La presse sportive ne bruisse plus que de cela : Paris Saint Germain FC s’apprêterait à verser 222 millions d’euros au FC Barcelone pour s’attacher les services de Neymar da Silva Santos Junior, dit Neymar Junior, dit Neymar, un attaquant brésilien de 25 ans ; dans le même temps, le Real de Madrid s’apprêterait à verser 180 millions d’euros (plus 20 millions de bonus) à l’AS Monaco pour s’attacher les services de Kylian Mbappé, un attaquant français de 18 ans et demi. Deux transferts à 200 millions dans un monde où la fourchette haute des transferts s’était « durablement » établie à 100 (Paul Pogba pour 105 milions en 2016, Gareth Bale pour 100,8 milions en 2013 et Cristiano Ronaldo pour 94 millions d’euros en 2009).
Nouveau palier dans la progression du montant des transferts
Quelle mouche a piqué les dirigeants des plus grands clubs européens pour s’engager dans une telle surenchère ? La première réponse est de remarquer que les droits de diffusion de la Premier League ayant doublé en 2017 (d’environ 1,6 à 3,2 milliards milliards d’euros, en comptabilisant les droits domestiques et étrangers), il est quasiment mécanique que le transfert d’un milieu de terrain (Paul Pogba) pour 105 millions d’euros en 2016 annonce des transferts d’attaquants à 140 ou 150 millions d’euros à partir de 2017. Le récent transfert du défenseur monégasque Benjamin Mendy pour 57,5 millions d’euros à Manchester City (nouveau record pour un défenseur) vient attester de l’existence d’un nouveau palier dans la progression continue du montant des transferts. Mais entre 150 et 200 ou même 220 millions d’euros, il existe une progression que l’augmentation des droits TV de la Premier League n’explique pas, d’autant que les deux clubs supposés accueillir les attaquants prodiges n’évoluent pas dans cette ligue arrosée par la pluie de billets déversée par les diffuseurs.
Débourser 180 millions pour un attaquant de 18 ans peut être rationnel
Dans le cas de Kylian Mbappé, il peut sembler rationnel de débourser 180 millions d’euros. Il s’agit d’un pari très risqué, mais l’âge du joueur (18 ans et demi) fait d’un tel projet une décision objectivable. Les plus gros transferts d’attaquants (Bale et Ronaldo) se sont faits alors ces derniers avaient 24 ans. Le marché semble positionner désormais la fourchette haute du transfert d’un excellent attaquant de 24 ans aux environs de 140 à 150 millions d’euros… et donc d’un attaquant prodige de 18 ans et demi à 180 millions d’euros. Une fois encore, il s’agit d’un pari très risqué : si le très jeune « prodige » connaît une méforme, se blesse ou décline de façon précoce, le montant versé semblera, rétrospectivement, totalement excessif (on ne peut s’empêcher de penser, un peu cruellement, au cas des transferts des attaquants Severino Lucas, 20 ans et Mario Héctor Turdó, 21 ans, au Stade Rennais pour 220 millions de francs en 2000 : l’échec sportif fut total).
Débourser 222 millions pour un attaquant de 25 ans paraît déraisonnable
Si un montant de 180 millions d’euros peut sembler désormais rationnel pour le transfert d’un attaquant prodige de 18 ans, les 222 millions d’euros que débourserait le Paris Saint Germain pour le transfert d’un attaquant de 25 ans, fut-il prodige et prodigieusement tatoué, laissent perplexe. Certes le Paris SG cherche, en plus d’un attaquant décisif susceptible de lui faire gagner la Ligue des Champions, une icône médiatique planétaire, le successeur de l’icône de la perfection capillaire David Beckham ou de celle la perfection abdominale (et capillaire) Cristiano Ronaldo. Mais sans même évoquer les obstacles dressés sur la route du PSG par les règles du Fair Play Financier de l’UEFA, dépenser 222 millions d’euros pour s’offrir les services d’un attaquant de 25 ans qu’il faudra payer annuellement 50 millions d’euros (pour qu’il puisse toucher 30 milliards d’euros nets) paraît déraisonnable.
La France, un nain sur la scène footballistique européenne de clubs
Une fois encore, le Paris Saint Germain FC semble courir après le temps perdu, conjurer ces singulières circonstances qui ont fait que, tandis que de grandes villes espagnoles, anglaises, italiennes, allemandes (et même néerlandaises) construisaient le palmarès du football européen, la capitale française était un nain footballistique jusque dans les années 1980, ne gagnant qu’une modeste coupe des vainqueurs de coupe (aujourd’hui disparue) en 1996, et n’émergeant qu’avec difficulté sur la scène européenne des années 2010 en dépit des liquidités abondamment déversées par des actionnaires qataris. Bien sûr, les autres grandes villes françaises ont tout autant affiché de faiblesses dans cette lutte continentale : pourquoi les meilleurs équipes françaises sur la scène européenne avant les années 1990 ont-elles émergées dans des villes moyennes (Reims, Saint-Étienne) ? Pourquoi Marseille s’est-elle brulée les ailes de manière concomitante à sa victoire en Ligue de Champions en 1993 ? Pourquoi Lyon n’a-t-elle jamais atteint la finale de ladite Ligue des Champions dans les années 2000 ? Autant de questions auxquelles il est difficile d’apporter une réponse unique. Il demeure que la stratégie que l’on prête au Paris SG en 2017 soulève une interrogation : peut-on rattraper le temps perdu en achetant un joueur pour près du double de son prix de marché ?
Neymar Mbappé sera gros transfert histoire
Source: Le Monde