Accueil A la Une de l'Actu Quand de hautes personnalités politiques ont leurs diverses raisons de démissionner…

Quand de hautes personnalités politiques ont leurs diverses raisons de démissionner…

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17 janvier 1968 : Démission collective des députés à l’Assemblée nationale.

Les 75 élus de la 2e législature de la Première République appartenant à l’unique “Liste nationale” de l’US-RDA siégeant au Parlement depuis législatives du 12 avril 1964, mettent un terme par anticipation à leurs fonctions parlementaires à quelques mois de la fin de leur mandat. Leur départ forcé s’inscrit dans la foulée des mesures imposées par la “Révolution active”enclenchée début 1966 au Mali suite au coup d’Etat militaire qui a renversé le président Kwame Nkrumah au Ghana. Analysant les événements survenus à Accra tout en y tirant des enseignements, les autorités maliennes sous la conduite du président Modibo Kéita mettent en branle des initiatives radicales visant à défendre et à renforcer les acquis du jeune Etat indépendant à orientation socialiste tout en cherchant à écarter les faiblesses vécues dans la gestion du parti-Etat et des affaires publiques.

Parmi les mesures prises, la création le 1er mars 1966 d’un Comité national de défense de la révolution (CNDR) doté de “pleins pouvoirs” parallèlement au bureau politique national (BPN) du parti. Comprenant sept (7) membres triés sur le volet et présidé par le chef de l’Etat lui-même Modibo Kéïta en sa qualité de secrétaire général de l’US-RDA et président de la République, le CNDR va finir par s’arroger “tous les pouvoirs et prérogatives” du même BPN, qui sera dissout le 22 août 1967.

C’est dans ce contexte que, cinq mois plus tard, le 16 janvier 1968, l’Assemblée Nationale se saborde lors de sa toute première session annuelle. Dans une longue intervention, est présentée une “motion préjudicielle déposée au nom des organisations populaires, travailleurs et Commission nationale de la jeunesse de l’Union soudanaise RDA” par le porte-parole du Groupe parlementaire US-RDA, Mamadou Diarrah , député élu à Koulikoro et commissaire politique du parti. Après avoir réaffirmé le soutien du parti au camarade Modibo Kéita considéré comme “le seul guide incontesté et incontestable de notre peuple” et “l’incarnation la plus achevée de notre option socialiste”, l’élu de Koulikoro s’adresse à ses camarades parlementaires : “[…] Dans plusieurs circonscriptions administratives, des députés étaient décriés dénoncés, houspillés et même rejetés par les larges masses populaires. A tort ou à raison, le fait est là, indiscutable et indiscuté […] Il faut dire aujourd’hui, solennellement, que nous ne pouvons plus, de manière irréfutable, nous considérer comme les authentiques représentants du peuple et délibérer en ses lieu et place. Nous ne le pouvons pas et nous ne devons pas le faire. Une seule attitude nous reste : rester et rendre l’initiative aux masses”.  Cette motion est soutenue notamment par d’autres députés intervenants dont Samba Soumaré, Mamadou Sarr et Mamadou Famady Sissoko (par ailleurs secrétaire général de la centrale syndicale UNTM). La présentation de la “motion préjudicielle” est suivie par le dépôt d’une proposition de loi introduite par le député Gabou Diawara qui s’exprime au nom de la Jeunesse du parti en délivrant une déclaration dans laquelle “les députés de l’Assemblée nationale […] : convaincus du fait que la véritable souveraineté appartient au peuple et au peuple seul ; sûrs que la maturité et la sagesse séculaires de notre peuple l’ont toujours conduit sur le chemin de la grandeurs et de la dignité : entendent rendre l’initiative au peuple et retourner aux masses”.

Le texte proposé est ensuite adopté à l’unanimité des députés. Cette loi qui marque officiellement la “mise en vacance de l’Assemblée nationale” à compter du 17 janvier 1968, dispose que “les députés décident solennellement de se démettre de leur mandat de député à l’Assemblée nationale et de donner tous les pouvoirs à M. Modibo Kéita, président du CNDR et chef de l’Etat ; d’instituer par ordonnance de la permanence du pouvoir législatif en attendant la mise en place de nouvelles Institutions parlementaires ; de procéder à la rénovation de toutes les institutions de l’Etat”.

L’adoption du texte est immédiatement commentée par le président de l’Assemblée nationale, Mahamane Alassane Haïdara, qui indique à ses collègues cette brève déclaration “Mes chers camarades, à partir de demain, vous cessez d’être députés. Nous cessons d’être députés”. Intervenant en dernière position, le président Modibo Kéita (également député) se réjouit de cette démission collective des élus parlementaires en déclarant que : “Je prends acte de la loi qu’à l’unanimité, l’Assemblée nationale vient de voter. Le CNDR sera incessamment saisi. Et comme toujours, la direction nationale du parti fera au chef de l’Etat les propositions pour que puisse être assurée d’une manière permanente la représentation populaire”.

A la suite de cette “mise en vacance” parlementaire, le gouvernement gère les affaires en légiférant par ordonnance. Ainsi, le 22 janvier 1968, le président Modibo Kéita signe l’ordonnance n°1/PG-RM portant création d’une Délégation législative (DL). Composée de 28 membres désignés, cette Délégation législative “assume les attributions dévolues à l’Assemblée nationale par la Constitution”. La Délégation législative est présidée par Mahamane Alassane Haïdara, reconduit dans ses hautes fonctions parlementaires.

Août 1980 : Démission du  ministre des Sports, des Arts et de la Culture, le Pr. Alpha Oumar Konaré.

Nommé le 4 mai 1978  ministre de la Jeunesse, des Sports, des Arts et de la Culture, le professeur en archéologie garde ce portefeuille sans la “Jeunesse” lors du remaniement du 28 juin 1979. Quelques mois plus tard, il va quitter le gouvernement dans un contexte sociopolitique très tendu entre les tenants du pouvoir et une frange importante de la jeunesse. Cette tension se caractérise notamment par des mouvements de grèves des syndicats d’enseignants et d’étudiants.

Ces derniers subissent des répressions policières suite à des manifestations de casses dans les rues de Bamako. Les autorités décident de la fermeture des classes dans les ordres d’enseignement secondaire et supérieur, décrète la dissolution de l’Union nationale des élèves et étudiants du Mali (UNEEM) dont de nombreux responsables, traqués, entrent en clandestinité. C’est dans ce climat de surchauffe sociopolitique que surviennent l’arrestation et l’assassinat, le 17 mars 1980, du secrétaire général de l’Union, Abdoul Karim Camara dit Cabral.

C’est un événement tragique pour nombre de jeunes Maliens et de nombreux camarades et amis politiques du défunt leader estudiantin. L’acte secoue le sommet de l’Etat et l’une des conséquences, apprend-on, est la volonté de démission du ministre Alpha Oumar Konaré qui avait connu l’étudiant en philosophie Cabral à l’EN Sup de Bamako. Sa brutale élimination physique par des sbires d’un régime auquel participe l’enseignant Konaré constitue un coup dur pour le ministre partageant la même cause militante que l’étudiant syndicaliste. D’où la démission du ministre Alpha Oumar Konaré.

Mais, à l’époque des faits, aucune communication officielle ni explication publique de l’intéressé n’a rendu publique cette démission. Les adversaires politiques de Pr. Konaré insistent sur le fait que la date exacte de sa démission n’est pas précisée dans un document écrit qui pourrait exactement témoigner de l’événement. Ceux-qui contestent la démission formelle du ministre Alpha Oumar Konaré tiennent à rappeler son implication personnelle dans l’organisation de la 6e édition de la Biennale artistique et culturelle de la jeunesse malienne, déroulée en juillet 1980.

A ce propos, les partisans de Pr. Konaré citent son discours mémorable (“Où va le Mali ?”, l’a-t-on présenté ainsi à l’époque) qu’il a prononcé à la cérémonie d’ouverture de ladite Biennale, le 5 juillet 1980 à Bamako. Presqu’un mois plus tard, les observateurs ont pu constater que lors du remaniement gouvernemental du 2 août 1980, le Pr. Ntji Idriss Mariko est devenu le nouveau ministre des  Sports, des Arts et de la Culture.

Il a fallu une douzaine d’années pour que ce sujet redevienne un thème d’actualité lors des débats électoraux de 1992. Suite à la chute du régime UDPM le 26 mars 1991, les premières élections pluralistes mettent aux prises plusieurs forces politiques dont l’Adéma/PASJ présidé par le Pr Alpha Oumar Konaré. Celui-ci est considéré par plus d’un observateur comme le plus grand favori des candidats à l’élection présidentielle. Pour mieux valoriser son parcours politique, ses partisans et supporters mettent l’accent notamment sur sa “démission symbolique et courageuse” du gouvernement de Moussa Traoré. A contrario, les adversaires de l’Adéma et les contempteurs du Pr. Konaré choisissent de remettre en cause de l’effectivité d’une telle “démission non fondée sur aucun document écrit”. Par voie de presse, l’exposé des arguments opposés tourne à une vive polémique autour de la démission en question mais aussi de la responsabilité morale (solidarité gouvernementale oblige) du ministre Alpha Oumar Konaré. Face aux tournures prises par les débats focalisés sur son passage ministériel, le Pr. Konaré est finalement monté au créneau pour placer les faits politiques dans leur contexte historique. Lors du meeting de lancement de sa campagne électorale, le 5 mars 1992 au Palais de la culture de Bamako, le candidat de l’Adéma/PASJ évoque le sujet polémique en précisant ceci : “Quand en mai 1978, nous avons décidé d’entrer au gouvernement, nous l’avons fait en toute connaissance de cause. Quand en juillet 1979, nous avons volontairement décidé à quitter le gouvernement, avec l’accord de mes camarades, résistant à diverses pressions et interventions, il ne s’agissait pour moi que d’un acte militant et non d’une auréole personnelle. L’estime que Karim, c’est Abdoul Karim, Cabral avait pour moi est réelle et était connue […] Son assassinat est intervenu à une époque où formellement mon départ du gouvernement avait été accepté par le président du gouvernement [Moussa Traoré] à qui, en la circonstance, j’avais demandé la démission de l’ensemble du gouvernement […] Camarades, je voudrais dire très clairement à tous : j’assume mon itinéraire de militant et nos illusions de l’époque des lendemains qui chantent, je l’assume. […] J’assume ma carrière de ministre dans le gouvernement de Moussa Traoré de février 1978 à mai 1980. Je l’assume. J’assume la part des actes de tous mes camarades et de tous mes collaborateurs qui ont travaillé sous mon autorité. Je les assume pleinement et entièrement”.

Toutes ces explications sont publiées dans un livre-entretien réalisé par Bernard Cattanéo auquel s’est confié celui qui deviendra le premier président de la IIIe République du Mali (juin 1992-juin 2002). En réponse à une question insistante de son intervieweur sur sa démission, l’ancien ministre des Sports, des Arts et de la Culture persiste et signe : “Je suis parti à ma demande, au bout de deux ans et j’avais même souhaité partir un peu plus tôt, dès 1979. Le moment était venu de me retirer au risque d’être broyé par l’appareil […] Partir du gouvernement n’était pas un constat d’échec. J’étais tout simplement parvenu à la conclusion que mon rôle  était dans un autre domaine, pas au sein d’une équipe où je pouvais me retrouver très vitre seul […]”.

 

7 mai 1981 : Démission du Colonel Youssouf Traoré, secrétaire à l’information et à la culture du bureau exécutif central (BEC, organe dirigeant) de l’UDPM, le parti unique constitutionnel.

Membre du CMLN regroupant les jeunes officiers tombeurs du président Modibo Kéita, il fut ministre de l’Information (septembre 1969-septembre 1975) puis ministre de l’Education nationale (janvier 1978-juin 1979). Après avoir pris une part active dans la création de l’UDPM et dans la neutralisation en février-mars 1978 du trio Kissima Doukara-Karim Dembélé-Tiécoro Bagayoko, considérés comme des “faucons” du CMLN, le colonel Youssouf Traoré faisait partie des rares membres du CMLN à intégrer BEC de l’UDPM au terme du congrès constitutif du des 28-31 mars 1979. Mais, avec la persistance de la crise scolaire (marquée surtout par l’assassinat le 17 mars 1980 du leader estudiantin Abdoul Karim Camara dit Cabral), de graves divergences vont l’opposer au président Moussa Traoré, soutenu par d’autres barons de son carré des fidèles. Ceux-ci trouvaient le colonel Traoré “démagogue” et proche des responsables des syndicats d’enseignants et d’étudiants (UNEEM).

Les divergences entre les deux amis, voire complices du CMLN (Moussa et Youssouf) se transforment en hostilités dont le rapport des forces était plutôt favorables au chef de l’Etat. Conscient de cette donne, le colonel Youssouf Traoré prend les devants et quitte incognito le pays. Dans la correspondance qu’il a adressée au président Moussa Traoré, secrétaire général de l’UDPM, le démissionnaire indique qu’il renonce à ses fonctions politiques au sein parti, notamment membre du conseil national (direction décisionnaire) et du BEC dont il était le secrétaire à l’information et à la culture. Il y siégeait au titre des officiers auxquels était réservé un quota pour l’Armée dans les instances et organes de décisions de l’UDPM.

Dans sa lettre de démission, le colonel Youssouf Traoré écrit que pour lui “le 30 avril 1980 marque la fin d’une longue et pénible étape dans sa vie de soldat, dans sa vie politique au service d’une amitié et du peuple malien […] Le 30 avril 80, le BEC en violation de la procédure arrêtée pour toutes les commissions [de travail auprès de lui] a osé examiner un projet de document élaboré par la sous-commission culturelle, coupant ainsi toute possibilité à la commission de l’info et de la culture de statuer sur l’étude effectuée sur la situation scolaire au Mali. Le vice de procédure m’a paru donc suffisamment grave pour être condamné énergiquement […] Au cours des débats, je n’ai point été surpris de voir les membres du BEC s’acharner comme des fauves contre la commission et son président, allant jusqu’à qualifier ce dernier de dissident, d’antiparti. […] Monsieur le président, au sein du BEC, je ne me suis jamais fait d’illusions. J’étais parfaitement conscient que de mon statut particulier de membre toléré et non accepté […] Compte tenu de tout ce qui précède et dans l’intérêt supérieur de la nation et du peuple militant, Monsieur le secrétaire général, par la présente, j’ai l’honneur de vous rendre ma double démission du conseil national et du BEC de l’UDPM pour compter du 1er mai 1981”.

Au moment (7 mai) où le parti prenait acte de sa démission, le partant s’était déjà exilé en Haute-Volta (actuel Burkina) via Lomé au Togo. Le 8 mai 1981, par décret présidentiel n°123/PG-RM, le chef de l’Etat, le général Moussa Traoré, par ailleurs ministre de la Défense nationale, “met d’office à la retraite” le colonel Youssouf Traoré.  Ce dernier, de son côté, se retrouve dans la situation de réfugié politique. Pendant une décennie (1981-1991), il ne ménage aucun effort pour combattre en dehors du pays le régime de Moussa Traoré.

A la chute de celui-ci le 26 mars 1991, il rentre au bercail quelques semaines et crée son parti, l’Union des forces démocratiques et du progrès. Le président-fondateur de l’UFDP parvient à se faire élire député dans sa ville de San durant la législature 1992-1997. Présentement, et ce depuis son retour au bercail en 1991, le colonel à la retraite Youssouf Traoré (83 ans) vit chez lui à Djicoroni-Para non loin de la résidence de son frère d’armes le général Moussa Traoré. Deux voisins très bien appréciés dans leur voisinage et très respectés dans leur dévotion par les notabilités musulmanes du quartier.

 

24 mars 1991 : Démission du secrétaire politique de l’UDPM,

Djibril Diallo, n°2 du parti et du régime.

Une démission formulée dans une très longue lettre adressée au président Moussa Traoré, secrétaire général du parti. Occasionnée par la répression sanglante des 48 h précédentes des manifestations exigeant le multipartisme, cette démission est l’ultime décision pour son auteur de rappeler sa position favorable à l’ouverture politique contrairement au courant de refus adoubé par le général-président.

Dans sa correspondance, le démissionnaire retrace les péripéties des débats menés sur la situation devenue progressivement préoccupante. D’où sa volonté de prendre sa responsabilité face à l’histoire. Extraits : “Monsieur le secrétaire général, à la suite du débat sur l’exercice de la démocratie au sein du parti en conférence de cadres au stade Omnisports le 31 mars 1990, débat que vous m’avez demandé d’organiser et de présider à mon retour de Cuba, je vous ai transmis un message très clair, exprimé par l’opposition, ce jour-là, avec une intensité dramatique, mais aussi et surtout avec une sérénité et un effort de responsabilité qui forçaient le respect, à savoir ‘procéder à l’ouverture démocratique par l’adoption du multipartisme et de l’alternance afin d’éviter à notre pays des violences futures que tout le monde regretterait’. Ce jour-là, pour ne pas trahir ma mission au service du parti, mais aussi pour avoir été convaincu définitivement de la nécessité de la transition démocratique que nous avions déjà reconnu au sein de la commission politique en analysant depuis octobre 1989 les conséquences des événements survenus dans les pays de l’Est corrélativement à la pérestroïka, je me suis refugié derrière la formule de la démocratie conforme à nos valeurs sociales et à nos traditions, formule qui en tout état de cause ne pouvait être contestée avec des arguments convaincants d’aucun côté. A la suite de votre décision de poursuivre les débats depuis la base, j’avais compris que le message avait été bien perçu par vous. […]

Après l’exploitation des débats à la base sur l’exercice de la démocratie (tout court cette fois-ci), survinrent la 9e session ordinaire du conseil national, puis la 7e session extraordinaire, à la veille de laquelle, lors des deux réunions du bureau exécutif central et de plusieurs audiences particulières, j’ai prôné que nous acceptions tout de suite l’ouverture démocratique à travers le pluralisme des partis afin non seulement de rendre l’UDPM plus compétitive, mais aussi et surtout de mieux exploiter toutes les forces vives pour le mieux-être du peuple malien tout en évitant qu’il y ait plus tard une quête démocratique violente. Mieux, à la veille de la 7e session, le mardi 21 août 1990, je vous ai remis une note faisant une analyse comparative du statut quo et de l’ouverture au multipartisme en concluant en faveur de celui-ci au conseil, lors des journées des 23 et 24 août, j’ai défendu la même position […] allant jusqu’à dire qu’aujourd’hui le système de parti unique avait atteint son «seuil d’incompétence», selon le fameux théorème du sociologue Peter. Ceci me valut les injures et les calomnies les plus insidieuses de collègues en mal d’activisme, qui cachaient mal leu myopie intellectuelle et politique en se trompant d’ennemi. […] Devant votre manque de rappel à l’ordre de ces camarades […] et devant vos propres propos en mon endroit, j’ai rendu ma démission le vendredi 24 août 1990. Les circonstances ne m’ont pas permis d’y mettre les formes statutaires. De plus, des interventions ayant fait appel à mon sens du devoir devant une situation politique critique qu’il fallait gérer ensemble […] J’ai oublié de vous dire qu’en mon for intérieur, c’est aussi par honneur que je n’ai pas voulu formaliser ma décision de démission, ne voulant pas abandonner notre bateau en difficulté, étant conforme en cela à notre «fonds culturel» malien.

Mais, Monsieur le secrétaire général, que vaut aujourd’hui l’honneur devant le sang coulé, les patrimoines publics et privés détruits et toutes les déchirures que seule l’Histoire pourra recoudre ? Que valent aujourd’hui et que vaudront demain nos signatures et nos paraphes si nos mains sont maculées de sang ? Vous avez toujours dit que le secrétaire politique est la conscience du parti. Cependant, force est de constater que la tête du parti n’a pas toujours su écouter sa conscience. […] Vous comprendrez qu’il n’y a aucune arrière-pensée derrière la décision que je m’en vais vous notifier, monsieur le secrétaire général. Conformément à l’article 40, paragraphe 3, des statuts de l’UDPM, j’ai l’honneur de vous rendre ma démission de secrétaire politique pour les motifs énumérés ci-dessus et pour être d’accord avec ma conscience d’homme, de militant et de citoyen.

Aujourd’hui, je pense que les conséquences d’une telle décision sont positives pour tout notre pays. Quant à ma propre personne, j’ai mesuré les risques et je suis prêt à les assumer. Pour l’opinion nationale, je dirai que mon geste n’est aucunement un acte de dédouanement d’aucune sorte, étant prêt à assumer à tout moment devant le peuple malien souverain et devant l’Histoire, toute responsabilité qui me serait imputable […] J’ai une pensée profonde pour toutes les victimes de ces folles journées et je prie le Tout-Puissant Allah, dans toute Sa Miséricorde et à la grâce de son Grand Prophète Mohamed (Paix et salut sur lui) afin que leur âme repose dans la paix éternelle […] Amen !”

Malgré cette démission présentée à moins de 48 h de la fin du régime UDPM, Djibril Diallo est mis aux arrêts, dans la matinée du 26 mars 1991, à l’instar d’autres dignitaires déchus suite à la chute du président Moussa Traoré. Détenu, il sera jugé lors du procès “Crimes de sang” (novembre 1992-février 1993). Tout comme les autres dirigeants civils, il est acquitté par la Cour d’assises. Relaxé, il se retire de la scène politique tout en restant dans les rôles honorifiques à lui attribués par les jeunes qui ont créé en 1995 le Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR). Jusqu’à nos jours, Djibril Diallo fait partie des présidents d’honneur de ce parti qui réclame l’héritage de l’UDPM. C’est dans ce cadre qu’il a dirigé les activités d’un groupe d’auteurs (des anciens dignitaires de la IIe République) qui ont rédigé et édité en 2016 un ouvrage collectif sur le bilan du président Moussa Traoré (1968-1991).

Celui qui était considéré par les observateurs comme l”idéologue du parti” a, en effet, l’autorité morale indéniable pour défendre un tel bilan. Il y a sa part non négligeable, surtout de juin 1979 à mars 1991. Ingénieur des ponts & chaussés issu de l’Ecole centrale de Paris, Djibril Diallo fut notamment directeur général de la Régie du chemin de fer du Mali (1969-1979) et nommé ministre des Travaux publics et du Tourisme dans le 1er gouvernement de la IIe République, formé le 28 juin 1979.

Il devient ensuite ministre des Transports et de Travaux publics (le 2 août 1980) avant d’entamer sa longue présence au BEC en y occupant  le très stratégique poste de secrétaire politique à partir du 1er Congrès ordinaire de février 1982 et devient du coup le n°3 du parti et de l’Etat. Il reste à ce poste jusqu’à la fin du régime le 26 mars 1991. Entre-temps, sa position s’est renforcée à plus d’un titre au sein de l’appareil d’Etat. Après deux années de repli ministériel au profit du parti, il retourne au gouvernement en qualité de ministre d’Etat chargé du Développement industriel et du Tourisme (31 décembre 1984-6 juin 1986). Désormais, il se consacre entièrement aux activités du parti dont il est aussi le secrétaire général de la section III de Bamako (1982-1991).

Entre 1986 et 1987, le secrétaire politique Djibril Diallo est désigné président de la commission ad hoc chargée de la relecture des textes fondamentaux du parti (statuts et règlement intérieur) ainsi que de l’élaboration d’une “Charte d’orientation nationale et de conduite de la vie publique”. Des documents adoptés par le congrès extraordinaire de mars 1987.

Pour leur mise en application immédiate, M. Diallo est nommé à la présidence de la commission spéciale chargée d’assister le secrétaire Général de l’UDPM jusqu’au 3e congrès ordinaire du parti. Lequel (le dernier) se tient fin mars 1988 sur la base de la refonte des textes fondateurs du parti.

Au nombre des innovations fonctionnelles, la suppression au niveau du BEC du poste du secrétaire à l’information dont les tâches sont désormais confiées au secrétaire Politique, Djibril Diallo reconduit. Déjà incontournable n°3 du parti-Etat, le secrétaire politique Djibril Diallo franchit un palier supérieur par la survenue d’une circonstance malheureuse : le décès du secrétaire général adjoint Boubacar Diallo en février 1989. Depuis, le tout-puissant secrétaire politique du BEC, ainsi propulsé n°2 du régime, joue le rôle d’un pilier central du parti dont il est de plus en plus considéré comme son “idéologue”.

De cette période jusqu’à la fin de la IIe République, Djibril Diallo se trouve au cœur des événements tragiquement marqués par la chute du président Moussa Traoré, le 26 mars 1991. Les vingt-sept années écoulées, l’ex-secrétaire politique de l’UDPM les a vécues à travers détention, procès en assises, liberté recouvrées, réflexions et rédaction d’un ouvrage-bilan.

Présentement, à 80 ans, Djibril Diallo apparait tel un retraité relativement bien occupé par des activités champêtres dont la production et la commercialisation des produits laitiers.

24 août 1987 : Démission du ministre des Finances et du Commerce Soumana Sako.

Dans un style de rédaction aussi simple que brève, la lettre de démission adressée au chef de l’Etat et président du gouvernement, la correspondance, via le Premier ministre, est écrite le 23 août ainsi libellée : “Monsieur le président, je vous présente ma démission du gouvernement de la République du Mali avec effet au lundi 24 août 1987”. Avec le déplacement du président Moussa Traoré en Algérie, le Premier ministre (qui n’était pas un véritable chef de gouvernement) le Pr. Mamadou Dembélé est informé de la démarche en cours. Cette démission de celui (Zou ou Zorro, ses surnoms) qui dirigeait l’Hôtel des finances depuis seulement six petits mois (20 février) est une réaction immédiate de son auteur à la remise en cause de sa décision de faire arraisonner un vol de la compagnie belge Sabena fortement suspectée de transporter frauduleusement une quantité d’or du Mali vers l’extérieur.

Les faits se déroulent à l’Aéroport de Bamako et les tractations se passent entre le ministère des Finances, la Primature et la Cité ministérielle où résident plusieurs dignitaires militaires du régime. La démission de M. Sako est finalement acceptée par le président Moussa Traoré le 29 août avec la nomination du nouveau ministre des Finances et du Commerce, Mohammed Alhousseyni Touré, précédemment ministre/secrétaire général de la présidence de la République.

Aucune information ne filtre des événements à cause de la mainmise totale sur les médias d’Etat. Il a fallu trois (3) semaines pour qu’une large partie de l’opinion malienne soit informée grâce à un article de Jeune Afrique, paru le 14 septembre 1987. On y apprend que tout s’est déroulé en moins d’une semaine. L’hebdomadaire panafricain rapporte ainsi : “Samedi 22 août 1987 : un douanier prévient le ministre (Zou). Un avion de la compagnie belge Sabena doit embarquer 150 kg d’or alors que la douane n’a enregistré qu’une déclaration pour 50 kg. Soumana […] se rend personnellement à l’aéroport de Bamako-Sénou […] L’exportateur suspect, parent proche du président Moussa Traoré, averti lui aussi par des amis (douaniers), a renoncé au dernier moment à faire embarquer sa cargaison. Zou […] fait refuser l’autorisation de vol à l’équipage de la Sabena tant qu’il n’aura pas la certitude de s’être trompé. Dimanche 23 août : dans la matinée, il en discute dans la cour de son ministère avec le représentant bamakois de Sabena. Zou ne sait pas que le ministre de la Défense nationale, ami intime du président Moussa Traoré, le général Sékou Ly a fermement demandé au Premier ministre de laisser partir l’avion, lequel partit. Lundi 24 août : M. Sako présente sa démission au Premier ministre lequel réserve sa réponse en attendant le retour du président Moussa alors en Algérie en visite privée. Mardi 25 août : le général Sékou Ly réunit les officiers supérieurs et fait adopter une motion de l’armée, demandant au président Moussa d’accepter la démission de son ministre des Finances. Jeudi 27 août : le président Moussa Traoré rentre à Bamako. Il accepte la démission de Zou, remplacé deux jours plus tard par Mohamed Alhousseyni Touré […]”.

Au fil des ans, d’autres détails de cette démission spectaculaire sont connus grâce aux explications de M. Sako lui-même à travers interviews et autres contributions publiées par les journaux qui, après la chute du régime de Moussa Traoré, sont revenus fréquemment sur cette “Affaire Sabena” autour d’un trafic d’or équivalant à 45 milliards de F CFA de manque à gagner pour le Trésor public.

Au plan politique, cette démission a été un fait révélateur dans la carrière de Soumana Sako. Fin 1996, des positionnements pour l’élection présidentielle d’avril 1997 commencent. Face au cas de Soumana Sako dont la candidature est préparée par des amis organisés dans une association politique, un observateur averti (in L’Indépendant du 14 novembre 1996) de la classe politique malienne rappelle son haut fait d’armes d’il y a une décennie : “Devenu ministre des Finances à une période (1987) où l’économie malienne avait totalement sombré, il fera la preuve de sa compétence en réussissant à payer régulièrement leurs salaires à des fonctionnaires qui en étaient sevrés depuis de longs mois. Cette prouesse lui conférera le sobriquet flatteur de «Monsieur Salaires». Avec l’affaire de l’or de Sabena, il gagne son brevet de patriote qui ne transige pas avec l’intérêt supérieur de la nation et devient, pour ses compatriotes défavorisés, ‘Zorro le Justicier’. Ce parcours le singularisera parmi les cadres maliens et déterminera le choix porté sur lui par le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré [ATT] pour l’épauler durant la transition” en sa qualité de Premier ministre d’avril 1991 à juin 1992.

20 août 1991 : Démission de Me Demba Diallo, membre du Comité de transition

pour le salut du peuple (CTSP), organe dirigeant du Mali.

Le célèbre avocat et figure emblématique de la lutte ayant abouti à la chute du président Moussa Traoré quitte le sommet de l’Etat pour pouvoir présenter sa candidature à la prochaine de 1992. Une semaine après son départ in extremis, l’avocat démissionnaire est remplacé au CTSP, le 26 août, par une autre avocate, Me Ndouré M’Bam Diarra. Cette démission de Me Diallo est une exigence recommandée par la Conférence nationale dont les travaux se sont déroulés à Bamako du 29 juillet au 12 août 1991. Ces assises républicaines nationales ont tenu à fixer des interdictions préventives concernant les membres des organes de la transition (CTSP et gouvernement, appelés à organiser ladite présidentielle) de quitter leurs fonctions dans un délai précis et prescrit.

L’exigence de cette démission (exceptionnelle ciblant lesdites personnalités) est formalisée dans le nouveau code électoral. Ainsi, l’article 178 de l’ordonnance n°91-074/P-CTSP du 10 octobre 1991, préconise : “Tout membre du CTSP qui voudrait faire acte de candidature aux fonctions de président de la République devra démissionner dudit organe, 15 jours après l’adoption du présent projet d’ordonnance par la Conférence nationale”. A moins de deux jours avant l’expiration de ce délai (22 août), le célèbre avocat démissionne du CTSP. Il l’avait intégré dès sa formation le 31 mars 1991, soit 4 jours après la chute du parti unique. Il y avait été proposé sur la liste de la Coordination des associations et organisations démocratiques (appelée Mouvement démocratique) dont était membre fondatrice l’Association malienne pour la défense des droits de l’Homme (AMDH), présidée par Me Demba Diallo. Dès avril 1991, le CTSP s’engage pour l’accomplissement de l’une de ses missions essentielles ; à savoir : l’organisation de la Conférence nationale (CN) devant adopter les avant-projets de textes fondateurs de la IIIe République. C’est dans ce but qu’est mise en place une commission politique et institutionnelle avec comme président Me Demba Diallo. Ladite commission a ainsi élaboré lesdits avant-projets de textes, examinés, amendés et adoptés par la CN.  C’est cette grande rencontre qui a envisagé dans le futur code électoral l’exigence pour tout membre du CTSP de se démettre s’il veut être candidat aux élections générales de 1992. Exigence respectée par Me Demba Diallo.  S’alignant ainsi au 1er tour du scrutin présidentiel du 12 avril 1992, l’un des héros incontestables de la chute du président Moussa Traoré  n’aura pas (à la surprise générale des Maliens) les gains électoraux escomptés par lui.

Le président-fondateur de l’AMDH est alors devenu le porte-étendard de son parti, l’UFD, il n’obtient que 2,04 % des suffrages exprimés en se classant lamentablement dernier dernière les sept (7) autres candidats en lice. Cette contre-performance électorale n’est ni révélatrice de la dimension panafricaniste de son parcours de militant (collaborateur des présidents Modibo Kéita, Sékou Touré de la Guinée et Lumumba du Congo-Kinshasa), ni juste à la vitalité de son engagement politique cinquantenaire, ni conforme à la hauteur de sa popularité révolutionnaire de janvier-mars 1991.

6 janvier 1992 : Démission du CTSP d’Oumar Mariko, secrétaire général de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM).

Le charismatique leader scolaire et estudiantin représente son mouvement au sein de l’organe suprême de la transition, conformément aux dispositions de l’Acte fondamental n°1 qui organise les pouvoirs publics au Mali suite à la chute du régime de parti unique sous le président Moussa Traoré. L’organe suprême de l’Etat (avec des pouvoirs législatifs) est en place par les militaires putschistes réunis au sein du Conseil de réconciliation nationale (commandés par le lieutenant-colonel ATT) et la Coordination du Mouvement démocratique sous la houlette du dirigeant syndicaliste Bakary Karembé. Militaires et civils forment le 31 mars 1991 le Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP). Parmi les délégués des organisations démocratiques, celui de l’AEEM représentée par son secrétaire général Oumar Mariko, étudiant en médecine. Ce dernier décide de quitter le CTSP suite au 1er congrès ordinaire de son association (30 décembre 1991-4 janvier 1992). A l’issue d’une semaine des débats houleux dans une atmosphère très tendue, ce congrès a élu un nouveau bureau de coordination dirigé par Issa Mariko (étudiant à l’ENA) en remplacement d’Oumar Mariko. Celui-ci avait confié à des journalistes qui l’ont rencontré à la veille de ces assises de l’AEEM, qu’il va quitter la direction du mouvement après ce congrès. Le leader historique de l’AEEM entend terminer rapidement ses études en médecine pour ne pas être un étudiant carriériste à l’Ecole nationale de médecine et de pharmacie où il est inscrit depuis une dizaine d’années.

Aux termes de ce 1er congrès ordinaire de l’AEEM, Oumar Mariko est désigné président d’honneur à vie du mouvement étudiant et, pour le reste de la période de la transition, il a mandat de rester membre du CTSP au nom de l’AEEM. Désignation refusée par l’intéressé qui a désapprouvé la nouvelle ligne de conduite d’un mouvement désormais miné par des querelles intestines de ses dirigeants qui “se sont laissés manipulés par des barons politiciens et des dirigeants de la transition afin d’écarter Oumar Mariko de l’AEEM”. Après la démission d’Oumar Mariko, le CTSP est resté sans aucun représentant dûment désigné par l’AEEM.

10 juin 1992 : Premier conseil des ministres du 1er gouvernement de la IIIe République

Inhabituellement aux usages protocolaires, le principe de la démission est publiquement évoqué par le Pr. Alpha Oumar Konaré, le nouveau Président de la République, issu des premières élections démocratie pluraliste au Mali. Les ministres ont la libre attitude de démissionner s’ils en éprouvent la nécessité selon leur conscience citoyenne. C’est l’une des exhortations à mots couverts faites par le président Konaré dans le discours qu’il a prononcé à l’ouverture des travaux du 1er conseil des ministres du nouveau gouvernement (le tout premier de la IIIe République) formé 24 h auparavant.

A cette séance inaugurale de la réunion hebdomadaire des ministres, le chef de l’Etat a tenu à fixer le cap de la réussite pour l’équipe conduite par le Premier ministre Younoussi Touré. Il a indiqué à l’assistance que “l’efficacité et la responsabilité sont une exigence pour opérer les changements indispensables à une profonde mutation de la société [malienne]. Les ministres doivent s’engager à tout mettre en œuvre dans le cadre de l’amélioration des conditions de vie des populations, de la consolidation de l’Etat de droit, de la défense des valeurs démocratiques, du renforcement de la crédibilité de l’Etat afin que les citoyens aient confiance aux Institutions”.

S’adressant directement au chef et aux membres du gouvernement, le président Konaré leur a clairement indiqué  que “c’est en hommes libres que vous siégez autour de cette table, que tout un chacun agira en fonction de sa conscience, bien entendu en tenant compte de l’intérêt supérieur du peuple. Si jamais, cela n’était pas le cas malgré tout, alors, libérez-vous de vos fonctions. Il est important que ce soit en homme libre que chacun puisse siéger ici. C’est aussi votre droit. Que Dieu vous inspire, que l’intérêt de notre peuple prime dans toutes vos actions”.

 

8 juillet 1992 : Démission du ministre des Mines, des Industries et de l’Energie, Abdoulaye Camara.

Un mois après sa nomination au gouvernement, le ministre Camara est remplacé par Kadari Bamba par le décret n°92-023/P-RM du 8 juillet 1992 dont l’article 1er met fin aux fonctions de M. Abdoulaye Camara. Ce dernier a dû quitter lesdites fonctions, selon de nombreux observateurs, suite à l’éclatement de l’affaire dite du Trésor relative à une extraordinaire évasion fiscale opérée à la fin de la période de la transition (mai-juin 1992). Estimée à près de 6 milliards de F CFA de manque à gagner pour l’Etat, cette affaire impliquerait plusieurs opérateurs économiques. Au nombre desquels, l’on a cité Abdoulaye Camara, réputé, dans les milieux des affaires, comme l’un des principaux bailleurs de fonds de la campagne de l’Adéma/PASJ aux élections générales de 1992.

Dans le gouvernement formé le 9 juin 1992, Abdoulaye Camara occupe le ministère des Mines, des Industries et de l’Energie. Une promotion pour cet ingénieur des constructions civiles (âgé alors de 54 ans) qui a notamment exercé les fonctions de directeur de l’habitat, de l’urbanisme et de la construction (1969-1974) puis celles de directeur général de la Société nationale des travaux publics (Sonetra, 1974-1979). Cette riche carrière administrative est quelque peu éclipsée par cette présence seulement de 30 jours en fonctions ministérielles. Il fait de l’éphémère ministre Abdoulaye Camara le détenteur d’un très rare record de bref exercice gouvernemental au Mali.

9 avril 1993 : Démission du PM Younoussi Touré.

Nommé le 8 juin 1992, il est seulement en  poste il y a dix (10) mois. Il se voit dans l’obligation de jeter l’éponge suite à d’interminables violentes manifestations scolaires et estudiantines dans les rues de Bamako le 5 avril. Ce jour-là, des manifestants ont mis à sac plusieurs édifices publics dont les locaux des ministères de l’Education et des Mines, le palais de l’Assemblée nationale, les sièges du parti Adéma et de l’US-RDA, les infrastructures de la Coopérative Jamana ainsi que les domiciles privés du président Alpha Oumar Konaré et du ministre d’Etat chargé de l’Education Baba Akhib Haïdara. L’intensité des dégâts et l’ampleur de la violence ont suscité une sorte de crise gouvernementale amenant le Premier ministre Younoussi Touré à présenter sa lettre de démission au président de la République. En voici de larges extraits : “Monsieur le président, depuis quelques temps, notre pays connait au plan politique de graves difficultés qui menacent la stabilité des institutions républicaines et l’avenir même du processus démocratique au Mali. Face à cette situation et en vue de la recherche des solutions susceptibles d’assurer le retour de la paix sociale et de consolider la réconciliation et l’unité nationales, j’ai décidé aujourd’hui même de vous présenter la démission de mon gouvernement. Je saisis l’occasion pour vous exprimer une fois de plus toute ma gratitude et mes remerciements pour la confiance que vous avez bien voulu placer en moi et en l’équipe que j’ai eu l’honneur de diriger dans cette phase difficile mais combien exaltante du démarrage de la IIIE République. Mon équipe et moi-même avons été honorés de travailler à vos côtés dans cette période historique de la vie de notre Nation […]”.

Le lendemain de la remise à son destinataire de ladite lettre de démission, son contenu a été développé dans un “message” à la nation dans lequel Premier ministre démissionnaire revient en détails sur les malheureux événements des jours précédents. Il y expose les faits, en donne des explications et tient à dresser le bilan de l’activité gouvernementale entre juin 1992 et avril 1993. Après l’énumération des faits et chiffres, le désormais ex-chef du gouvernement prend à témoin ses compatriotes sur les dangers de déstabilisation du pays ainsi que les menaces graves qui planent sur le processus démocratique au Mali qui s’attèle à la mise en place de ses premières institutions.

En définitive, Younoussi Touré indique avec insistance que sa démission est “un départ sans pression, ni calcul”. Trois jours après cette démission (12 avril), un nouveau Premier ministre est nommé en la personne de Me Abdoulaye Sékou Sow, précédemment ministre d’Etat chargé de la Défense dans la première équipe gouvernementale de la IIIe République.

9 novembre 1993 : Démission du ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique Mamadou Bamou Touré.

Il est immédiatement remplacé par Moustapha Dicko (décret n°93-407/P-RM). Le retrait gouvernemental de Mamadou Bamou Touré (cadre de l’US-RDA) qui avait été reconduit 48 h auparavant dans l’attelage gouvernement, est une mesure de discipline de parti qui l’oblige à se conformer aux consignes de sa formation politique déjà retiré du regroupement des Partis signataires du Pacte républicain (PSPR, la majorité gouvernementale autour du président Konaré).

En effet, depuis le 12 octobre 1993, l’US-RDA avait suspendu sa participation aux activités des PSPR avant de s’en retirer définitivement le 26 octobre suivant. Retrait formalisé par une déclaration rendue publique par le comité directeur national (CDN) du parti de la Charrue attelée lors d’une conférence de presse tenue à son siège au quartier Hippodrome.

En se retirant du bloc majoritaire PSPR, l’US-RDA formulait de nombreux griefs contre l’Adéma/PASJ accusé, principalement, d’avoir violé les clauses du Pacte en s’adonnant subséquemment à la gestion non concertée des affaires publiques. Mécontent de ces pratiques, le parti de la Charrue attelée met fin à près de 15 mois de partenariat politique avec le président Alpha Oumar Konaré.

Avant de sortir du bloc majoritaire, l’US-RDA a remis au chef de l’Etat et au Premier ministre (le 6 novembre, veille d’un remaniement ministériel) une déclaration dans laquelle il explique sa décision de retrait et sa volonté de ne plus participer à l’action gouvernementale. Une volonté manifestée avec la démission du ministre Mamadou Bamou Touré. Ainsi, un terme est mis au partenariat scellé le 3 juin 1992 (à moins d’une semaine de l’investiture du 1er président de la IIIe République) à travers la signature du Pacte républicain.

Voulu, conçu et proposé par le vainqueur de la présidentielle d’avril-mai 1992 qui ne souhaitait pas laisser son parti Adéma/PASJ (ultra majoritaire dans les institutions communale et parlementaire) seul “gérer le pouvoir”, le Pacte républicain souligne que “les partis politiques signataires, conscients de l’impérieuse nécessité de l’unité des forces démocratiques et du changement, s’engagent à conjuguer leurs forces dans me cadre d’une gestion concertée des collectivités et des Institutions de l’Etat en vue de renforcer les valeurs démocratiques fondamentales et la cohésion nationale, de restaurer la crédibilité de l’Etat et de promouvoir une citoyenneté fondée sur la participation des populations et leur confiance dans les institutions”.

Le  Pacte républicain est ainsi signé par 7 formations politiques : l’Ades, l’Adéma/PASJ, le PDP, le RDT, le RTM, l’UFD et l’US-RDA. Suite logique de leur engagement d’accompagnement, des portefeuilles ministériels sont occupés par des cadres de certains de ces partis en plus de ceux destinés à l’Adéma, le principal parti majoritaire. Durant le biennum 1992-1994, des cadres des PSPR vont siéger ainsi au gouvernement. Le ministère de l’Artisanat et du Tourisme est confié à Ambadjo Kassogué du RDT (juin 1992-novembre 1993). Le PDP va bénéficier des départements de la Justice (Me Drissa Traoré) et de la Communication puis de la Jeunesse & Sports (occupés par Me Boubacar Karamoko Coulibaly). Quant à l’US-RDA, elle aura les ministères de l’Education (avec le ministre d’Etat Baba Akhib Haïdara, juin 1992-avril 1993), des Relations extérieures puis les Affaires étrangères avec Mohamed Alhousseyni Touré (1992-1993 puis avril-novembre 1993) ainsi que le département de l’Enseignement secondaire, technique et professionnel à Mamadou Bamou Touré (16 avril-7 novembre 1993) puis celui des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique, d’où il rend sa démission ce 9 novembre 1993.

Dans cette démarche d’application des consignes de retrait des PSPR, l’US-RDA a recommandé à ses cadres en service dans la haute administration d’Etat de se démettre. Ainsi, est abrogé le 12 novembre 1993, le décret de nomination de l’ex-ministre d’Etat chargé de l’Education nationale Baba Akhib Haïdara en qualité de conseiller spécial du président de la République avec rang de ministre depuis le 11 mai 1993. De même, est aussi abrogé, le 1er décembre 1993, le décret de nomination de Daba Diawara au poste de secrétaire général de gouvernement depuis le 11 juin 1992. A d’autres niveaux décisionnaires de l’administration publique, les cadres de l’US-RDA ont été invités à se conformer aux directives du parti.

 

2 février 1994 : Démission du Premier ministre Me Abdoulaye Sékou Sow.

Le 2e chef du gouvernement du président Konaré jette l’éponge moins d’un mois après la dévaluation du F CFA décidée le 10 janvier 1994 à Dakar, au Sénégal par les chefs d’Etat des pays membres de l’Uémoa avec leurs partenaires français et internationaux. Les conséquences de cette réduction de 50 % de la valeur monétaire du CFA sont très mal vécues par les populations. Pour y faire face, le gouvernement a pris des mesures d’urgence d’accompagnement qui ne donnent pas entière satisfaction aux consommateurs dont la montée de mécontentement est de plus en plus perceptible.

Comme pour faire écho à la colère populaire, des velléités parlementaires (surtout des élus de la majorité) se font entendre en faveur du dépôt d’une motion de censure contre le gouvernement. Parallèlement à la surchauffe de la tension sociale, c’est la recrudescence des manifestations de violences scolaires et estudiantines dans les rues de Bamako. C’est dans ce contexte sociopolitique très chargé que le chef du gouvernement s’est démis de ses fonctions. Dans la lettre qu’il a adressée au président Konaré, Me Abdoulaye Sékou Sow privilégie plutôt la piste d’une conspiration politico-politicienne à son encontre. Il l’écrit au chef de l’Etat en ces termes : “Monsieur le président, comme vous le savez, les 2e et 3e gouvernements de la IIIe République ont constamment fait l’objet de machinations tendant à déstabiliser le Premier ministre. Comme vous le savez aussi, je n’ai jamais douté de votre bonne foi et de votre confiance qui sont restées inébranlables malgré les assauts de la direction du parti majoritaire. Ces machinations du comité exécutif de l’Adéma ont atteint aujourd’hui leur paroxysme. La direction du parti est arrivé à s’associer certains partis et pas des moindres pour organiser un véritable complot dont vous connaissez comme moi toutes les composantes.

Je suis loin d’être à l’abri de la malveillance, de la méchanceté, de la malhonnêteté. Ma conscience et ma dignité de patriote ne m’autorisent plus à persévérer dans la mission que m’aviez confiée. Je ne puis m’exposer à l’humiliation pour une simple question de place. La lutte ridicule pour les places aura été ma grande déception dans l’exercice du pouvoir. Monsieur le président, j’ai l’honneur de vous donner ici et maintenant ma démission du poste de Premier ministre, chef du gouvernement de la IIIe République du Mali. Veuillez agréer, Monsieur le président, l’expression de ma haute considération”.

Toutes ces récriminations qui n’épargnent non plus le président Konaré sont explicitées, 15 années plus tard, par leur auteur dans un ouvrage intitulé “L’Etat démocratique républicain : la problématique de sa construction au Mali” édité en 2008. Me Abdoulaye Sékou Sow y note avec force détails les péripéties de ses 20 mois (juin 1992-février 1994) de participation gouvernementale dont 9 mois au poste de Premier ministre, du 12 avril 1993 au 2 février 1994. Le même 2 février, le Premier ministre démissionnaire est remplacé par Ibrahim Boubacar Kéïta (IBK) précédemment ministre des Affaires étrangères dans l’équipe sortante.

 

16 avril 1997 : Démission collective des représentants de partis de l’opposition de la Céni.

Deux jours après l’indescriptible désastre électoral du 13 avril 1997 qui plongé le Mali dans une crispation politique de près de quatre années, les formations politiques de l’opposition organisées au sein du Collectif des partis politiques de l’opposition (Coppo, sur étiquetage forcé des journaux) font retirer leur délégués de toutes les structures de la Céni. A tous les niveaux (national, régional, local, communal et dans les représentations diplomatiques et consulaires), le Coppo a exigé de tous ses partis membres de faire démissionner leurs représentants. Cette exigence collective est rendue publique dans une déclaration du Coppo expliquée lors d’un point de presse organisé le même jour.

Ce retrait des représentants de l’opposition de la Céni constituait une sorte de rejet de cette nouvelle structure dont la création avait été exigée par l’opposition elle-même en vue de lui permettre d’assurer, pour la première fois, l’organisation matérielle d’une élection au Mali. Tâche ordinaire qui était classiquement à la charge de l’administration d’Etat. Elle est officiellement installée le 24 janvier 1997, à moins trois mois de la tenue du 1er tour des élections législatives.

Ce scrutin législatif du 13 avril s’avère un fiasco organisationnel presque partout au Mali. Dans de nombreux lieux de vote, l’amateurisme des agents électoraux le disputait à la pagaille logistique. Ce flop magistral est unanimement imputé à la Céni, présidée par Me Kassoum Tapo de l’Ordre des avocats. Au plan national, celle-ci est composée de 30 membres dont 8 représentants de l’administration, 8 représentants de la société civile, 14 représentants des partis politiques dont 7 pour la majorité parlementaire et 7 pour l’opposition parlementaire. Ces derniers représentants sont : Dr. Cheick Abagourou Bocoum, Salif Berthé, Ousmane Diallo, Sada Diarra (Notre photo), Amadou Sinayoko, Mamadou Boubacar Kanté Mahamane Rakibou Touré (seul ce dernier refuse de démissionner sur consigne de son parti UDD qui va plus tard quitter le Coppo).

Dès le 14 avril, se réunissent les leaders de l’opposition pour formaliser la création du Collectif. Celui-ci comprend 17 formations reparties entre deux regroupements de partis : le FCD (Front pour le changement et la démocratie composé du Miria, de PMPS, du PRDT, du RDP, de l’US-RDA et de l’UDD) et le RFP (Rassemblement des forces patriotiques constitué du Bdia, du Cnid, du MPR, du PDP, du PMDR, du PSP et de l’UFDP) auxquels s’ajoutent 3 autres partis isolés : la CPP, le FN et le PUDP.

A l’issue de leur concertation de ce 14 avril, les leaders de l’opposition forment le Coppo et rendent public un communiqué dans lequel ils égrènent de nombreuses autres exigences dont notamment la démission du gouvernement du Premier ministre IBK ; la dissolution de la Céni ; la suspension du processus électoral ; l’annulation des résultats du scrutin législatif du 13 avril 1997.

Quatre jours plus tard, après le blocage de ses manifestations décentralisées dans les rues de Bamako, le Coppo rencontre la presse et fait cas de ses nouveaux moyens d’action dont la démission sans délai de tous les représentants de l’opposition de la Céni, à tous les niveaux.

 

 

9 octobre 2000 : Démission de l’ex-Premier ministre IBK de la présidence du C.E de l’Adéma/PASJ.

Cette décision intervient à quelques heures de la clôture des travaux de la 6e Conférence nationale du parti de l’Abeille, réunie au Palais des congrès de Bamako. Une conférence dominée par de vifs débats sur la convocation d’un congrès extraordinaire en vue de procéder à la relecture des textes du parti majoritaire dans la perspective de l’élection présidentielle de 2002.

La tenue d’un tel congrès exige notamment l’initiative de convocation des 2/3 des sections du parti. Avant et pendant ladite Conférence nationale, cette condition est préparée et presque réussie par le groupe de frondeurs dit “rénovateurs” sous la houlette des ministres Soumaïla Cissé et Soumeylou Boubèye Maïga qui ont su investir toutes les structures du parti. En face, le président du parti IBK et ses fidèles se sont rendu compte qu’ils sont en train de perdre la bataille de positionnement. C’est presque dans une surprise quasi-générale que l’ex-Premier ministre claque la porte de la Ruche en lisant lui-même la déclaration suivante :

“Camarades,  pendant 6 ans, j’ai eu l’honneur de porter votre étendard. Pendant 6 ans, vous m’avez tous entouré d’une chaude amitié et d’une franche camaraderie. Aujourd’hui, mon souci demeure le parti, le pays. Le parti, porteur des plus grands espoirs de notre peuple, ne peut se réduire à ce que, malheureusement, j’ai constaté au long de nos travaux, avec tristesse, avec d’autres, aujourd’hui. Le projet est clair. Certains l’ont dit, la Conférence sera l’affirmation d’un désaveu du comité exécutif actuel et de son président. Je ne serai jamais un président accroché à un fauteuil. J’ai la plus haute ambition, la plus haute considération pour mon pays et pour le parti, au redressement duquel je crois avoir modestement contribué, avec vous tous. Pour moi, rien ne vaut le pays, rien ne vaut le parti. Mais, quel parti désormais ?

Tout notre pays, tout notre peuple savent aujourd’hui que la tête d’Ibrahim Boubacar Kéïta a été mise à prix, et savent d’où vient le coup. Ce combat ne vaut pas la peine d’être mené. Je continuerai à servir avec foi et total dévouement notre peuple, où que je sois. Je démissionne de toutes mes responsabilités au sein du parti Adéma à compter de ce jour, car je ne voudrais contribuer, en aucun cas, à tromper le peuple malien. Le nouveau parti Adéma qui se profile ne saurait être, en aucun cas, conforme à mon sens de l’éthique et de la morale politiqueJe remercie les militants de l’Adéma pour leur confiance renouvelée au long de ces années. Je remercie le peuple malien pour son estime réaffirmée à chaque occasion, et l’assure que je lui serai éternellement dévoué. Merci camarades !”

La démission inattendue d’IBK de la tête de l’Adéma est survenue huit mois après son départ forcé de la Primature. Le 14 février 2000, le 3e Premier ministre du président Konaré a dû quitter son poste qu’il a occupé pendant six longues années à partir du 2 février 1994. C’est contraint et forcé qu’IBK a quitté la Primature au terme d’un bras de fer que ses partisans l’ont poussé à engager contre la volonté du chef de l’Etat déjà déterminé à choisir un autre chef du gouvernement. Après la Primature, IBK devait s’occuper du parti en préparant le terrain en vue des échéances électorales à venir. Au moment où nombre de ses fidèles le considéraient comme le “candidat naturel” de l’Adéma pour la succession du président Konaré, d’autres cadres du parti combattaient cette logique “naturelle”. Ils s’organisent en enclenchant un vaste travail d’effritement de l’autorité du président du parti et en exigeant la tenue d’un congrès extraordinaire pour examiner les conditionnalités de la candidature du parti à la présidentielle. C’est dans ce contexte de fortes contestations qu’IBK démissionne de la présidence du parti de l’Abeille. “L’Adéma continue !”, avait aussitôt lancé le Pr. Dioncounda Traoré, vice-président du parti, en reprenant la direction des débats quelques minutes après la sortie d’IBK de la salle de conférence suite à sa déclaration de démission.

21 juin 2001 : Démission du ministre de la Communication, Mme Ascofaré Oulématou Tamboura.

En sa qualité de secrétaire aux affaires économiques du parti COPP de Me Mamadou Gakou, elle entre au gouvernement le 16 septembre 1997. Elle démissionne le 22 juin 2001 à cause d’une affaire de malversations financières concernant la gestion de la Sotelma. Sa démission est rendue publique le même jour par un communiqué de presse émanant du secrétariat général de son ministère. Ledit communiqué est ainsi libellé : “Dans une lettre en date du 21 juin 2001, Mme Ascofaré Oulématou Tamboura a informé Monsieur le Premier ministre, chef du gouvernement de sa démission de ses fonctions de ministre de la Communication. Cette décision, qui fait suite à la gestion de certains faits qui lui sont reprochés dans le cadre de l’exercice de ses fonctions, vise uniquement à permettre à Monsieur le Premier ministre de conduire en toute sérénité l’action gouvernementale et à donner à Mme Ascofaré Oulématou Tamboura la possibilité, en tant que citoyenne, d’organiser en toute liberté sa défense”.

Le 26 juin suivant, un autre communiqué signé par le président du parti COPP, Me Mamadou Gakou, indique : “Madame Ascofaré Oulématou Tamboura, secrétaire générale de la COPP, a présenté sa démission du gouvernement pour enrayer le doute constant qui se profilait sur sa moralité personnelle, alors qu’il n’y a aucune procédure engagée à quelque niveau que ce soit contre sa personne et qu’elle n’a été citée que comme témoin dans une procédure. La direction du parti, prenant acte de cette décision courageuse et hautement patriotique, salue et félicite Mme Ascofaré, militante de qualité et de dignité, pour avoir voulu éviter à la COPP la dépréciation de son image, en prenant un acte de transparence dont l’absence eût offert indéfiniment contre la COPP et le gouvernement de Son Excellence Monsieur Mandé Sidibé, des interprétations aventureuses sans cesse renouvelées, imprévisibles et éminemment falsifiables, contraires aux accords entre le Parti et Monsieur le président de la République.

Tous les adhérents, militants et sympathisants de la COPP ne cessent de nous adresser des messages de solidarité pour ce geste élégant et pour fustiger les atteintes directes à sa personne. La COPP félicite Mme la ministre et tous ses collaborateurs pour l’œuvre accomplie au service de l’Etat et les exhorte à faire profiter le parti de leur expérience”.

Dans la procédure judiciaire évoquée, Mme le ministre démissionnaire n’a jamais été entendu par les enquêteurs. Ceux-ci concentrent leurs investigations sur la responsabilité du PDG d’alors de la Sotelma qui a même été mis sous mandat de dépôt plusieurs mois durant. Auparavant, dès le 22 juin 2001, Mme le ministre démissionnaire est remplacé par son ancienne collègue Mme Bouaré Fily Sissoko ministre de des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, qui récupère la Communication. Ce département disparait du coup en tant que ministère “autonome” du 23 juin 2001 jusqu’au 14 juin 2002. Entre-temps, Mme Ascofaré Ouleymatou Tamboura retourne dans le privé pour exercer ses activités d’opératrice économique.

Au plan politique, elle continue ses occupations de secrétaire générale du parti COPP jusqu’au début 2002 avec l’entrée en lice du candidat ATT dans la campagne présidentielle. Mme Ascofaré s’active beaucoup dans l’état-major de campagne dudit candidat. L’engagement de la dirigeante de la COPP aux côtés d’un candidat non soutenu par son parti créé un malaise entre elle et son président Me Gakou. Après la victoire du général ATT, Mme Ascofaré quitte le parti COPP pour devenir militante du Mouvement citoyen, regroupement d’associations et personnalités divers horizons qui ont soutenu le candidat indépendant ATT élu en mai 2002.

Par la suite, Mme Ascofaré Oulématou Tamboura exerce deux mandats de député (2002-2013) élue à Ténenkou. En 2009, elle est désignée parmi les vice-présidents de la direction du Mouvement citoyen puis membre fondatrice et vice-présidente du parti PDES, créé en juillet 2010 par les partisans du Président ATT pour perpétuer son œuvre politique.

Après le coup d’Etat militaire de mars 2012 et ses conséquences sur la situation politique au Mali, Mme Ascofaré Oulématou Tamboura se trouve parmi les personnalités s’activant pour le retour du président ATT de son exil au Sénégal où il s’est établi depuis avril 2012. C’est dans cette dynamique des initiatives du retour au bercail de l’ancien président du Mali qu’est fondé en mai 2017 le parti MC-ATT (Mouvement citoyen pour l’alternance, le travail et la transparence), présidé par Jeamille Bittar, un ancien cadre du Mouvement citoyen puis du PDES. Il y est secondé par sa camarade  Mme Ascofaré Oulématou Tamboura, membre fondatrice et Vice-président de ce nouveau parti.

29 septembre 2008 : Démission

du ministre de l’Energie, des Mines et de l’Eau, Hamed Sow.

La nouvelle est annoncée par un communiqué de la présidence de la République rendant public le décret n°08-598/P-RM. Le démissionnaire est remplacé 48 h plus tard par le banquier Mamadou Igor Diarra. Très en vue pendant la campagne présidentielle de 2007 qui a abouti à la réélection du président ATT, le Dr. Hamed Sow, cadre expatrié malien en service dans les rouages des ACP-UE depuis une quinzaine d’années, s’est plutôt attiré les foudres des opposants maliens dont la plupart ont virulemment contesté les résultats du scrutin présidentiel d’avril 2007.

Hamed Sow s’est trouvé dans leur viseur surtout que certains médias ne cessaient de le présenter comme le “père du PDES” (Programme pour le développement économique et social du Mali), le projet de société du candidat ATT à la présidentielle d’avril 2007. En réalité, Hamed Sow en était plutôt parmi le groupe restreint de correcteurs de ce document. M. Sow en avait notamment en charge le chapitre relatif aux investissements et à la coopération avec les institutions financières internationales.

Beaucoup le voyaient déjà à la Primature dont la charge revient plutôt à Modibo Sidibé, le ministre/secrétaire général de la présidence et plus proche collaborateur du président ATT. Dans le gouvernement formé le 3 octobre 2007, Hamed Sow est nommé ministre de l’Energie, des Mines et de l’Eau. Quelques semaines seulement après sa nomination, il essuie des accusations médiatiques maliennes faisant des “révélations”sur sa gestion à son poste précédent : directeur général du Centre pour le développement des entreprises (CDE), un organisme qui couvre les 77 Etats des ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) et les 25 Etats (d’alors) de l’Union européenne.

A peine installé dans son fauteuil ministériel que le titulaire de l’Energie, des Mines et de l’Eau reçoit des coups de boutoir journalistiques. C’est dans cette ambiance sulfureuse que le départ de Hamed Sow intervient au bout de charges médiatiques nourries pendant une dizaine de mois. Sur la base des “révélations” d’un ancien collaborateur (son ancien chef de service informatique), lesdits journaux ont commencé leurs tirs de barrage, moins d’un mois après l’entrée de M. Sow dans me gouvernement le 3 octobre 2007. Leur principale charge : M. Sow qui a dirigé le Centre pour le développement des entreprises (CDE, un organisme des ACP-UE basé à Bruxelles) a préféré quitter ce poste à l’international pour rentrer au bercail après y avoir “détourné des fonds” et “favorisé la réalisation des projets” d’entreprises privées maliennes, contrairement aux règles de procédures de son organisme employeur. De nombreux journaux maliens ont crié au scandale et appelé le président ATT à limoger ce “ministre corrompu”.

Face à l’intensité croissante du pilonnage médiatique, le gouvernement malien réagit pour une de très rares fois, comme l’ont constaté nombre d’observateurs. Le 2 novembre, Mme le ministre porte-parole du gouvernement Fatoumata Guindo et le ministre Hamed Sow organise un point de presse pour s’expliquer sur cette affaire dite Hamed Sow ou  “CDE-Fitina”. Hamed Sow a notamment dirigé le CDE de 2005 à 2007. Devant les journalistes, le ministre mis en cause s’en prend à son ex-chef de service informatique qui n’a pu utiliser convenablement les 2*000 euros mis à sa disposition pour réhabiliter le réseau informatique du CDE.

Limogé, cet ex-informaticien s’est mis alors à “me porter préjudice” à travers “un tissu de mensonges” sur le fonctionnement du Centre, indique Hamed Sow. Suite à des “dénonciations calomnieuses” et des “allégations anonymes”, l’Office européen de lutte contre la fraude (Olaf), un service de contrôle administratif (et non organe juridictionnel) interne de la Commission européenne dépêche des enquêteurs pour vérifications sur d’éventuels conflits d’intérêts.

Ces enquêteurs vont mener des investigations et, à la demande du gouvernement malien, se rendent à Dakar pour vérifier si l’ancien patron du CDE n’est pas actionnaire dans une société sénégalaise dénommée TMC. Résultats négatifs. L’opinion malienne n’aura pas non plus d’autres informations confirmant l’implication du ministre incriminée.

Malgré tout, l’”Affaire Hamed Sow” continue à alimenter des journaux maliens relayant de temps à autres des réactions des opposants maliens et des acteurs de la société civile exigeant la démission du ministre de l’Energie, des Mines et de l’Eau. Finalement, le 29 septembre 2008, ce dernier est obligé de rendre le tablier ministériel pour pouvoir se défendre.

Tout en se mettant à la disposition des enquêteurs européens, Hamed Sow s’installe dans le privé et monte à son propre compte une entreprise : Amic-Invest, une société d’ingénierie financière en vue de mobiliser des investisseurs institutionnels et privés principalement basés auprès des places financières à Dubaï, Hong Kong, Pékin et au Luxembourg. En 2011, Hamed Sow est blanchi au terme de trois années d’investigations des structures de l’Union européenne.

A Koulouba, Hamed Sow rejoint le président ATT comme conseiller Spécial (2011-2012). A ce poste, il se trouve parmi les présidents d’honneur du parti PDES contre l’avis officiel duquel il se lance dans les préparatifs de sa candidature à l’élection présidentielle d’avril 2012. Mais, le coup d’Etat militaire du 22 mars 2012 bouleverse tout au Mali.

Au retour de la normalité constitutionnelle, Hamed Sow est désigné parmi les conseillers spéciaux auprès du Premier ministre Diango Sissoko, à partir de fin décembre de la même année 2012. Quelques mois plus tard, il réveille son ambition en rêvant encore de monter au palais de Koulouba. Il crée à cet effet, début 2013, son propre parti le Rassemblement des travaillistes pour le développement (RTD) pour porter sa candidature. Au 1er tour du 28 juillet 2013, Hamed Sow occupe le 18e rang sur 27 compétiteurs en lice.

 

3 mai 2007 : Démission du ministre de l’Environnement et de l’Assainissement, Nancoma Kéïta.

En poste depuis le 2 mai 2004 (sur proposition du RPM dont il est le secrétaire politique), le n°2 dans l’ordre de préséance protocolaire du gouvernement rend le tablier dans la foulée des manifestations de contestation des résultats provisoires du scrutin présidentiel du 29 avril 2007. Des manifestations organisées par les partis de l’opposition rassemblés au sein de l’alliance FDR (Front pour la démocratie et la République). Composée principalement des candidats à ladite présidentielle dont le président du RPM IBK, cette alliance électorale remet en cause les résultats provisoires officiels communiqués par l’Administration territoriale. Lesquels résultats donnaient le président sortant ATT largement vainqueur dès le 1er tour avec plus de 77 % des voix recensées. Dans leurs actions de contestation (dont un recours en annulation), les responsables du FDR multiplient rencontres avec la presse, marches et meetings. C’est au cours d’un meeting dans le Pavillon des spectacles du stade Modibo Kéita que la démission du ministre Nancoma Kéita a été rendue publique par les organisateurs de la manifestation. Le président du Parena, Tiébilé Dramé, a tenu à saluer “le courage politique” du ministre Kéîta  qui a démissionné “pour ne pas cautionner une mascarade électorale”. En début de soirée du même 3 mai, le journal télévisé de l’ORTM diffuse le décret annonçant la démission du ministre de l’Environnement et de l’Assainissement et de son remplacement immédiat par Natié Pleah qui cumule ces nouvelles fonctions ministérielles avec celles de titulaire de la Jeunesse et des Sports qu’il exerce depuis juin 2005.

 

29 septembre 2008 : Démission de Malick Coulibaly, substitut du procureur de la République près le TPI de Kati.

Suite à un jugement rendu par ce tribunal, en son audience du 25 septembre, sur une affaire de vol de bœufs, Malick Coulibaly qui occupait le banc du ministère public refuse d’interjeter appel contrairement aux directives de son supérieur hiérarchique. En y refusant suivant son “intime conviction”, le jeune parquetier a préféré se décharger ainsi de ses responsabilités de substitut chargé notamment “des orientations des PV d’enquête préliminaire, l’analyse des plaintes, l’audition des personnes, le contrôle de la régularité des mesures de garde-à-vue, le règlement des dossiers d’information”.

En plus, il représente le ministère public à l’audience correctionnelle et veille à l’exécution des décisions de justice. C’est dans ce dernier cadre que Malick Coulibaly s’est démis de son poste de substitut puis du corps de la magistrature en manifestant publiquement “son mécontentement contre la non-exécution d’une décision de justice”, selon le quotidien progouvernemental L’Essor.

Cette affaire de vol de bœufs le pousse à se décider de quitter la magistrature à la suite d’un échange avec l’administration judiciaire. Le jeune Malick Coulibaly (né le 14 octobre 1971) est définitivement radié du corps des magistrats le 12 novembre 2008 par décret présidentiel n°08-685/P-RM portant acceptation de démission d’un magistrat. “Je ne peux pas accepter que la justice de mon pays soit instrumentalisée”, confie-t-il plus tard à la presse qui a beaucoup mis l’accent sur le caractère historique d’une telle démission “très osée”. Les médias font cas de cette démission extraordinaire qui suscite au fil des semaines un tollé dans le microcosme politico-judiciaire. Le démissionnaire en tire une célébrité.

Diplômé de l’ENA de Bamako (1998) et titulaire d’un doctorat en droit privé et sciences criminelles (Université de Montpellier, 2004), Malick Coulibaly est recruté sur titre à la magistrature en 2005. Il a servi au TPI de Kati pendant seulement huit (8) mois. Rare dans le prétoire, sa démission spectaculaire lui conférera une notoriété médiatique et surtout une  sympathie populaire liée aux nombreuses récriminations citoyennes contre des décisions et acteurs de la justice.

La notoriété de Malick Coulibaly devient plus manifeste le 2 avril 2012 lorsqu’il est nommé garde des Sceaux, ministre de la Justice dans le gouvernement de Dr. Cheick Modibo Diarra sous l’autorité du président Dioncounda Traoré. Gouvernement formé un mois après le renversement du président ATT par un coup d’Etat militaire. Il reste au gouvernement jusqu’au 8 septembre 2013 avec l’accession à la magistrature suprême du président IBK. Après ses fonctions ministérielles, Malick Coulibaly sert notamment comme conseiller politique auprès de la Coopération canadienne à Bamako.

En 2016, l’ex-garde des Sceaux devient avocat inscrit au Barreau de Bamako. Par décret présidentiel n°2017-0377/P-RM du 3 mai 2017, Dr. Malick Coulibaly (expert-consultant en gouvernance) est nommé parmi les neuf (9) membres de la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH). Il y représente les Organisations nationales des droits de l’Homme. Cette CNDH  est une ONG nationale dont la mise en place est une exigence institutionnelle garantie par des législations nationales sur recommandation des instances internationales de promotion et de défense des droits humains. Depuis janvier 2018, Malick Coulibaly est élu président de la CNDH en remplacement de Me Kadidia Sangaré Coulibaly (qui y représentait l’Ordre des avocats du Mali) devenue, le 30 décembre 2017, ministre des Droits de l’Homme.

5 décembre 2010 : Démission du ministre de la Santé Oumar Ibrahim Touré.

Dans la soirée du même jour, un communiqué de la présidence de la République rend public le décret n°10-649/P-RM qui fait cas de la démission du ministre Oumar Ibrahim Touré ainsi que de son remplacement par le Dr. Badara Aliou Macalou, ministre des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine qui assume désormais cumulativement les deux fonctions ministérielles. Le ministre Touré s’est vu dans l’obligation morale de se démettre suite à une longue traque médiatique menée par un de ses plus proches collaborateurs (ancien chef de cabinet, journaliste de son état). Ses nombreux articles de presse ont, de septembre 20089 à décembre 2010, relayé des dénonciations de détournements de deniers du Fonds mondial des Nations unies pour la lutte contre le paludisme, la tuberculose et le VIH/Sida. Des dénonciations tirées d’un rapport d’un inspecteur dudit Fonds qui, au bout du compte, se sont avérées fausses. Le ministre Touré a démissionné pour se mettre à la disposition des enquêteurs nationaux et internationaux. Inculpé avec d’autres cadres de son département et tous traduits devant la Cour d’assises de Bamako pour “atteinte aux biens publics”, l’accusé est définitivement blanchi, mi-décembre 2012, par les Assises qui prononcent un non-lieu en sa faveur.

Quelques mois plus tard (avril 2013), il est exclu du parti URD (Union pour la République et la démocratie) de Soumaïla Cissé avec lequel il a jusque-là cheminé depuis l’Adéma/PASJ. Il crée alors le 24 mai suivant sa propre formation APR (Alliance pour la République) et se présente à l’élection présidentielle du29 juillet 2013. Il se classe 14e sur 27 candidats alignés et, pour le second tour, appelle sans tarder à voter pour le candidat IBK face à l’ancien ami et camarade Soumaïla Cissé.

Après trois petites années de traversée de désert politique, Oumar Ibrahim Touré est nommé en janvier 2016 commissaire à la sécurité alimentaire avec rang de ministre par IBK. Le revenant y officie encore et n’est point dépaysé à ce poste  pour avoir été ministre délégué à la Sécurité alimentaire (octobre 2002-mai 2004), au compte de l’Adéma, tendance Soumaïla Cissé. Quand ce dernier quitte la Ruche en juin 2003 avec armes et bagages, il est suivi par de nombreux cadres dont Oumar Ibrahim Touré qui se trouve dans son cercle restreint.

Trônant aux premières loges du nouveau parti URD qu’ils viennent de créer ensemble, le ministre délégué Touré s’en trouve promu ministre de l’Elevage et de la Pêche, du 3 mai 2004 au 3 octobre 2007. A cette date, il est nommé ministre de la Santé d’où il démissionne le 5 décembre 2010.

Parallèlement à ses tâches administratives actuelles, le ministre/commissaire Oumar Ibrahima Touré est la tête de file de l’Alliance pour le Mali (APM) composée d’une dizaine de partis politiques membres de la Convention de la majorité présidentielle.

8 avril 2012 : Démission du président de la

République Amadou Toumani Touré.

Trois semaines après le renversement de son régime par un coup de force militaire le 22 mars 2012 et à moins de deux mois de la fin de son second et dernier mandat quinquennal, celui qui préside aux destinées du Mali depuis le 8 juin 2002 quitte formellement le pouvoir. En se conformant aux dispositions de la Constitution, le président ATT adresse, ce 8 avril 2012, au président de la Cour constitutionnelle sa lettre de démission. Un acte s’inscrivant dans le cadre de la médiation de la Cédéao en quête de retour au Mali de la normalité constitutionnelle.

En renonçant aux fonctions présidentielles de son pays, ATT adresse la correspondance dont la teneur est ainsi libellée : “En ce moment critique de l’histoire de notre pays, qu’il me soit permis d’avoir une pensée profondément douloureuse pour les populations des régions de Tombouctou, Gao et Kidal, en particulier mes amis les enfants qui souffrent du fait de l’occupation inacceptable de cette partie de notre territoire.

A la suite de l’élection du président de la République en avril 2007, les Maliennes et les Maliens m’ont renouvelé leur confiance. En application des dispositions de l’article 37 de la Constitution du 25 février 1992,  j’ai pris fonction le 8 juin 2007 pour un mandat de cinq ans. Dans le prolongement des acquis de mon mandat précédent, j’ai consacré toute mon énergie et toute mon imagination à la satisfaction exclusive des besoins essentiels de mes compatriotes et à la réalisation d’un Mali émergent.

Aujourd’hui, il ne me revient pas de dresser le bilan de mes deux quinquennats. Les historiens s’en chargeront. Toutefois, depuis quelques mois, notre pays est en proie à des convulsions sur le triple plan sécuritaire, politique et social.  Cette situation a atteint son paroxysme les 21 et 22 mars 2012, lorsqu’une violente mutinerie de la garnison militaire de Kati m’a mis dans l’impossibilité d’exercer mes fonctions de président de la République.

C’est pourquoi, dans l’intérêt supérieur de mon pays, j’ai l’honneur de demander qu’il vous plaise de recevoir ma démission et, subséquemment, de constater la vacance de la présidence de la République conformément à l’article 36, alinéa 2 de la Constitution susvisée. Ce faisant, j’adresse mes sincères remerciements à toutes les Maliennes et à tous les Maliens qui m’ont fait confiance, m’ont accompagné durant le temps que j’ai passé à la tête de l’Etat et qui continuent d’œuvrer pour le rayonnement d’un Mali éternel. Enfin, je demande pardon à toutes celles et à tous ceux qui ont pu souffrir du fait des actes que j’ai posés, sans intention de nuire, durant mes deux mandats.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le président, l’expression de ma considération très distinguée”.

Dans le cadre de l’application des dispositions de l’accord-cadre CNRDRE-Cédéao, le président ATT remet cette lettre de démission à une délégation de la médiation, de la Cédéao conduite par le ministre burkinabé des Affaires étrangères, Djibril Y. Bassolé, accompagné du ministre ivoirien de l’Intégration africaine, Adama Bictogo. La cérémonie a eu lieu dans une résidence privée de l’une des filles Touré à Hamdallaye ACI-2000. Le 19 avril suivant, à la sollicitation de la Cédéao en accord avec le président Macky Sall nouvellement élu à la tête du Sénégal, l’ex-président ATT et sa famille quittent Bamako pour s’installer à Dakar. Ils y passent plus de cinq années pour ne revenir que, grâce à la sollicitude du président IBK, symboliquement le 24 décembre 2017. Ce jour-là, l’accueil populaire exceptionnel réservé à ATT et aux siens par les populations bamakoises massivement sorties a pris l’allure d’un “retour triomphal”, généralement reconnu par nombre d’observateurs.

 

Nuit du 10 au 11 décembre 2012 : Démission du Premier ministre Dr. Cheick Modibo Diarra.

Alors qu’il s’apprêtait à voyager sur Paris, le Premier ministre Cheick Modibo Diarra est  amené manu militari au camp de Kati, au QG de la junte dirigée par le capitaine Amadou Haya Sanogo. C’est, en pleine nuit, contraint et forcé que le chef du gouvernement signe sa lettre de démission, remise immédiatement au capitaine Sanogo pour transmission au chef de l’Etat. Par la suite, sous les canons des fusils pointés vers lui que le Dr Diarra lit très rapidement  une déclaration enregistrée par une équipe de l’ORTM dépêchée sur place. Cette déclaration est tardivement (vers 3 h du matin) diffusée à la télévision nationale. Le Premier ministre démissionnaire déclare : “Mes chers compatriotes, notre pays, le Mali, traverse aujourd’hui la période la plus difficile de son histoire. En de pareils moments de crise, les hommes et les femmes, soucieux du devenir de notre nation, souhaitent une situation apaisée. C’est pour cela que moi, Cheick Modibo Diarra, démissionne avec tout mon gouvernement ce jour mardi 11 décembre 2012. Je m’excuse auprès de l’ensemble des populations du Mali qui souffrent de cette crise sous plusieurs formes et à tous les niveaux. Je remercie les membres du gouvernement, tous leurs collaborateurs pour les efforts dont ils n’ont pas fait économie. Je souhaite à la nouvelle équipe pleins succès dans ses missions. Que Dieu bénisse le Mali ! Je vous remercie”. Le lendemain de cette démission, le président de la transition fait une adresse radiotélévisée à la nation en annonçant que “dans la nuit du lundi au mardi 11 décembre 2012, le Premier ministre Cheick Modibo Diarra a annoncé sa démission ainsi que celle de son gouvernement. Cette démission m’a été formellement remise par écrit. J’en ai pris acte et je l’ai acceptée. Je voudrais saluer ici Cheick Modibo Diarra pour les services rendus à la nation, pour ses qualités d’homme ainsi que pour notre collaboration. En ce qui me concerne, j’aurai tout entrepris pour éviter une crise ouverte au sommet entre le président [du Comité militaire] et le Premier ministre parce que le seul objectif qui vaille c’est le Mali et le seul sacrifice qui vaille, c’est le sacrifice consenti pour les intérêts supérieurs du Mali. […] Dans les 24 h, le Mali connaitra son nouveau Premier ministre et son nouveau gouvernement d’ici la fin de la semaine. […] Les événements que nous vivons impliquent forcément un nouveau report de la date des Concertations nationales. Ces assises, dont nous ne pouvons pas faire l’économie, ont pour but (…) de mettre en dialogue les forces vives de notre nation pour dégager une vision partagée et un consensus sur les voies et moyens de sortie de crise. […]”

L’adresse est diffusée dans le JT du 11 décembre. Le même JT diffuse une interview du capitaine Amadou Haya Sanogo expliquant les péripéties de la démission du chef du gouvernement qu’il traite ainsi “kamalen kun diamana”, littéralement “le gars était gonflé” (version bambara de son intervention). Dès le début de la soirée de ce même mardi 11 décembre, le président Dioncounda Traoré nomme le nouveau Premier ministre : Diango Cissoko, jusque-là Médiateur de la République.

 

19 décembre 2012 : Démission Sadio Lamine Sow, conseiller spécial en charge des affaires étrangères et de la coopération internationale à la Primature.

Dans la lettre qu’il a adressée au nouveau Premier Diango Sissoko, le démissionnaire donne des motivations. Extraits : “(…) Vous avez souvenance de la campagne politique, violente, insensée contre ma nomination comme conseiller spécial avec rang de ministre auprès du Premier ministre. Cette décision correspondait sans doute à une nécessité du moment (…) Ma présence à vos côtés ne devra pas servir d’excuse à des carences et à des manquements à nos devoirs sacrés, dont le plus immédiat est la libération de nos régions occupées et livrées à la servitude de la rébellion et du terrorisme. (…) Ma relation connue, publique, confiante avec de nombreux dirigeants africains doit être considérée comme un atout et non comme un handicap. Hélas, il me revient, et vous le savez, qu’une controverse alimente mon rôle dans cette phase particulière de notre histoire. Elle n’honore ni notre pays, ni les auteurs de cette polémique. C’est pourquoi, aujourd’hui, j’ai décidé en toute conscience de vous remettre ma démission que je vous prie de bien vouloir accepter. Veuillez considérer qu’elle est la réponse patriotique d’un citoyen qui doit tout à son Mali natal”.

Cette démission met un terme à plus de sept (7) mois d’expérience ministériel de ce journaliste qui a longtemps été un des très proches collaborateurs du président Blaise Compaoré au Burkina (1987-2012). Il était rentré au Mali suite au coup d’Etat militaire qui a renversé le président ATT le 22 mars 2012. Presqu’un mois après, Sadio Lamine Sow a été promu (unique) ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale dans le 1er gouvernement formé le 25 avril 2012 par le Premier ministre Cheick Modibo Diarra sous l’autorité de Pr. Dioncounda Traoré, président de la  République par intérim. Quatre mois après, un nouvel gouvernemental est mis en place sans l’unique ministre d’Etat de l’équipe sortante. Immédiatement, le décret n°2012-482/PM-RM du 21 août 2012 du PM Cheick Modibo Diarra avait fait de Sadio Lamine Sow, conseiller spécial du Premier ministre avec rang de ministre chargé des relations internationales. Soit le lendemain du remaniement ministériel annoncé par le président par intérim, Dioncounda Traoré.

5 avril 2014 : Démission du Premier ministre Oumar Tatam Ly

Sept mois jour pour jour après sa nomination à la Primature, le chef du gouvernement du début du quinquennat du président IBK rend le tablier à la surprise d’un grand nombre des Maliens. Au moment où l’on s’attendait à son examen de passage à l’Assemblée nationale avec la présentation de la Déclaration de politique générale du gouvernement, Oumar Tatam Ly démissionne. Dans la lettre qu’il a adressée au président IBK, il donne ses motivations : “Excellence Monsieur le président de la République, au regard des dysfonctionnements et des insuffisances que j’ai relevées dans la marche du gouvernement, qui réduisent grandement sa capacité à relever les défis se présentant à lui, il m’est apparu nécessaire de lui imprimer, au sortir des législatives, dans un environnement institutionnel devenu moins favorable, des évolutions propres à lui conférer davantage de cohésion et à le doter de compétences accrues lui permettant de mettre en œuvre les changements attendus par vous-même et par le peuple malien. Je n’ai pu vous convaincre de la nécessité de ces évolutions, lors de nos entretiens des 2, 3 et 16 mars ainsi que du 4 avril 2014. En conséquence, en considération de ces vues différentes, qui ne me mettent pas dans la position de remplir la mission que vous m’avez confiée, je suis au regret de vous présenter ma démission du poste de Premier ministre du gouvernement de la République du Mali. Je vous prie de croire, Excellence Monsieur le président de la République, en l’expression de ma très haute considération.”

Dans la soirée du même 5 avril, un flash spécial de la télévision nationale (ORTM) annonce la nomination du nouveau Premier ministre Moussa Mara, précédemment ministre de l’Urbanisme et de la Politique de la ville dans l’équipe sortante.

Août 2015 : Démission du président de la Commission nationale d’organisation du Sommet Afrique-France de Bamako 2017 (CNOSAF), l’ancien ministre Modibo Kadjoké. 

Le juriste spécialisé en droit privé a siégé, sur proposition du Cnid/Fyt, dans le dernier gouvernement du président ATT au poste de ministre de l’Emploi et de la Formation professionnelle, du 6 avril 2011 jusqu’au coup d’Etat du 22 mars 2012. Après le rétablissement de la normalité constitutionnelle et à quelques encablures des élections générales de 2013, Modibo Kadjoké et d’autres cadres, démissionnaires du Cnid, fondent le le 23 janvier de la même année l’Alliance Pour le Mali (APM/Maliko) dont il assure encore la présidence. De 2013 à 2015, il dirige l’Office malien de l’habitat (OMH).

Nommé en mai 2015 à la tête de la Commission nationale d’organisation du Sommet Afrique-France de Bamako 2017, il a dû démissionner trois mois plus tard pour pouvoir se défendre devant la justice où il était mis en cause dans une affaire relative à sa gestion de l’Apej dont il fut DG entre juillet 2007 et  avril 2011. Il en fut innocenté après vérification des dossiers en juillet 2017 par le Pôle économique et financier du Tribunal de grande instance de la Commune III. Depuis fin juin 2017, Modibo Kadjoké est le chef de la Mission d’appui à la réconciliation nationale (MARN). Dotée des équipes régionales, cette structure (rattachée au ministère du même nom) est notamment chargée de la prévention, de la gestion et du règlement des conflits.

27 novembre 2017 : Démission du ministre de la Justice, des Droits de l’Homme, garde des Sceaux, Me Mamadou Ismaïla Konaté.

En poste depuis le 7 juillet 2016, le célèbre avocat d’affaires jette l’éponge suite à l’abandon des charges prononcé par la Cour d’appel de Bamako en faveur de l’activiste et chroniqueur Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath (par ailleurs fils du ministre Mohamed Ali Bathily en charge des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières qui était encore en poste). Cette démission de Me Konaté est l’épilogue d’une affaire qui défraie la chronique depuis plusieurs mois. En août 2016, sur instruction du procureur général de la Cour d’appel de Bamako, une action judiciaire est lancée contre le célèbre chroniqueur pour avoir tenu, lors des émissions radiophoniques, entre autres, des propos tendant à démoraliser les troupes au front.

Les faits retenus contre le chroniqueur sont qualifiés d’“incitation à la désobéissance des troupes” par la Chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de la Commune VI (TGI-CVI). La procédure fut longue entre le jugement rendu à la TGI-CVI et la Cour d’appel. Celle-ci, dans un premier temps, confirme le jugement de la première en instance en prononçant même, en l’absence du prévenu en tournée hors du pays, une condamnation d’un an d’emprisonnement ferme et une amende de 100 000 FCFA. Condamnation contestée par les avocats de la défense qui interjettent appel.

Finalement, le chroniqueur Ras Bath aura gain de cause à la même Cour d’appel qui décide de l’abandon de la poursuite  contre le chroniqueur “pour manque de preuves incriminant le chroniqueur”. Se sentant désavoué, le ministre de la Justice démissionne le même jour en adressant au chef de l’Etat la lettre dont la teneur suit : “Monsieur le président de la République, La Cour d’appel de Bamako vient de rendre son arrêt de relaxe dans l’affaire dite Ras Bath. Je prends acte de cet arrêt en même temps que je prends toute la mesure de son sens.

Je note l’attente du régime de passer par un tel chemin vers l’apaisement et l’accalmie. L’ambiance délétère du moment nous conduit à courber l’échine devant les anomalies, à fermer les yeux devant les violations et à accompagner les anomalies de peur des affres des troubles et des violences de rue. Le régime en donnant échos à une telle vertu se sauve sans la République. La préservation des libertés et de toutes les libertés est aussi utile et nécessaire en République que leur respect absolu s’impose à tous. Aujourd’hui peut être pas mais demain oui et sans aucun doute.

La quiétude des populations et la sauvegarde de leurs libertés, la défense de l’intérêt supérieur de l’Etat et la préservation du bien public, la lutte pour la justice et contre l’impunité des crimes et des crimes de sang en particulier sont des déterminantes essentielles en République. En République, l’action d’un ministre de la Justice vise à suivre l’application des lois et des règlements et poursuivre le non-respect et leurs violations le cas échéant. Je fais le constat de l’impossibilité de poursuivre ma mission à travers des actions efficaces, vigoureuses pour préserver les libertés et poursuivre leurs violations, pour défendre les deniers dissipés et les intérêts publics compromis et mettre en œuvre des actions idoines, pour poursuivre le crime de sang contre l’impunité…

Pour qu’aucune action non accomplie ne le reste le plus longtemps au sein de ce département, j’ai décidé de vous présenter ma démission en tant que ministre de la Justice pour reprendre ma liberté. Profonds respects”.

Formalisée en début de soirée de ce 27 novembre, cette démission est plus tard confirmée dans la même nuit par un flash spécial de la télévision nationale qui annonce également la nomination du nouveau ministre de la Justice, des Droits de l’Homme, garde des Sceaux en la personne de Hamidou Younoussa Maïga (magistrat à la retraite).

Après ces fonctions ministérielles, Me Konaté est retourné à ses activités professionnelles. De temps à autre, il ne se gêne d’exprimer son amertume face à la gestion des affaires publiques surtout dans sa dimension juridico-politique. Ce 19 février, il a profité du procès du député-maire de Dakar, Khalifa Sall, dont il fait partie des Conseils pour confier à la presse que “la justice est instrumentalisée en Afrique”. A travers ce propos, l’ex-garde des Sceaux malien  qui sait bien de quoi il parle,  “regrette cette tendance qu’ont les hommes politiques à engager un bras de fer contre leurs adversaires pour ensuite demander à la justice d’arbitrer cette bagarre”.

 

30 novembre 2017 : Démission de l’Armée du général de brigade Moussa Sinko Coulibaly,

ancien ministre de l’Administration territoriale (avril 2012-avril 2014).

En poste de directeur de l’Ecole de maintien de la paix Alioune Blondin Bèye de Bamako (EMP-ABB), depuis mai 2014, le général Coulibaly a fait sa demande adressée, par voie hiérarchique, au président de la République, chef suprême des Armées. Dans sa lettre de démission, le quadragénaire saint-cyrien écrit clairement : “Excellence Monsieur le chef Suprême des Armées, J’ai l’honneur de vous présenter ma démission des Forces armées à compter de ce jour 30 novembre 2017. Ce choix est lié à mon ambition de vouloir contribuer autrement à trouver des solutions aux défis politique, économique, éducatif, culturel et social auxquels notre pays est confronté. J’ai été honoré de servir au sein des Forces de défense et de sécurité. Je continuerai à servir mon pays en tant que civil partout où besoin sera. Je remercie tous ceux qui m’ont fait confiance tout le long de cette carrière. Je reste disposé à œuvrer au renforcement de ces relations de confiance.

Je tiens copies de cette lettre à la disposition de toutes les organisations qui seraient intéressées. Je vous saurai gré, Excellence, de bien vouloir communiquer cette démission aux institutions et services de l’Etat. Veuillez agréer, Monsieur le chef suprême des Armées, l’expression de ma très haute considération”.

Cette lettre reçoit une réponse présidentielle le 10 janvier 2018 à travers le décret n°2018-0028/P-RM portant radiation d’un officier général des Forces armées. Se fondant sur les dispositions de la Constitution du 25 février 1992 et celles de l’ordonnance n°2016-020/P-RM du 18 août 2016 portant statut général des militaires et en réponse à la demande en date du 30 novembre 2017 formulée par l’intéressé, le président de la République décrète que “le général de brigade Moussa Sinko Coulibaly de la direction du Génie militaire est rayé du contrôle des effectifs des Forces armées”(article 1er).

La démission de l’Armée de ce jeune général quadragénaire (il est le 14 juillet 1972 à Bamako) défraie la chronique en raison particulièrement de son ascension fulgurante sur la scène publique ces cinq dernières années au Mali. En effet, diplômé de l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr (1995), le colonel Moussa Sinko Coulibaly fait partie des officiers supérieurs qui ont appuyé à l’ombre les jeunes mutins de Kati sous la houlette du capitaine Amadou Haya Sanogo. Il est considéré par nombre d’observateurs comme l’éminence grise de ce capitaine putschiste. Dans la nuit du 21 au 22 mars 2012, les insurgés de Kati ont transformé leur mutinerie en coup d’Etat militaire en renversant le pouvoir du président ATT.

Basée à Kati, la junte se dénomme Comité national du redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat (CNRDRE). Son président, le capitaine Sanogo, s’entoure de quelques rares officiers supérieurs dont sa tête pensante le colonel Moussa Sinko qui devient ainsi son directeur de cabinet pendant presqu’un mois.

C’est de ce poste qu’il devient, le 25 avril 2012, ministre de l’Administration du territoire, de la Décentralisation et l’Aménagement territoriale. Il a ainsi assumé le rôle d’organisateur en chef des élections générales de 2013 avant de quitter le gouvernement lors du remaniement ministériel du 14 avril 2014.

Entre-temps, grâce au président Dioncounda Traoré, Moussa Sinko Coulibaly porte les étoiles de général de brigade depuis le 14 août 2013. Avant les événements de mars 2012, le colonel Moussa Sinko était (2010-2012) le directeur de l’instruction de l’EMP-ABB, une école nationale à vocation africaine, principalement appuyée par de nombreux pays européens  qu’il a finalement dirigée de mai 2014 (un mois tout juste après la fin de ses fonctions ministérielles) jusqu’à ce 30 novembre 2017. Où, à la surprise quasi-générale, il a demandé à quitter les rangs de l’Armée malienne.

Cette démission est diversement interprétée dans les casernes militaires, largement décryptée dans les milieux diplomatiques, précautionneusement analysée dans le landerneau politique, opportunément exploitée dans les cénacles oppositionnels et abondamment commentée sur les espaces médiatiques. Les diverses réactions qu’elle a suscitées ont été amplifiées par l’intéressé lui-même qui, dès le lendemain de sa décision, n’a pas attendu une réponse officielle pour se lancer dans une intense opération de communication et de relations publiques : surmultiplication des interviews dans les médias (tous supports confondus) ; initiatives de rencontres avec des leaders politiques notamment de l’opposition ; création d’un mouvement politique “Plateforme pour le changement” dont le lancement est effectué à la date symbolique (pour l’Armée), du 20 janvier.

De cette date à la fin février dernier, le général démissionnaire a personnellement conduit des délégations qui ont sillonné l’intérieur du pays en se rendant dans plusieurs localités à travers tout le pays. Dans les six communes de Bamako ainsi que dans les villes garnisons du Mali profond, ses fans mobilisés et structurés en clubs de soutien ont organisé des tournées d’implantation de son mouvement. Lequel est partie prenante du projet de la plateforme d’une douzaine de partis et mouvements qui se concertent très activement pour le choix d’un candidat unique au prochain scrutin présidentiel.

Depuis l’annonce retentissante de sa démission fracassante, le général Moussa Sinko Coulibaly a mis à profit toutes les occasions pour tenir un discours très critique contre la gouvernance du président IBK dont il exige même la démission avant la fin de son mandat en septembre prochain. A défaut de la satisfaction immédiate de son “exigence”, le général démissionnaire se montre très déterminé dans la posture d’un opposant irréductible qui insiste, avec fortes indications d’empressement, le départ du président IBK au terme du prochain scrutin présidentiel. Selon lui, le “régime IBK a échoué sur tous les plans”.

 Dossier réalisé par la Rédaction

 

Liste des principales démissions politiques célèbres

Sous le Président Modibo Kéïta

(22 septembre 1960 – 19 novembre 1968) :

– 17 janvier 1968 : Démission collective des Députés à l’Assemblée Nationale.

Sous le Président Moussa Traoré

(19 novembre 1968 – 26 mars 1991) :

– Août 1980 : Démission du Ministre des Sports, des Arts et de Culture, le Pr Alpha Oumar Konaré.

– 07 mai 1981 : Démission du Colonel Youssouf Traoré de tous les organes de l’UDPM (Parti unique constitutionnel).

– 24 août 1987 : Démission du ministre des Finances et du Commerce Soumana Sako.

– 24 mars 1991 : Démission de Djibril Diallo, Secrétaire politique du BEC-UDPM (N°2 du régime).

Sous le Président ATT-I (26 mars 1991 – 8 juin 1992) :

– 20 août 1991 : Démission de Me Demba Diallo, Membre du CTSP (Organe suprême dirigeant de la Transition démocratique).

– 06 janvier 1992 : Démission de Oumar Mariko, Membre du CTSP (Organe suprême dirigeant de la Transition démocratique).

Sous le Président Alpha Oumar Konaré

(8 juin 1992 – 8 juin 2002) :

– 07 juillet 1992 : Démission Ministre des Mines, des Industries et de l’Energie Abdoulaye Camara.

– 09 avril 1993 : Démission du Premier ministre Younoussi Touré.

– 09 novembre 1993 : Démission du ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique Mamadou Bamou Touré.

– 2 février 1994 : Démission du Premier ministre Me Abdoulaye Sékou Sow.

– 16 avril 1997 : Démission des Représentants de l’Opposition à la CENI.

– 09 octobre 2000 : Démission de l’ex-Premier ministre IBK de la présidence du Parti ADEMA.

-21 juin 2001 : Démission du Ministre de la Communication Mme Ascofaré Oulématou Tamboura.

Sous le Président Président ATT-II

 (8 juin 2002 -08 avril 2012) :

– 03 mai 2007 : Démission de Nancoma Kéïta, ministre de l’Environnement et de l’Assainissement.

– 29 septembre 2008 : Démission du ministre de l’Energie, des Mines et de l’Eau Hamed Sow.

– 29 septembre 2008 : Démission de Malick Coulibaly de son poste de Substitut du Procureur de la République près le Tribunal de Kati puis de la magistrature.

– 05 décembre 2010 : Démission du Ministre de la Santé Oumar Ibrahima Touré

– 08 avril 2012 : Démission du Président de la République Amadou Toumani Touré (ATT).

Sous le Président Dioncounda Traoré

 (12 avril 2012 – 04 septembre 2013) :

– 11 décembre 2012 : Démission du Premier ministre Dr Cheick Modibo Diarra.

– 19décembre 2012 : Démission de Sadio Lamine Sow Conseiller Spécial avec rang de ministre auprès du Premier ministre Diango Cissoko.

Sous le Président IBK (depuis le 4 septembre 2013….)

– 05 avril 2014 : Démission du Premier ministre Omar Tatam Ly.

–  Août 2013 : Démission du Président du CNOSAF Modibo Kadjoké.

– 27 novembre 2017 : Démission du Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux Maitre Mamadou Ismaïla Konaté.

– 30 novembre 2017 : Démission de l’Armée du Général Moussa Sinko Coulibaly.

– Fin mars 2018 : Démission logiquement attendue des ministres de l’ADEMA-PASJ, 2ème force politique membre de la Coalition de la majorité présidentielle.

 

 

 

Nos sources

– Agenda UDPM 1980.

– Archives  sonores de Radio-Mali sur les événements politiques de l’année 1968.

– Archives des journaux maliens : L’Essor (le quotidien d’Etat) et des organes  privés traitant des différents cas de démissions évoqués dans ce Dossier.

– Africable Télévision : Emissions ”Débat de Dimanche” et ”Politik L’Invité” : Années 2014, 2015, 2016, 2017 et 2018.

– Bernard Cattanéo (Entretien avec) : ” Alpha Oumar Konaré, un Africain du Mali “, Cauris Livres, Bamako, 2004 ; 176p.

– Ali Cissé : “Mali : Une démocratie à refonder “, L’Harmattan, Paris, 2006 ; 208p.

– Moussa Cissé : “Ibrahim Boubacar Kéïta, un destin d’exception “, L’Harmattan, Paris, 2017 ; 252p.

– Malick Coulibaly : “La procédure pénale au Mali “, Jamana, Bamako, 2009 ; 208p.

– Différents documents (brochures, plaquettes, reliures) sur les assises de l’UDPM : Congrès constitutif de Mars 1979 ;  1er Congrès ordinaire de Février 1982 ; 2ème  Congrès ordinaire de Mars 1985 ; Congrès extraordinaire de mars 1987  et 3ème Congrès ordinaire de Mars 1988.

– Cheïbane Coulibaly : “Comme un petit air de démocratie bananière ! Recueil de pamphlets sur la vie politique ouest-africaine des dix dernières années “, Collection Satires, Editions Le Cauri d’or, Bamako, 2000 ; 452p.

– Coalition Mondiale pour l’Afrique et Africa Leadership Forum – CERDES : “Le processus démocratique malien de 1960 à nos jours “, Editions Donniya, Bamako, 1996 ; 218p.

–  Collectif des Partis politiques de l’Opposition : “Livre Blanc sur les élections générales de 1997 au Mali “, Editions de Ruche à Livres, Bamako, Juillet 1997 ;  70p.

– Joseph Roger de Benoist : ” Le Mali “, Nouvelle édition mise à jour, L’Harmattan, Paris, 1998 ; 296p.

– Charles Debbasch, Jacques Bourdon, Jean-Marie Pontier et Jean-Claude Ricci : “Lexique de politique “, 7ème édition, Dalloz, Paris, 2001 ; 456p.

– Modibo Diagouraga : ” Modibo Kéïta. Un destin “, L’Harmattan, Paris, 2005, 176p.

– Djibril Diallo (Sous la direction de) : ” Le Mali sous Moussa Traoré “, Ouvrage collectif,  Collection Mémoire, Editions La Sahélienne, Bamako, 2016 ; 212p.

– Abdoulaye Diarra : ” Démocratie et droit constitutionnel dans le pays francophones d’Afrique noire. Le cas du Mali depuis 1960 “, Karthala, Paris, 2010 ; 372p.

– Cheick Oumar Diarrah : “Le Mali de Modibo Kéïta “, L’Harmattan, Paris, 1986 -196pages ;  “Vers la IIIème  de la République du Mali”, L’Harmattan, Paris, 1992 -236p et “Le défi démocratique malien “, L’Harmattan, Paris, 1996 ; 316p.

– Seydou Mamadou Diarrah dit Toto : ” Le Mouvement Démocratique malien. L’itinéraire de l’ADEMA-PASJ : origine et parcours “,  Jamana, Bamako, 1996 ; 242p.

– Daba Diawara : “La conquête  de l’indépendance et l’édification du nouvel Etat du Mali, Etude documentaire. Tome II “, Collection Repères, Editions  Tropics, Bamako, 2011 ; 444p.

– Hamadou Djimé : “L’aube des démocraties : La chute de Moussa Traoré “, Imprimerie G/ Mounkoro, Bamako, 1997 ; 224p.

– Journal Officiel de la République du Mali : Archives des années 1968 à 2018.

– Mémorial  Modibo Kéïta : “Les Têtes de la République : Chefs d’Etats et Ministres du Mali de 1957 à 2007 “, Afrikibaru, Bamako, 2007 ; 202p.

– Alpha Oumar Konaré : “Alpha avec vous. Recueil de Discours (1992-1997) de Son Excellence Alpha Oumar Konaré, Président de la République du Mali “,  Edition Afrique Presse, Paris, 1997 ;  220p et ” Histoire des partis politiques au Mali. Du pluralisme politique au parti unique. 1946-1968 “, Cauris Livres, Bamako, 2016 ; 608p.

– Alpha Oumar et Adam Ba Konaré : ” Grandes Dates du Mali “, EDIM, Bamako, 1983 ;  284 pages.

– Moussa Konaté : “Mali : Ils ont assassiné l’espoir “, L’Harmattan, Paris, 1990 ; 148p.

– Marc Moingeon et Michel Guillou : ” Dictionnaire Universel “, 2ème édition, EDICEF-AUPEL-UREF, Paris, 1998 ; 1504p.

– Iba N’Diaye : “Elections 1997 au Mali : Résultats, réflexions. Défis à notre culture démocratique “, Jamana, Bamako, 1998 ; 150p.

– Abdoulaye Sall : “Le pari de la décentralisation au Mali. 2- Textes fondamentaux (1955-1993 “,   Imprimerie SODIFI, Bamako, Août 1993 ; 332p.

– Bintou Sanankoua : ” La chute de Modibo Kéïta “, Editions Chaka, Paris, 1990 ; 185p.

– Issa Balla Moussa Sangaré : “Modibo Kéïta, la renaissance malienne “, L’Harmattan, Paris, 2017 ; 220p.

– Abdoulaye Sékou Sow (Maitre) : ” L’Etat démocratique républicain : la problématique de sa construction au Mali “, Editions Grandvaux, Paris, 2008 ; 456p.

– Sites visités : abamako.com ; maliactu.net ; maliweb.net ; malijet.com ; wikipedia.org ;

– Stations de Radio en FM de Bamako : Emissions  des ”Débats politiques ” et  ”Revue de presse” en langue nationale bamanakan (1993-2018).

– Amadou Seydou Traoré dit Amadou Djicoroni : “Devoir de mémoire. Devoir de vérité “, Editions La Ruche à livres, Bamako, 2005 ; 430p.

Quand de hautes personnalités politiques leurs diverses raisons démissionner

Source: Aujourd’hui-Mali

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