chemin Koulouba manœuvres scène mouvante
De la signature du manifeste de la Coalition pour l’Alternance et le Changement à la réunion pour la mise en place d’une plateforme autour de la candidature du Président sortant, les politiques sont à la manœuvre sur une scène plus que mouvante.
Le week-end dernier, la scène politique est entrée en ébullition. Deux événements ont eu lieu. Au Palais de la culture, une soixantaine de partis politiques et de mouvements de la société civile ont paraphé un manifeste donnant naissance à une coalition pour l’alternance et le changement. A l’hôtel olympe international, le Président du Rassemblement pour le Mali (RPM), Dr Bocari Tréta, avait appelé les responsables des formations politiques à travailler sur la mise en place d’une plateforme autour de la candidature du Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta.
Deux absences de taille au sein de la CAC
Au sein de la Coalition pour l’Alternance et le Changement, on retrouve toutes les figures qui ont combattu la gouvernance en cours depuis septembre 2013 : Soumaïla Cissé, Tiébilé Dramé, Soumana Sako, Mamadou Sidibé, Ibrahim Kébé. D’autres personnalités ayant regagné les rangs de l’opposition comme l’honorable Amadou Thiam, Kalfa Sanogo, Moussa Sinko Coulibaly étaient également là. Deux absences de taille à signaler : Modibo Sidibé des Forces alternatives pour le renouveau et l’émergence (FARE Anka Wili) et Mohamed Youssouf Bathily dit Ras Bath du Collectif pour la Défense de la République (CDR). Difficile de deviner le choix du jeune Ras Bath et son collectif, en dépit de leur campagne anti-IBK dénommé « Boua ka bla ». Malgré son appartenance à l’opposition, l’ancien inspecteur général de police qui détient un record de longévité au sein du gouvernement du Mali affichait une certaine gêne à être aux côtés du chef de file de l’opposition, en l’occurrence Soumaïla Cissé. Entre les deux hommes, la divergence idéologique est si profonde que certains événements comme la composition du cabinet du chef de file de l’opposition et la désignation des représentants de l’opposition à la CENI ont contribué à les éloigner l’un de l’autre.
Modibo Sidibé, à la différence de Soumaïla Cissé et de Tiébilé Dramé, s’est toujours gardé d’attaquer frontalement le Président IBK. Les critiques de l’ex- ministre des affaires étrangères ne sont jamais dirigées contre la personne de l’ancien Premier ministre d’Alpha Oumar Konaré aux commandes des affaires publiques depuis septembre 2013. Cette position du patron des Fare Anka Wili fait qu’il est aujourd’hui plus apte à bénéficier d’une certaine bienveillance du Président et de son entourage que les autres opposants. A l’heure actuelle, il est peu probable que Modibo Sidibé regagne la Coalition pour l’alternance. Sa candidature unique au sein du Nouveau Pole Politique (NPP) est incertaine dans la mesure où Daba Diawara du PIDS a déjà fait part de sa volonté d’être candidat. Un rapprochement entre Modibo Sidibé, Oumar Mariko, Moussa Mara, Dr Cheick Modibo Diarra, Me Mountaga Tall, Yeah Samaké et autres n’est pas à exclure afin de former un autre front acquis à l’alternance mais différent de celui acté le 29 avril au Palais de la culture. Modibo Sidibé est plus proche d’IBK que ses anciens compagnons de l’opposition.
Du palais de la culture à l’hôtel olympe, il n’y a qu’une pente à surmonter. Autour du tisserand en chef, les têtes fortes de la Convention de la majorité présidentielle (CMP) étaient presque toutes absentes. La coalition que le Président du RPM, Dr Bocary Tréta, tente de mettre sur pied est un ramassé de petites formations politiques sans ancrage électoral. A ce stade, il est clair que certains leaders de la CMP, pas des moindres, ne voient pas aux responsables du RPM des interlocuteurs légitimes avec lesquels ils peuvent s’asseoir pour discuter des contours d’une alliance dont la finalité est la réélection du Président sortant. « Le RPM ne peut pas me mettre sous contrat », nous confie un dinosaure de la majorité présidentielle. Visiblement, le RPM peine à drainer les partis vers la candidature d’IBK.
La légitimité du RPM contestée par ses alliés
Les hésitations du Président IBK à envoyer des signaux forts à ses alliés politiques compromettent dangereusement sa réélection. De toute évidence, IBK fait actuellement une mauvaise lecture de la situation politique. Le débat au sein de l’ADEMA-Pasj fait en sorte que les abeilles à la base suivront difficilement les consignes de leur directoire qui optera probablement pour un soutien au Président fondateur du RPM. Non seulement, le vote du peuple ADEMA en faveur de son ancien camarade est plus qu’incertain mais aussi le Président IBK est en train de se laisser berner par son entourage qui investit dans le financement des mouvements et associations opportunistes. Dans le contexte actuel marqué par un divorce entre l’homme plébiscité en 2013 et ses électeurs, il est plus qu’illusoire de croire que ces mouvements peuvent se substituer aux partis politiques.
Tout se déroule comme si le locataire de Koulouba n’a tiré aucune leçon de l’échec de son projet de révision constitutionnelle, qu’il a été contraint d’abandonner sous la pression de la rue. La ferveur populaire de 2013 autour de l’homme, perçu à l’époque comme un sauveur, est loin derrière nous.
A ce rythme, le Président sortant, s’il tient encore à être candidat, doit reprendre les choses en main (s’il n’est pas trop tard) ou faire le deuil d’un second mandat qui paraît de plus en plus hypothéqué. En plus de l’opposition traditionnelle, le Président IBK doit se résoudre à subir les foudres de certains de ses compagnons devenus aujourd’hui ses plus grands pourfendeurs. La situation à laquelle il fait face est inédite.
Chiaka Doumbia
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Source : Le Challenger