Le report des scrutins prévus pour le 17 décembre a été décidé, le dimanche dernier, par le conseil de ministres. Point de surprise ! Des acteurs politiques et observateurs avisés l’avaient annoncé. Et comme l’on pouvait s’y attendre, le régime a sorti des arguments fallacieux pour motiver sa décision. Histoire de voiler son incapacité à pacifier le pays pour y organiser des élections. En réalité, l’organisation de ces scrutins était compromise d’avance par les réalités du terrain, notamment l’insécurité grandissante et l’absence de l’Etat dans plusieurs localités des régions du centre et du nord. Mais c’est surtout le niet catégorique des rebelles de Kidal qui a amené le pouvoir à revoir son calendrier. Aussi, ce report démontre le pilotage à vue instauré en mode gestion sous l’actuel régime.
Les Maliens devront attendre avril 2018 pour choisir les conseillers des collectivités territoriales au niveau des cercles et des régions. Le gouvernement en a décidé ainsi. Non pas de plein gré, mais sous la pression, notamment des groupes armés de la CMA et une frange importante de la classe politique.
La CMA avait, depuis 28 octobre dernier, donné le ton. Dans un communiqué, elle a clairement appelé au report : «…nous constatons sur le terrain que le gouvernement persiste dans la logique unilatérale d’organiser les élections communales et régionales en convoquant le collège électoral sans discussions préalables avec les parties signataires. Au regard de cette situation, la CMA s’oppose à l’organisation des élections dans les régions de l’Azawad sans une prise en compte des aspects politiques inscrits dans l’Accord pour la paix et la réconciliation, notamment l’opérationnalisation des Autorités Intérimaires, l’organisation du retour des réfugiés/déplacés, la révision des listes électorales, la relecture des lois portant libre administration et codes des Collectivités Territoriales et bien d’autres aspects y afférents. La CMA demande au gouvernement du Mali de surseoir à la tenue de ces élections jusqu’à la mise en place des conditions optimales, idoines et transparentes pour la tenue de ce rendez-vous décisif…»
De sources crédibles, c’est cette déclaration des rebelles qui a amené le gouvernement à renoncer à ces élections. Les désirs de ce mouvement sont des ordres à Koulouba. Et nul n’est surpris du fait qu’IBK et son gouvernement aient encore courbé l’échine devant la CMA. Aujourd’hui, au sein de l’opinion nationale, ce report est surtout perçu comme une nouvelle victoire des responsables des rebelles de Kidal sur l’Etat.
Le prétexte…
Un report de la date « s’imposait », s’est expliqué Tiéman Hubert Coulibaly, ministre de l’Administration territoriale. Il avait, la veille, rencontré les principaux acteurs du processus électoral pour en recueillir les préoccupations avant de proposer à l’Etat un report du scrutin au mois d’avril 2018. Le ministre justifie ce report par des insuffisances dans l’application de la loi électorale. Aussi, il évoque des problèmes d’insécurité, de l’absence de commissions de centralisation pour le référendum, la non fixation d’un délai pour proclamer les résultats provisoires du référendum. Ainsi, ce report permettrait de corriger ces insuffisances.
En réalité, la seule justification qui tient la route est la situation sécuritaire qui ne permet la tenue d’élections dans les régions du centre et du nord. Ces régions échappent pratiquement à tout contrôle de l’Etat central.
Il faut préciser que la CMA n’était pas seule à émettre des réserves sur ces élections, mais son entrée dans la « contestation » avait annoncé la capitulation du gouvernement qui était resté sourd aux dénonciations des partis politiques et d’éminents constitutionnalistes. Néanmoins, certains partis de l’opposition saluent cette décision, mais pensent que le gouvernement devrait profiter de ce temps pour réunir les conditions idoines pour la tenue des élections libres et transparentes sur l’ensemble du territoire. Pour eux, il est nécessaire de rétablir la sécurité et ramener l’administration et les forces de l’ordre dans le Nord et le Centre du pays avant toute échéance.
Par ce report, le régime d’IBK envoie l’ultime signal à l’opinion nationale et internationale de son incapacité à pacifier le pays pour y organiser des élections dont le format et la date sont déterminés par lui- même. Ce report, selon le parti Parena, est un gâchis politique et financier qui démontre à suffisance l’autisme du régime, le pilotage à vue et l’incapacité des autorités à bien gouverner le pays.
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Sambou Diarra
Source: L’Aube