“L’étau se resserre”, “bientôt le moment de vérité”: malgré les réactions suscitées par le spectaculaire témoignage à charge de son ancien avocat personnel, Donald Trump peut, encore, compter sur le soutien sans faille des dirigeants républicains.
“En quoi cela implique le président?”
La réaction laconique du numéro deux des républicains au Sénat, John Cornyn, marque clairement la ligne suivie depuis mardi par son parti.
Pas question pour les élus, qui affrontent en novembre des élections législatives cruciales, de hérisser le président américain, encore très populaire auprès de la base républicaine. Et qui se targue de pouvoir faire ou défaire une élection d’un seul tweet.
Son ex-avocat Michael Cohen a affirmé mardi sous serment avoir payé — à la demande du candidat Trump — deux femmes en échange de leur silence dans la dernière ligne droite de la campagne présidentielle de 2016.
Quasi-simultanément, son ancien chef de campagne Paul Manafort — un “homme très bien”, selon M. Trump — était déclaré coupable de fraude bancaire et fiscale.
Ancien consultant en Ukraine, M. Manafort est le premier à être jugé lors d’un procès dans le cadre de l’enquête fédérale sur les soupçons de collusion entre l’équipe Trump et Moscou. Même si seules ses finances personnelles étaient en cause, l’ombre du procureur spécial Robert Mueller s’est, avec ce verdict, nettement rapproché du cercle proche de Donald Trump.
“Aucun membre de l’équipe de campagne de Trump en 2016 n’a pour l’instant été inculpé ou condamné pour collusion avec le gouvernement russe”, a pris soin de souligner Lindsey Graham, sénateur républicain.
– Pouvoir mobilisateur –
“Les républicains du Congrès font semblant de ne rien voir avec le président Donald Trump: en ignorant ses mensonges, ses subversions des conventions démocratiques et ses attaques contre les institutions du gouvernement ou, quand cela est impossible, en minimisant ses outrages”, s’est indigné le New York Times dans un éditorial jeudi.
Politique protectionniste dans un parti défendant traditionnellement le marché libre, attitude conciliante envers le président russe Vladimir Poutine dans un parti longtemps méfiant face à l’ennemi de la Guerre froide, liaisons extraconjugales présumées dans un parti où valeurs familiales et religieuses priment: rien de ce que fait Donald Trump ne semble pouvoir provoquer la fronde des républicains.
Son secret? Un pouvoir mobilisateur à l’heure d’une grande polarisation de l’électorat, où “la participation est déterminante”, analyse Christopher Arterton, professeur de sciences politiques à l’université George Washington.
“Tant que son soutien apparaît solide, les dirigeants à Washington continueront de soutenir M. Trump du bout des lèvres (et de se plaindre en privé qu’il est en train de détruire le parti)”, poursuit-il
– Stratégie face aux affaires –
Le président américain compte sur un allié de poids: Fox News, chaîne affichant la plus grosse audience du câble américain dont il ne cesse de chanter les louanges… et qui le lui rend bien.
Mardi soir et pendant 24 heures, plutôt que de parler de Michael Cohen, Fox News a centré sa couverture sur le meurtre de Mollie Tibbetts, une jeune femme, blanche, au sourire lumineux. Le suspect: un Mexicain sans papiers, selon les autorités.
Donald Trump n’a pas parlé non plus de Michael Cohen mardi soir mais a aussi évoqué l’affaire Tibbetts. Puis lui a consacré une vidéo mercredi sur Twitter.
Le républicain Newt Gingrich, allié de M. Trump, a ouvertement reconnu la stratégie.
“Si le nom de Mollie Tibbetts est reconnu partout en octobre, ça ira très mal pour les démocrates”, a-t-il écrit au site politique Axios. “Si on est bloqués par Manafort-Cohen etc. alors les républicains pourraient perdre gros à la Chambre” des représentants.
De quoi faire craindre aux élus républicains tentés de se détourner de Donald Trump “que les électeurs les fuient et que les commentateurs de Fox les attaquent”, avance Christopher Arterton.
“La seule chose qui pourrait faire une vraie différence dans la loyauté des élus républicains, c’est si Robert Mueller présente un rapport très solide et minutieux démontrant une éventuelle collusion” ou que Donald Trump a fait obstruction à la justice, conclut-il.
Source: AFP