Donald Trump reçoit mardi en Floride le Premier ministre japonais Shinzo Abe pour parler d’un troisième homme: l’énigmatique dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, que le président américain doit rencontrer dans quelques semaines.
Rencontres bilatérales, dîner avec épouses, conférence de presse commune: le président américain et le Premier ministre japonais se retrouvent pour deux jours dans la luxueuse villa de Mar-a-Lago.
Si la Maison Blanche insiste sur les “excellentes relations” entre les deux hommes grands amateurs de golf, le tête-à-tête au soleil pourrait s’avérer délicat.
Le Japon a été pris de court par l’annonce surprise – et spectaculaire – que le 45e président des Etats-Unis avait accepté l’invitation de Kim Jong Un à le rencontrer. Et les initiatives de la Maison Blanche sur le commerce ont du mal à passer à Tokyo.
Après la décision de mettre en place des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium, M. Trump a accepté des exemptions pour les principaux alliés des Etats-Unis… à l’exception du Japon.
Pour Abe, qui avait fait dès le début le pari d’une forme de complicité avec ce président atypique qu’il fut le premier à aller saluer dans la Trump Tower après son élection, la pilule est amère.
Il devrait s’employer à souligner la nécessité d’unité, de front commun Japon-Etats-Unis-UE pour contrer les pratiques jugées déloyales de Pékin.
Les deux hommes, confrontés à des sondages peu flatteurs, sont en difficultés dans leurs pays respectifs.
Quatre ans et demi après son arrivée au pouvoir, Shinzo Abe est confronté à une accumulation d’affaires de favoritisme présumé qui ont refait surface et le placent en position difficile.
Donald Trump, de son côté, traverse un période particulièrement délicate, de la menaçante enquête visant son avocat personnel Michael Cohen à l’intense campagne médiatique de James Comey, l’ex-patron du FBI, qui estime que le septuagénaire est “moralement inapte” à diriger le pays.
– Où ? Quand? Comment? –
“La rencontre sera centrée essentiellement sur la préparation des discussions avec la Corée du Nord”, a prévenu la porte-parole de la Maison Blanche Sarah Sanders lundi à bord de l’avion présidentiel Air Force One.
Les deux jours de discussions permettront peut-être d’en savoir un peu plus sur le face-à-face très attendu entre Trump et Kim.
Car sur le fond comme la forme, les questions sont nombreuses.
Dans quelle pays ? A quelle date ? Sur quel format ? Le secret est bien gardé.
“Les préparatifs sont en cours”, a simplement indiqué un responsable américain, soulignant que la fenêtre de tir avancée par Donald Trump “mai ou début juin”, tenait toujours.
Shinzo Abe tentera, lui, de retrouver une place au coeur du jeu.
“Le Japon veut sa place à la table au lieu d’assister en spectateur à une série de rencontres de Kim avec les dirigeants chinois Xi Jinping, sud-coréen Moon Jae-in et américain Donald Trump”, souligne Mireya Solis, de la Brookings Institution à Washington.
Sur le fond, le Japon redoute que ses impératifs en matière de sécurité soient relégués au second plan.
Tokyo peut craindre que l’attention ne se concentre que sur les missiles intercontinentaux développés par la Corée du Nord et qui menacent les Etats-Unis, mettant au second plan ceux de courte et moyenne portée susceptibles d’atteindre l’archipel nippon.
Le dirigeant japonais insiste par ailleurs pour que la question des ressortissants japonais enlevés par la Corée du Nord dans les années 1970 et 1980 soit aussi sur la table des échanges avec Pyongyang.
Jusqu’ici, l’un des atouts de Shinzo Abe a été sa capacité à rassurer les Japonais sur le fait que sa “relation spéciale” avec le locataire de la Maison Blanche avait aidé son pays à traverser les eaux turbulentes de “l’Amérique d’abord”, résume Mireya Solis.
“Il arrive à Mar-a-Lago avec la volonté de renouveler ce lien singulier, la question de savoir s’il trouvera un enthousiasme réciproque reste ouverte”.
AFP