Le samedi 12 août 2017, la Plateforme des femmes des partis politiques de l’opposition a organisé une conférence débat à la Maison de la Presse de Bamako pour informer ses militantes et l’opinion publique nationale sur le bien-fondé de leur refus au projet de révision de la constitution du 25 février 1992. Ladite conférence débat était animée par Me Boubacar Karamoko Coulibaly de l’URD et du syndicaliste Djimbé Kanté, en présence du vice-président de l’URD, Iba N’Diaye, de la représentante de la présidente de la Plateforme des femmes des partis politiques de l’opposition, Mme Dandara Touré et d’autres personnalités. Au cours de cette conférence débat, les responsables de la Plateforme des femmes des partis politiques de l’opposition ont invité le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) à faire preuve « d’humilité en retirant purement et simplement ce projet inopportun, tout en engageant dans des programmes utiles et performants, les fonds prévus pour le référendum et le fonctionnement du Sénat». Ce projet de révision constitutionnelle initié par le président IBK est une stratégie de conservation du pouvoir, indique-t-on ?
Les femmes leaders de l’opposition politique et bien d’autres responsables ont pris part à cette conférence débat. On notait la présence de l’épouse du chef de file de l’opposition Malienne, Mme Cissé Aïssata Traoré, de la vice-présidente de l’Urd, Mme Coulibaly Kadiatou Samaké, de l’honorable Mamadou Hawa Gassama Diaby, de Nouhoum Togo du Pdes et bien d’autres.
Prenant la parole en premier, le vice-président de l’URD s’est réjoui de cette initiative prise par les femmes de l’opposition. A l’en croire, une activité de ce genre sera bientôt organisée par les jeunes. Par ailleurs, il a fait savoir que l’opposition Républicaine et démocratique est indépendante. « Personne ne pouvait s’imaginer que l’opposition, les jeunes et la société civile pouvaient se rassembler pour défendre une cause », a-t-il dit.
Dans ses mots de bienvenue, la représentante de la présidente de la Plateforme des femmes des partis politiques de l’opposition, Mme Dandara Touré du Pdes a fait savoir que ce projet de révision constitutionnelle qui divise les Maliens est une des conséquences de l’amateurisme avec lequel le Mali est géré depuis quatre ans. Avant d’ajouter que ce projet est aussi unilatéral et exclusif.
‘’Le centre du Mali est devenu une véritable zone d’insécurité ‘’
« Si en 1992, il était apparu la nécessité de réviser la constitution, les raisons étaient justifiées il fallait mettre fin au monopartisme et instaurer un multipartisme intégral pour un Mali démocratique. Le projet actuel n’aurait pas dû être initié parce qu’il contredit l’article 118 de la constitution qui interdît toute révision tant que l’intégrité du territoire national est menacée. Alors qu’à ce jour, plusieurs régions dont Kidal au nord, échappent au contrôle de l’autorité de l’Etat. Pire, le centre du Mali est devenu une véritable zone d’insécurité, faisant fuir les populations dont les femmes et les enfants », a-t-elle dit.
En outre, ce projet de révision renforce les pouvoirs du président de la République en faisant de lui, un monarque. « Ceci s’explique par le fait que dans une démocratie, il doit exister l’équilibre des pouvoirs. Or, avec ce projet auquel, nous nous opposons en tant que femmes, tous les autres pouvoirs se trouvent piétinés par la seule Institution du Président », a-t-elle souligné.
Mme Dandara Touré a rappelé que c’est le président de la République qui nomme le Président de la Cour constitutionnelle, le tiers des Sénateurs. « La création d’un Sénat au Mali, pendant que nos voisins du Sénégal et de la Mauritanie s’en débarrassent pour des raisons financières, est inopportune. Sinon, comment comprendre que le Mali seul, à la différence de ses voisins, soit engagé dans cette aventure fâcheuse pendant que ses voisins se débarrassent du Sénat pour son caractère budgétivore ? Nous pensons aussi que les sommes colossales qui pourraient être destinées au fonctionnement du Sénat, devraient servir à financer des activités de développement pour les femmes et les jeunes qui semblent être ignorés par le Gouvernement en place », a –t-elle haussé le ton.
A ses dires, le renforcement excessif du pouvoir du Président de la République menace des libertés chèrement acquises. Pour preuve, dit-elle, la presse dont le rôle est essentiel dans la vie de la nation se retrouve muselée, ce qui constitue un recul et une réelle dérive. « Nous disons Non à la codification des dérives. Aujourd’hui, le rôle que la presse joue dans notre pays est essentiel. Elle doit être préservée en tant que gage de notre démocratie. Nous disons également qu’il est incohérent de vouloir adapter notre constitution à un accord largement contesté. Enfin, pour l’intérêt supérieur de la nation, nous faisons appel au Président de la République et à son Gouvernement afin que ledit projet soit purement et simplement retiré. Nous les appelons surtout, à faire preuve d’humilité en retirant purement et simplement ce projet inopportun, tout en engageant les fonds prévus pour le référendum et le fonctionnement du Sénat dans des programmes utiles et performants pour nous les Femmes et nos enfants », a conclu Mme Dandara Touré.
A la suite de Mme Dandara Touré, le premier conférencier, Me Boubacar Karamoko Coulibaly a fait savoir que cette révision constitutionnelle viole l’article 118 de la constitution du 25 février 1992. « Nous ne sommes pas contre la révision constitutionnelle mais nous pensons que le moment n’est pas opportun. Ce projet de révision constitutionnelle initié par le président IBK est une stratégie de conservation du pouvoir », a-t-il dit. Quant au deuxième conférencier, le syndicaliste Djimbé Kanté, il dira qu’il y a la trahison dans cette révision constitutionnelle. « La révision constitutionnelle divise aujourd’hui les Maliens. Or, le Président de la République est le garant de la cohésion sociale », a-t-il souligné. Il a rappelé l’ultimatum du 15 août prochain lancé au président de la République pour le retrait du texte. Selon lui, il y a des priorités au Mali que de réviser la constitution du 25 février 1992.
En réponse aux questions des uns et des autres, l’honorable Mamadou Hawa Gassama Diaby a fait savoir que l’Assemblée nationale du Mali n’a jamais été saisie ni par rapport au problème du nord ni par rapport à l’accord pour la paix et la réconciliation nationale issue du processus d’Alger.
En outre, la question de l’homosexualité fut longuement débattue par les conférenciers. Selon Me Boubacar Karamoko Coulibaly, la question de l’homosexualité n’est pas expressément écrite dans le projet de révision constitutionnelle mais la crainte doit être de mise, car, le Mali a ratifié la charte africaine des droits de l’homme. En ce sens, il dira qu’en 2014, une Résolution a été prise à Nairobi (Kenya) et dont le préambule de cette révision constitutionnelle y fait référence.
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Aguibou Sogodogo
Source: Le Républicain