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Droit et éthique : Manassa, lisez le juge Kéba Mbaye !

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Extrait de la Leçon inaugurale donnée par le Juge Kéba Mbaye à l’Université Cheikh Anta Diop

L’éthique, aujourd’hui

Il faut que chacun de nous enterre ses ambitions personnelles et oublie les vieilles querelles, pour “se ceindre les reins comme un vaillant homme”, au nom de l’intérêt exclusif de  la nation.

L’objectif permanent devra être la consolidation de la démocratie… qui ne laissera plus le moindre doute sur la sincérité des résultats des suffrages.

Il faut aussi, que gouvernants et gouvernés, membres ou non des partis politiques, acceptent sans arrière-pensée, le principe de l’alternance à la tête des affaires de l’Etat. Ces affaires ne sont le bien de personne ; elles appartiennent au peuple qui en délègue la gestion temporaire, non à un maître comme on a souvent tendance à le penser sur ce continent, mais à un serviteur ».

J’avais ajouté : « Déterminons-nous à débusquer et à écarter sans complaisance, au besoin à punir sans faiblesse ceux qui ruinent ce pays ou le desservent : les corrompus et les antinationaux, les roublards et les paresseux. Cultivons l’honnêteté et le courage au travail.

Que chacun, au poste où il est, du ministre au planton, du chef d’entreprise au manœuvre, considère comme reposant sur ses seules épaules, le destin de la nation. Inventons un système qui ne récompensera désormais que la compétence, le travail et la probité ».

Debout pour le travail et pour l’éthique avant qu’il ne soit trop tard. Debout en nous rappelant devant chaque choix, chaque action, la pensée d’Emmanuel Kant. Demandons-nous chaque fois que nous sommes tentés d’avoir un comportement non éthique, ce que serait la vie si chacun faisait comme nous. Demandons-nous ce que serait une société de délateurs, de profiteurs, de voleurs, de corrupteurs et de corrompus, d’indisciplinés, d’insouciants, d’égoïstes, de fraudeurs ; la liste est longue mais la réponse est une : ce serait une société vouée à l’échec et peut-être à la déchéance et à la misère matérielle et intellectuelle. Alors, évitons de tels comportements.

« L’Afrique subsaharienne, 700 millions d’habitants, a jusqu’ici raté son développement économique et social parce que les gouvernements qui se sont succédés à la tête des pays qui la composent n’ont pas su éduquer et soigner leurs peuples pour les mettre utilement au travail …. »

Le travail et l’éthique sont les seuls outils du développement véritable. Nous devons les ériger en « principe premier » si nous voulons sortir notre pays de la misère. Il n’y a pas d’autres voies.

Plutôt que d’avoir de grands politiciens, cherchons à avoir de grands médecins, de grands ingénieurs, de grands professeurs, de grands spécialistes de l’économie et des finances et même des savants. Les pays les plus puissants du monde ne sont pas ceux où la politique est reine. C’est plutôt le contraire.

J’ai la conviction très nette que de même que l’on est d’accord pour affirmer que la liberté et le pouvoir doivent être limités par les droits des autres, de même, l’éthique doit être constituée comme la mesure obligatoire de l’exercice de tout droit, de toute liberté et de tout pouvoir.

Mais il faut pour que survienne le règne de l’éthique deux conditions essentielles : D’abord, il faut une justice forte et respectée servie par des Magistrats bien traités et indépendants.

La deuxième condition du règne de l’éthique c’est l’éducation. Il est indispensable que nos enfants et nos petits enfants bénéficient d’une bonne éducation.

Que nos étudiants entrent à l’Université comme on entre dans les ordres ou au « Daara » et que les meilleurs soient mis dans les conditions optimales pour devenir des cadres de haut niveau ou même pourquoi pas, comme je le disais tout à l’heure, des savants.

Bien sûr, cela nécessite la réhabilitation de la fonction technique au détriment de la fonction politicienne. Nous sommes bien ici, dans cette salle, au lieu qu’il faut, pour le clamer.

Droit et éthique Manassa lisez le juge Kéba Mbaye

Dakar, le 14 décembre 2005

Source: L’Aube

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