Le suicide des baleines est un phénomène zoologique qui consiste pour des cétacés, baleines ou autres dauphins, à se jeter massivement sur la terre ferme, comme pour fuir un péril imminent. Alors que se retrouver sur la terre ferme est synonyme pour eux, d’une mort quasi certaine. Suicide conscient ou inconscient?
Cette question, aujourd’hui, est celle qui mérite d’être posée quand on aborde la question du comportement des professionnels vieillissants de la classe politique malienne. Depuis la chute du régime dictatorial du général Moussa Traoré, toutes tendances confondues, ils ont par leur incurie, conduit le peuple malien, majoritairement, dans un dégoût de la politique. Voilà 26 ans que les maliens sont dans les tourments et voient leurs conditions de vie, de jour en jour, se dégrader, sans que les politiciens s’aperçoivent que cela met à leur charge l’obligation de changer leur façon de faire la politique.
À l’heure où un vent de renouvellement souffle sur le monde entier et que, les peuples, fatigués de voir les mêmes têtes répéter les mêmes vieilles recettes depuis des décennies en sombrant au passage dans la corruption et les compromissions diverses, balaient tout avec leur bulletin de vote, la classe politique malienne, elle, à un an d’une échéance électorale, a déjà tout abandonné pour ne penser qu’à cette échéance.
Nos professionnels irremplaçables de la politique, tout en clamant que 2018 est arrivé, ont cependant la tête et les pieds en 2018. Que proposent-ils pour amener le peuple malien à rêver de nouveau de lendemains meilleurs? Pas grand-chose. Ils veulent reconquérir le pouvoir d’État ou mettre tout en œuvre, au prix de mille et un reniements, pour conserver le pouvoir. Et, dans cette optique, exit ceux qui ont moins de 60 ans, ils ne sont pas suffisamment « mûrs » pour prétendre exercer le pouvoir suprême. Dans le même temps, ils sont fascinés par le nouveau président français qui est, pour la plupart d’entre eux, un « petit fils ».
Ils sont si obsédés par le pouvoir qu’ils ne s’aperçoivent pas de la défiance des maliens, vis-à-vis, de la classe politique et du désintérêt croissant de la vie publique. Ils ne s’aperçoivent pas que pour freiner cette tendance, il faut du résultat, de l’écoute, de la proximité, un contact permanent avec le peuple, l’instauration d’un environnement démocratique moins mortifère. Non, nos professionnels de la politique n’ont rien compris, ils ne veulent pas changer de logiciel, ils ne voient rien venir, ils continuent de s’installer dans les coups bas, les règlements de compte, les actions de dévitalisation du processus de construction de la nation entamée par le premier président; bref, tout ce que les maliens ne veulent plus, c’est ce que lui propose la classe politique. Où en est-on avec la réconciliation? Elle a commencé sur un malentendu. Au début, il s’agissait de faire la réconciliation sur le modèle ivoirien, avec une commission vérité réconciliation. Puis, l’on a dit que c’est plutôt la justice qui devrait conduire à la réconciliation. Sauf que de justice, elle n’a concerné qu’un seul camp. Alors qu’une commission d’enquête mise en place par le président lui-même a conclu au fait que les deux camps se sont livrés à des centaines d’exécutions sommaires pendant la crise du nord. Rien n’a été fait réellement pour obtenir une vraie réconciliation.
À un an de la fin du premier mandat du président IBK, à l’URD, tendance dure, l’on est dans la logique, en attendant l’arrivée de Soumi, d’un nouvel affrontement. Au RPM, la logique est que la perte du pouvoir signifierait la fin du monde et l’exil. Voilà où on en est, après plus de 4 ans de crise.
Bravo à notre classe politique qui, inexorablement, court devant l’apocalypse. Comme des baleines fuyant le fond de la mer.
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Jean Pierre James
Source: Nouveau Réveil