye veut tête de Saïf al-Islam
Source: RFI