L’audition publique du candidat de Donald Trump à la Cour suprême, Brett Kavanaugh, démarre mardi au Sénat américain, où l’attendent des démocrates vent debout à l’idée de voir cette institution cruciale basculer du côté conservateur pour des décennies.
Mais malgré leurs déclarations outrées, le quinquagénaire semble bien parti pour être confirmé grâce à la fine majorité des républicains (51-49) et une poignée de sénateurs démocrates faisant face, en novembre, à des réélections difficiles dans des Etats pro-Trump.
Très attendue, son audition publique démarrera mardi à 09H30 (13H30 GMT) avec sa déclaration et celles d’une trentaine d’intervenants, dont l’ancienne secrétaire d’Etat Condoleezza Rice.
Les questions des sénateurs membres de la commission judiciaire suivront à partir de mercredi. L’audition devrait durer entre trois et quatre jours.
Le Sénat a le dernier mot sur les nominations à vie à la Cour suprême, qui arbitre sur les questions brûlantes: avortement, contrôle des armes, couverture santé, mariage pour tous, poids des syndicats…
Pilier conservateur, Brett Kavanaugh s’est donc appliqué tout l’été à courtiser les sénateurs, et a livré des dizaines de milliers de documents retraçant sa carrière.
– “Menace” ou juge “indépendant” –
Pas suffisant, tonnent les démocrates qui se plaignent de n’avoir pas eu accès à temps à l’ensemble des archives.
Leur chef au Sénat, Chuck Schumer, n’a pas été convaincu par sa rencontre avec le magistrat fin août.
“Le juge Kavanaugh a refusé de dire” s’il estimait que les décisions de la Cour suprême touchant à l’avortement –notamment l’arrêt historique Roe v. Wade qui en 1973 a légalisé l’IVG dans tout le pays — pouvaient être remises en cause.
“Cela devrait faire trembler tout Américain qui croit au droit des femmes à disposer de leur corps”, a-t-il asséné.
“Donald Trump a mené à bien sa menace de nommer un magistrat qui sapera les droits et libertés fondamentales”, renchérit Human Rights Campaign, grande association américaine de défense des droits LGBT.
Ex-conseiller de George W. Bush à la Maison Blanche, Brett Kavanaugh siège depuis une décennie à la cour d’appel de Washington. A la fin des années 1990, il avait participé aux investigations du procureur Kenneth Starr sur la relation extra-conjugale que Bill Clinton avait eue avec Monica Lewinsky.
Brett Kavanaugh a plus tard estimé que les présidents américains ne devraient pas être distraits de leurs importantes fonctions par des poursuites judiciaires. Un point qui inquiète également les démocrates alors que l’enquête du procureur spécial Robert Mueller sur les ingérences russes dans l’élection 2016 fait planer une menace judiciaire sur le magnat de l’immobilier.
En face, le président républicain de la commission, Chuck Grassley, estime que Brett Kavanaugh a toujours “appliqué la loi au pied de la lettre”.
“Un juge doit être indépendant et doit interpréter la loi, et non pas faire la loi”, avait assuré Brett Kavanaugh le 9 juillet, en présence du président américain qui venait d’annoncer sa nomination pour remplacer le juge Anthony Kennedy, après sa retraite.
Alors que ce dernier jouait un rôle de balancier à la Cour suprême, entre quatre conservateurs et quatre progressistes, Brett Kavanaugh devrait l’ancrer fermement du côté conservateur.
– “Fait accompli?” –
S’il est confirmé, ce catholique pratiquant deviendra à 53 ans l’un des plus jeunes magistrats de l’institution, avec Neil Gorsuch (51 ans), lui aussi désigné par Donald Trump en 2017.
La majorité républicaine (51-49) vient d’être temporairement réduite par le décès de John McCain. Mais il sera rapidement remplacé par un autre républicain, qui devrait voter pour Brett Kavanaugh, sauf surprise.
Tous les yeux sont donc tournés vers deux sénatrices républicaines et les trois à cinq démocrates qui pourraient faire basculer le vote.
Aucun ne s’est encore fermement prononcé mais l’une des républicaines pro-avortement, Susan Collins, semble désormais pencher vers le “oui”.
La Maison Blanche apparaît confiante sur une confirmation avant les élections parlementaires du 6 novembre, voire à temps pour la rentrée de la Cour suprême le 1er octobre.
“Si sa nomination est un fait accompli”, les sénateurs démocrates jouant leur mandat dans des Etats remportés par Donald Trump en 2016 “ont tout avantage à voter +oui+ plutôt qu’à souffrir les conséquences” dans les urnes, analyse Geoffrey Skelley, politologue à l’université de Virginie.
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Source: AFP