Les conflits intercommunautaires au Mali résultent de la défaillance du système de défense économique, civile et militaire. Nous essaierons de vous développer ces trois éléments qui constituent la base de la sécurité nationale et la cohésion sociale avec des personnes rencontrées dans ce sens.
Le mouvement démocratique, issu des événements de mars 1991, a montré ses limites avec son système de gouvernance aujourd’hui défaillant à tous les niveaux de la vie de la nation. Il s’est écroulé au fil des années sous le poids de la corruption, de la démagogie et de la dépravation des mœurs. Le pays s’est ainsi vidé de ses valeurs intrinsèques mettant en péril la sécurité nationale.
Depuis 2012, les conflits intercommunautaires se multiplient, avec l’occupation du septentrion de notre pays par les jihadistes et les narcotrafiquants. Cette situation a nourri des velléités sécessionnistes chez certains et l’obsession de dominer leurs semblables pour d’autres. Avec un espace tant convoité pour ses ressources naturelles, l’ennemi a eu le temps de se glisser parmi nous. Nous sommes désormais dans une guerre asymétrique alimentée par des puissances étrangères.
Alors, face à de tels défis politico-géostratégiques, le diagnostic met en cause notre système de gouvernance à trois niveaux, à savoir la défense économique, la défense civile et la défense militaire. La défense économique, élément essentiel dans la stabilité d’un pays, est aussi incontestablement un mécanisme de résolution des conflits intercommunautaires. Selon le Pr. Abdoulaye Niang, PhD en économie, le Mali étant un pays d’agriculture par excellence, il faut impérativement passer par l’aménagement du territoire national.
Face aux défis climatiques avec de mauvaises pluviométries, l’agriculture ordinaire ne permet plus, estime-t-il, de garantir l’autosuffisance alimentaire. D’autant que de nouveaux systèmes d’exploitation agricoles expérimentés ont permis d’avoir sur une superficie de 4 hectares le même rendement que sur une superficie de 40 hectares d’exploitation connus de nos pères, analyse-t-il. Les quatre hectares de terre aménagés prennent en charge 12 foyers dans un système de co-entreprise agricole. Ce même modèle permet aux éleveurs de bétail d’avoir plus d’espace avec moins d’interactions avec les producteurs de céréales, estime le Pr. Niang.
Il convient d’admettre qu’une économie solide met à l’abri les citoyens à la convergence vers l’économie criminelle (le trafic de drogue, des armes et des personnes). Privilégier à l’occasion la consommation des produits locaux facilite également les échanges commerciaux sur le territoire national, préconise-t-il.
Selon le Pr. Abdoulaye Niang, la défense civile, elle, est tellement importante qu’il suffit de la minimiser pour détruire des générations entières et mettre en péril l’avenir d’une nation toute entière. Elle repose sur l’éducation à travers laquelle l’histoire d’un peuple, d’une civilisation, des valeurs sociétales et l’amour de la patrie est enseignée et défendue. Quand le système d’éducatif ne répond plus aux besoins des citoyens, des réformes s’imposent ou c’est à l’effondrement de la nation qu’on assiste avec une génération d’irresponsables en charge de la destinée du peuple.
En d’autres termes, il faut responsabiliser les parents dans l’éducation de leurs enfants. S’il le faut, les soumettre à la punition pour les comportements délictuels de leurs enfants mineurs sans complaisance. Car la construction d’une nation commence dans la famille, viennent ensuite le quartier et le village ou la ville. Quand les ingrédients sont réunis pour amorcer ce processus, la paix et la cohésion sociale ne sont plus un souci pour la population, se dit convaincu le Pr. Abdoulaye Niang.
À cela, il faut ajouter la justice qui, pour le cas du Mali, est la cause de la plupart des conflits intercommunautaires car mal rendue du fait de la corruption. Au lieu d’apaiser les tensions en disant le droit, elle les active en rendant le verdict à la faveur du plus offrant. Une justice indépendante de toute pression extérieure et débarrassée de ces agents véreux contribue, selon lui, à la stabilité, et consolide les rapports entre l’autorité et la population.
La défense militaire assure la souveraineté d’un pays vis-à-vis de ses voisins, de la violation de son espace territorial et la sécurité des personnes et de leurs biens. On peut aujourd’hui dire sans se tromper que le Mali n’est pas un bon exemple en matière de défense militaire par le favoritisme dans le recrutement des hommes et femmes dans les rangs de nos forces armées et de sécurité.
Par ailleurs, dans le contexte sécuritaire où nous sommes, le renseignement est primordial. Pour ce faire, il faut s’appuyer sur les réservistes issus du Service National des Jeunes (SNJ) et qui travaillent dans tous les secteurs de l’administration.
Selon Ousmane Abou Diallo dit Boubou, qui appartient au premier contingent du Service national des jeunes en 1985, actuellement membre de la commission d’opérationnalisation pour la reprise du service national des jeunes SNJ, nouvelle formule, «non seulement, les sortants du SNJ ont une formation de base dans la défense, ils peuvent aussi faire la médiation entre les communautés en cas de conflit, renseigner les autorités sur les menaces qui planent sur la population afin que des mesures soient prises pour éradiquer le mal à la source».
On peut donc déduire que l’arrêt du SNJ en avril 1991 a affaibli la vigilance de l’Etat parce que quand le mal prend racine dans la population, seuls ceux qui cohabitent avec les malfrats peuvent aider les forces armées et de sécurité à s’en défaire.
Aujourd’hui, les mécanismes de résolutions des conflits intercommunautaires au Mali se trouvent dans l’application stricte des différents paramètres de la défense économique, civile et militaire dans la rigueur avec les moyens qu’il faut.
Gabriel TIENOU
Source: Le Reporter