Le 20 novembre 1979, juste après la prière de fajr, un jeune homme nommé Muhammad Abdallah, accompagné de quelques fidèles dont le nombre est estimé entre 200 à 500, ont attaqué la Grande mosquée sacrée de la Mecque.
Il y a une signification religieuse particulière attachée à la date de l’attaque. Les musulmans croient généralement qu’il y aura une seconde venue de Jésus et certains croient qu’il y aura un faux Jésus précédant le vrai Jésus.
D’autres croient qu’un homme appelé le « Mahdi » et descendant du Prophète, apparaîtra comme un précurseur de ces événements. Il viendra purifier le monde musulman de ses impuretés apportées par les Occidentaux. Bien que cela ne soit pas spécifiquement énoncé dans le Coran, la croyance traditionnelle veut qu’un Mahdi apparaisse le premier jour d’un nouveau siècle à la Mecque et qu’il y reste pendant un certain temps et disparaisse ensuite pour réapparaître à Médine.
Muhammad Abdallah était bien connu des autorités saoudiennes. Il avait 26 ans et avait une apparence et une personnalité imposantes. Il a fréquenté une école religieuse de la charia à Riyad pendant environ trois ans sans terminer le cursus. Il a été emprisonné pendant environ quatre mois en raison d’activités hostiles au gouvernement. Une fois libéré, il retourna dans sa tribu d’origine.
A la prise de la Grande mosquée, Abdallah annonça à l’imam qu’il était le Mahdi. Ses disciples ont alors pris contrôle des lieux en plaçant deux gardes à chacune des 26 portes de la Grande mosquée. Auparavant, ils avaient pu apporter des camions chargés d’armes et de dattes pour se nourrir. Durant le siège, des sentinelles armées avaient été envoyées sur le toit de la mosquée et dans les minarets. Un ministre saoudien expliqua que la coutume musulmane le jour de l’an était d’aller à la prière tôt le matin, puis de rendre visite aux personnes âgées de la famille. Il y avait donc plusieurs milliers de personnes dans la mosquée. Alors, certains fidèles ont discuté avec Muhammad et ses disciples. Ils lui ont demandé si cette action était inspirée par les Iraniens. Muhammad a nié toute participation iranienne. Un de ses disciples ajouta que les Iraniens n’étaient pas de vrais musulmans et n’avaient rien à voir avec cette action. Selon le ministre, ces réponses étaient sincères.
Ceux qui étaient détenus n’étaient pas menacés ou maltraités, mais le problème était le manque d’installations sanitaires qui, selon un membre du gouvernement, n’existaient pas dans la mosquée. Parmi les intrus, il y avait un pakistanais. Les autres seraient des membres de la tribu des Outayba. Selon les personnes présentes, quelques non-Saoudiens étaient impliqués mais la grande majorité appartenait à la tribu des Outayba.
L’armée saoudienne a mis du temps à se rendre compte de ce qui se passait. La réponse lente était due au fait que la Kaaba à la Grande Mosquée est un lieu sacré pour les musulmans ; il est interdit d’y porter des armes. Donc, les soldats étaient réticents de même pointer les armes vers le bâtiment, à moins d’une fatwa des leaders religieux. Il a fallu du temps à la famille royale pour avoir cette fatwa. Il a fallu environ deux semaines aux forces spéciales saoudiennes et à l’armée régulière pour s’emparer de la Grande Mosquée et du labyrinthe qui se trouvait en dessous.
Il y a eu des centaines de victimes, peut-être même des milliers. Une grande partie de la structure a été gravement endommagée. Le gouvernement saoudien a dû utiliser des chars et de l’artillerie lourde. À la fin, ils ont dû faire appel aux forces spéciales françaises qui ont pompé du gaz empoisonné dans le sous-sol de la Grande Mosquée, tuant les derniers rebelles.
Oussama Ben Laden a été choqué par cet événement. Il a dit qu’il a été choqué de voir les chars rouler dans le sanctuaires le plus sacré de l’Islam, et le gouvernement saoudien se comporter criminellement en profanant le sanctuaire au lieu de simplement affamer les rebelles. C’est à ce moment que sa loyauté envers le régime saoudien, qui a tant fait pour son père et sa famille, a commencé à s’effriter. Sa radicalisation venait de commencer. Quelques années plus tard, le monde saura de quoi il est capable.
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Amadou O. Wane
Collaborateur externe,
Floride, Etats-Unis
Source: Inf@sept