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Comment est Trump au pouvoir ? “Multipliez par 50 ce que vous avez entendu”

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Dans un livre à paraître, l’ex “chief of staff” de Trump livre un portrait apocalyptique de ce qu’est devenu la Maison-Blanche.

 Viré de la Maison-Blanche, où il occupait le poste clé de secrétaire général (“chief of staff”), après seulement six mois, en juillet 2017, Reince Priebus a alimenté un chapitre consacré à l’ère Trump dans le livre “The Gatekeepers: How the White House Chiefs of Staff Define Every Presidency” (“Les gardiens : comment les secrétaires généraux de la Maison-Blanche définissent chaque présidence”).

Ce livre de 400 pages, qui sort le 6 mars, est signé du journaliste Chris Whipple, auteur de livres et documentaires, et producteur d’émissions télé d’information.

"The Gatekeepers", un livre sur la Maison-Blanche et ses secrétaires généraux

Il a interviewé les 17 anciens secrétaires généraux vivants et deux ex-présidents, et son ouvrage porte entre autres sur les années Reagan, Bush père et fils, Clinton ou encore Obama, mais c’est évidemment la partie sur l’actuel président des Etats-Unis qui attire particulièrement l’attention.

Reince Priebus a raconté à Chris Whipple ses six mois en plein chaos – tout en affirmant son affection pour Trump, qu’il dit encore soutenir (“Je l’aime toujours, je veux qu’il réussisse”). “Vanity Fair” en a publiédes extraits, et l’image qui en ressort est consternante.

“Multipliez tout ce que vous avez entendu par 50”

Après “Fire and Fury” de Michael Wolff, abondant en détails ravageurs sur la désorganisation trumpienne, ce nouveau livre ne va pas améliorer l’image de la Maison-Blanche.

Priebus est dépeint comme un homme qui a dû avaler couleuvre après couleuvre, plier sous une rafale d’humiliations – Trump passait ses nerfs sur lui, et l’avait affublé du sobriquet de “Reincy” – et qui n’a jamais été capable de s’opposer à Trump.

Les extraits publiés par “Vanity Fair” racontent que des anciens secrétaires généraux ont rencontré Priebus un mois avant l’entrée en fonctions de Trump. Ils furent 11, démocrates et républicains, lors d’une réunion à la Maison-Blanche. Tous lui souhaitèrent bonne chance, mais Jack Watson, qui travailla pour Jimmy Carter, commente : “Je ne crois pas qu’il y ait eu un seul secrétaire général dans la pièce qui ait pensé qu’il pourrait accomplir sa tâche, avec Trump comme président.”

Obama en personne déclara à Priebus à son arrivée aux manettes qu’un “chief of staff” doit savoir déplaire et dire des choses désagréables à son patron, quand c’est nécessaire. Mais Reince Priebus souffrait de deux handicaps vis-à-vis de Trump : les deux hommes se connaissaient peu, et Priebus, ancien membre du comité national du parti républicain, était un de ces représentants de l’establishment que Trump avait vilipendé tout au long de la campagne.

En outre, lorsque ont été publiés les propos obscènes de Trump (le fameux “les attraper par la chatte”) captés des années plus tôt, le candidat avait fait un tour de table de son équipe. Et Priebus avait répondu que s’il maintenait sa candidature, il perdrait largement – alors que Bannon avait estimé que Trump gagnerait sans problème. Trump lui en aurait voulu depuis lors, selon Chris Whipple.

Les ennuis commencent dès l’entrée en fonction de Trump : le milliardaire est furieux quand il voit que le “Washington Post” compare en photos la foule à sa cérémonie d’investiture, réduite par rapport à celle de Barack Obama, et il entre en transe. “Appelez le service des parcs, dites-lui de trouver une image et de faire une recherche immédiatement.”

Priebus essaie sans succès de calmer Trump, en lui rappelant que Washington et la région votent très majoritairement démocrate, mais rien à faire. Le secrétaire général estime alors que le sujet ne vaut pas la peine d’entrer en conflit avec le président – “Qui a besoin d’une controverse sur l’investiture ?”, jette-t-il l’éponge.

Mensonge initial sur la foule du 20 janvier

Le porte-parole Sean Spicer va affirmer que la foule a été la plus énorme jamais vue pour une telle cérémonie (additionnant, rapporte Priebus, les audiences télé, Internet, radio et sur place) ; carbonisant ainsi dès le début sa crédibilité et se faisant moquer, tout comme la conseillère Kellyanne Conway et ses “faits alternatifs”.

L’ex-secrétaire général décrit ainsi le président :

Trump “est un homme qui n’a peur de rien ni de personne, et il n’y a absolument rien qui l’intimide. Et c’est très rare en politique. La plupart des gens dans la politique ont une sorte de dépendance à l’approbation.D’accord, maintenant le président Trump l’a aussi, mais il est prêt à affronter une tempête après l’autre pour arriver à un résultat final que la plupart des gens ne veulent pas affronter. La folie, le drame ou la difficulté, ça lui est égal tant qu’un résultat final est en vue. Il le supportera.”

Le livre insiste sur l’impréparation totale de la nouvelle équipe. Celle d’Obama a rédigé pendant des mois de volumineux dossiers de transmission, “sur des sujets allant de l’Iran à Cuba en passant par le changement climatique.

Chaque équipe arrivante avait dans le passé étudié de tels dossiers avec soin. Mais alors que l’investiture approchait, se rappelle McDonough (de l’équipe Obama), ce dernier s’aperçut que les dossiers n’avaient même pas été ouverts. ‘Aucun des papiers, des mémos qui avaient été préparés pour l’équipe de transition, n’ont été utilisés. Pas lus. Pas regardés.”

Andrew Card (qui fut secrétaire général de George W. Bush) a regardé la controverse sur la foule le jour de l’investiture avec un sentiment de désastre :

“Je me suis dit ‘ils ne savent pas ce qu’ils font. Ils n’ont pas de méthode, pas de discipline.”

Arrêter Twitter ? Pas moyen

Priebus, qui après son limogeage est revenu à la tête de son ancien cabinet d’avocats, a dit à Whipple être souvent appelé au téléphone par Trump, et discuter avec lui de sujets variés.

Mais il raconte au journaliste, à l’automne 2017, que les descriptions lues partout sur une Maison-Blanche en pleine pagaille et rongée par les conflits internes, sont plus que vraies : “Prenez tout ce que vous avez entendu et multipliez-le par 50”, affirme-t-il au journaliste – se confiant en demandant sans cesse que tout soit “off the record” (officieux), avant d’accepter plus tard d’être cité.

Priebus décrit les efforts, vains, de l’entourage du nouveau président, dont Melania Trump et lui-même, pour lui faire arrêter ses messages sur Twitter – mais l’ex-secrétaire général pense après coup que Trump a eu raison contre tous les experts.

La décision en mai 2017 de chasser James Comey de la tête du FBI a scindé l’équipe Trump – Priebus était contre, mais Jared Kushner, le gendre de Trump, était pour, et il l’a emporté. Les commentaires très critiques de la presse après ce limogeage ont mis en rage Bannon, qui selon Priebus a hurlé après Kushner, l’accusant d’avoir poussé à une décision qui mettait en danger la présidence de Trump.

Insulté par le nouveau porte-parole

Un peu plus tard, nouvelle crise à la Maison-Blanche : cette fois c’est la menace de démission du procureur général Jeff Sessions qui risque d’aggraver les choses dans l’enquête sur d’éventuels liens de la campagne Trump avec la Russie. Auparavant, Sessions avait eu droit à une engueulade en règle dans le bureau ovale, Trump le traitant d’idiot et lui reprochant de s’être désisté de l’enquête “russe”. Après de longs échanges avec Bannon et Priebus, Sessions envoie une lettre de démission pendant la nuit, puis finit par accepter de rester.

Priebus aura bu la coupe jusqu’à la lie ; en juillet est nommé un nouveau porte-parole, l’hallucinant Anthony Scaramucci. Ce dernier lance insultes et accusations dans un échange avec le “New Yorker” et traite carrément le “chief of staff” de “putain de schizophrène paranoïaque”.

Scaramucci accuse Priebus d’être l’auteur des fuites sur ses finances – une information en fait en accès public – et Trump ne dit pas un mot pour défendre son secrétaire général. Priebus démissionne finalement… et Scaramucci est ensuite viré après seulement dix jours en fonction…

Comment Trump pouvoir Multipliez par 50 ce que vous avez entendu

T. N.

Source: L’Obs

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