Un an après le lancement de l’enquête du procureur spécial Robert Mueller, dont l’issue reste imprévisible, Donald Trump a de nouveau tempêté jeudi, à coups de tweets rageurs, contre les investigations en cours.
“Bravo l’Amérique, nous sommes entrés dans la deuxième année de la pire chasse aux sorcières de l’histoire des Etats-Unis…”: c’est sur un ton sarcastique que le président américain, qui conteste toute irrégularité, a exprimé sa frustration en cette date anniversaire.
Simple hasard ou volonté d’échapper à un barrage de questions ou d’éviter des réponses contre-productives pour sa stratégie de défense? La conférence de presse commune avec le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg, initialement prévue dans l’après-midi, n’est plus à l’agenda.
Le 17 mai 2017, Robert Mueller, directeur du FBI de 2001 à 2013 sous George W. Bush puis Barack Obama, était nommé pour enquêter, en toute indépendance, sur l’ingérence de la Russie dans l’élection présidentielle et les éventuels liens entre Moscou et l’équipe Trump.
Sa désignation faisait suite au brutal limogeage par le locataire de la Maison Blanche de James Comey, qui était alors chef de la police fédérale et chargé de l’enquête.
C’est un magistrat équipé de pouvoirs similaires, Kenneth Starr, qui avait failli faire tomber le président Bill Clinton dans l’affaire Whitewater, devenue affaire Monica Lewinsky, dans les années 1990.
Depuis un an, M. Mueller a inculpé des ressortissants et entreprises russes pour leur rôle dans une campagne de désinformation sur les réseaux sociaux en 2016 visant à augmenter les chances de victoire de M. Trump.
La Russie nie catégoriquement toute collusion mais les services de renseignement américains estiment que M. Poutine en personne a décidé de la campagne de cyberpropagande.
Quatre membres de la campagne Trump-2016 ont aussi été poursuivis mais pour des délits qui ne sont pas directement liés à une éventuelle collusion, qui n’est toujours pas avérée d’après les documents rendus publics à ce stade.
La stratégie de l’équipe Trump à l’entame de cette deuxième année d’enquête? Prendre l’opinion publique à partie pour réclamer qu’un point final y soit mis rapidement.
“Allons! Ils ont eu une année entière”, tempête Rudy Giuliani, l’un des avocats du président septuagénaire dans un entretien à Politico. “Nous allons faire monter la pression pour que cela se termine, cela n’a que trop duré”.
– “Inutile, dégoûtante et illégale”
“Dans l’intérêt du pays, je pense qu’il est temps de conclure”, affirmait il y a quelques jours le vice-président Mike Pence qui se tient pourtant soigneusement à l’écart de ce dossier depuis le premier jour.
Mais il apparaît peu probable que Robert Mueller, homme austère et méthodique qui s’est jusqu’ici gardé de dévoiler son jeu, modifie son approche ou son calendrier dont personne à Washington n’a d’ailleurs la moindre idée.
Une question intrigue: quelle voie procédurale va-t-il suivre ? Le débat divise les juristes américains.
Rudy Giuliani affirme avoir la certitude que Robert Mueller n’inculpera pas Donald Trump même s’il estime avoir rassemblé suffisamment d’éléments à son encontre. Si c’était effectivement le cas, il suivrait ainsi l’analyse du ministère de la Justice selon lequel la Constitution interdit d’engager des poursuites contre un président en exercice.
Cela ne signifie pas pour autant que son enquête aura été menée en vain: il pourrait en effet choisir de rédiger un rapport détaillé résumant les éléments rassemblés qui pourrait servir de base à une une éventuelle procédure de destitution au Congrès.
Quelle que soit l’issue des investigations, les assauts répétés du 45e président des Etats-Unis contre cette enquête indépendante qu’il a qualifiée jeudi d'”inutile, dégoûtante et illégale”, suscitent de vives critiques.
“Il n’y a pas l’ombre du début d’une preuve accréditant l’idée qu’il s’agit d’une chasse aux sorcières”, a lancé jeudi Chuck Schumer, chef de la minorité démocrate du Sénat.
Mettant en garde contre les “interférences politiques” et “intimidations”, ce dernier a martelé combien cette enquête était cruciale pour “l’intégrité” de la démocratie américaine.
AFP