Le président russe Vladimir Poutine a annoncé mercredi au terme d’une journée médiatique bien rodée qu’il se présenterait pour un quatrième mandat à l’élection de mars 2018, ce qui en cas de victoire le placerait à la tête du pays jusqu’en 2024.
Cette annonce très attendue met fin à des mois de suspense et de tergiversations du Kremlin sur les intentions de M. Poutine, aux commandes du pays depuis plus de 17 ans et donc en voie de briguer un nouveau mandat de six ans.
“J’annonce ma candidature au poste de président de la Russie”, a déclaré M. Poutine lors d’une rencontre avec les ouvriers d’une usine à Nijni Novgorod, sur la Volga, retransmise en direct à la télévision.
“La Russie va continuer d’aller de l’avant. Et dans ce mouvement en avant, personne ne l’arrêtera jamais”, a-t-il lancé devant un public conquis, dans un contexte de confrontation avec l’Occident entre crise ukrainienne, conflit en Syrie et scandale de dopage institutionnalisé des sportifs russes.
Vladimir Poutine, 65 ans, avait entretenu le suspense quelques heures auparavant lors d’un Forum de bénévoles à Moscou.
“Je suis toujours avec vous”, avait d’abord énigmatiquement répondu le président à un bénévole qui l’interrogeait pour savoir s’il “serait toujours” avec les Russes l’année prochaine.
“La motivation doit venir uniquement de la volonté de rendre la vie meilleure dans ce pays, de le rendre plus puissant, mieux protégé”, avait poursuivi M. Poutine.
– L’épine Navalny –
“Mais on ne peut y arriver qu’à une seule condition: si les gens vous font confiance et vous soutiennent”, avait-il ajouté, avant de demander à la foule si elle le soutiendrait. Celle-ci avait répondu aux cris de “Oui!”, sous une pluie d’applaudissements.
Le principal opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, qui entend défier M. Poutine lors du scrutin dans quatre mois, a réagi sur Twitter en ironisant sur la longévité politique du président russe: “A mon avis, c’est beaucoup. Je propose de nous y opposer”.
Charismatique blogueur anticorruption aux accents parfois nationalistes, M. Navalny a organisé deux manifestations antigouvernementales d’ampleur en mars et juin et écopé de nombreuses condamnations en justice et de courtes périodes de détention.
Son avenir politique reste toutefois flou, sa participation au scrutin ayant été exclue par la Commission électorale en raison d’une condamnation pour détournement de fonds qu’il dénonce comme montée de toutes pièces pour l’éloigner de la course.
Le principal parti pro-Kremlin, Russie Unie, a d’ores et déjà annoncé sans surprise qu’il ferait campagne pour Vladimir Poutine, qui a également reçu le soutien des principales figures politiques du pays, dont celui du Premier ministre Dmitri Medvedev, lui-même président de 2008 à 2012.
“Si le peuple juge qu’il est possible et nécessaire que le président actuel présente à nouveau sa candidature, alors qu’il en soit ainsi”, a pour sa part réagi Mikhaïl Gorbatchev, le dernier dirigeant de l’URSS.
Vladimir Poutine devrait affronter à la présidentielle les traditionnels candidats du Parti communiste et des nationalistes du LDPR, ainsi que la vedette de télévision proche de l’opposition Ksenia Sobtchak, qui espère réunir les Russes mécontents de la situation dans le pays.
– 53% d’intentions de votes –
Arrivé au pouvoir en 2000 dans un pays au pouvoir instable et à l’économie chancelante, M. Poutine est loué par nombre de ses concitoyens pour avoir été l’homme de la stabilité et d’une nouvelle prospérité, grâce à une manne pétrolière conséquente pendant des années, tandis que ses détracteurs lui reprochent un net recul des droits de l’Homme et des libertés.
La campagne pour la présidentielle doit être lancée après que la date de l’élection aura été officiellement décidée. Conformément à la loi russe, cette date devrait être annoncée entre le 7 et le 17 décembre.
Jouissant de 53% d’intentions de votes selon un sondage publié en novembre par le centre indépendant Levada, Vladimir Poutine est de loin le favori de la course présidentielle. S’il remporte le scrutin, cela ferait de lui le chef d’Etat ayant été le plus longtemps à la tête de la Russie depuis Joseph Staline.
Les experts estiment que le principal objectif du Kremlin sera désormais de faire en sorte que la participation au scrutin soit assez élevée, et le nombre de fraudes assez faible, pour éviter des manifestations d’ampleur comme en 2011-2012 et les critiques des Occidentaux et de l’opposition.
“La véritable intrigue n’est pas le résultat de l’élection mais ce qu’il se passera après 2024”, explique le politologue russe Konstantin Kalatchev, estimant que Vladimir Poutine ne briguera pas de mandat supplémentaire dans le futur en cas de victoire en mars 2018.
Vladimir Poutine candidat 4ème mandat 2018
(©AFP / 06 décembre 2017 17h16)