Après de longues et dures épreuves communes, plusieurs années de compagnonnage d’armes, depuis Gao jusqu’aux montagnes de Teghargar (au nord du Mali), les militaires tchadiens et maliens ont des moments de braise en partage. Nos armées sont toutes les deux patriotiques et ne manquent donc pas de fougue militaire, de rage de vaincre les assaillants, de les neutraliser ou de les réduire en prisonniers.
Ce n’est donc pas surprenant que les mêmes causes produisent les mêmes effets (défaites militaires suivies de limogeages), dans la vie et la gestion des bataillons, ou la gouvernance militaire, au Tchad et au Mali. Les évènements récents qui se sont passés au Mali et au Tchad (Dangdala près de Ngouboua et Dioura commune de Karéri) montrent cette communauté de destin, et pas seulement.
Les limogeages de la hiérarchie militaire au Mali traduisent un sursaut sans précédent marqué au fer rouge, l’expression d’une prise de conscience tardive, mais qui était devenue inéluctable. Le changement à la tête des armées du Tchad a eu lieu vendredi soir [22 mars 2019], moins de 24 heures après une attaque de Boko Haram dans le sud-ouest du pays, qui a coûté la vie à 23 soldats tchadiens. Brahim Seid Mahamat a été limogé en raison de la mort des 23 soldats et celle de quatre autres, dont les corps ont été retrouvés après la disparition de leur hélicoptère dans le nord du pays, rapporte la presse internationale. Une situation jumelle s’était produite au Mali, quatre jours avant, avec l’attaque du camp de Dioura le 17 mars, par la principale alliance jihadiste du Sahel liée à Al-Qaïda, « le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans », dirigé par le chef radical touareg malien Iyad Ag Ghaly, faisant 23 morts, selon la source officielle. Ce qui a longtemps été une différence entre troupes maliennes et tchadiennes, réside sans nul doute, dans la gouvernance militaire.
L’attitude de la hiérarchie et du commandement place les deux armées aux antipodes. Mais pour une fois, le chef suprême des armées du Mali, a fait un effort pour ressembler à son homologue Idriss Deby Itno, en donnant un large coup de balaie dans l’écurie. Le Conseil des Ministres du dimanche 24 mars a pris l’allure d’un conseil de guerre, assorti des limogeages, la nomination de nouveaux Chef d’Etat-major Général des Armées (Général de Division Abdoulaye COULIBALY), Chef d’Etat-major Général Adjoint des Armées (Général de Brigade Souleymane BAMBA), Chef d’Etat-major de l’Armée de Terre (Général de Brigade Keba SANGARE), Chef d’Etat-major Adjoint de l’Armée de Terre (Colonel-Major Oumar DIARRA), Chef d’Etat-major de l’Armée de l’Air (Général de Brigade Daouda DEMBELE), Chef d’Etat-major Adjoint de l’Armée de l’Air (Colonel-major Ismael WAGUE), Directeur de la Sécurité Militaire (Colonel-major Boukary KODIO), Directeur Adjoint de la Sécurité Militaire ( Colonel Salif MALLE). « Que nous ne soyons plus surpris nulle part. Messieurs les chefs militaires, je vous y engage instamment en le nom de la patrie, nous sommes en guerre, aucune négligence, aucune négligence ne saurait plus être tolérée, en tout cas, je ne la tolérerai pas pour la vie de nos enfants et de la patrie », déclarait le Président IBK, le jeudi 21 mars (quatre jours après l’attaque de Dioura). Que nul ne vient plus nous surprendre en train de faire du thé ou en passivité à un check point. Cela ne sera pas tolérable. En tous cas, cela ne sera plus admis. C’est clair ! Parole du Président Ibrahim Boubacar Kéita. C’est dit, le temps semble être fini du président pleurnichard, celui des actes a donc commencé. Des actes, Monsieur le Président, des actes ! Pour que cesse de couler, le sang de nos braves soldats maliens, que prenne fin le carnage des défenseurs de la patrie, et que s’ouvre la sécurité pour les Maliens des villes et des campagnes, et que s’amorce l’émergence de notre pays.
B. Daou
Le Républicain