Cinq jours après l’assassinat sanglant de populations civiles dans les villages peuhls d’Ogossagou et de Koulogon de Bankass, le bilan macabre s’est alourdi à 174 morts. Dont de nombreux enfants en bas âges, des femmes enceintes et de vieilles personnes. Comme si cela ne suffisait pas, les assaillants habillés de tenue traditionnelle «Donso» et lourdement armés se sont aussi attaqués aux animaux et ont brûlé les greniers et autres biens.
Un modus operandi qui fait penser quasiment à une épuration ethnique, tant l’attaque bien planifiée vivait uniquement la communauté peuhle de cette localité pour en faire le plus de victimes. Ce, avec l’effet de dissuader les éventuels rescapés d’y rester.
En réaction, le Gouvernement malien à l’issue d’un Conseil de ministres extraordinaire, a pris la décision de dissoudre la milice d’autodéfense Dogon Dan Amassagou. Serait-elle alors à l’origine de cette hécatombe ? Tout en déplorant les attaques, la milice d’autodéfense Dogon Dan Amassagou n’a pas tardé de démentir d’en être l’auteur.
L’Association politico-culturelle Ginna Dogon ayant aussi dénoncé ces barbaries, s’est insurgée contre la dissolution de la milice Dan Amassagou. Nous émettons ardemment le vœu que les enquêtes disculperaient la milice Dogon Dan Amassagou.
Le cas contraire, on se retrouverait dans une situation inédite dans le Mali contemporain où des composantes d’une communauté malienne (Dogon) planifient une épuration ethnique à l’encontre d’une autre (Peuhle). Dans le seul dessein d’être la seule occupante d’une aire géographique qu’elles ont toujours partagée ? Pour qui connaît l’histoire de ce terroir commun, cela va au-delà de l’absurdité.
Dans la région de Mopti, les communautés Peuhles et Dogon ont toujours vécu depuis des siècles dans le Senno et le Kounari (des régions historiques et naturelles). Cette coexistence pacifique ne s’est pourtant pas faite non sans difficultés à partir du moment où l’une est nomade pasteur et l’autre sédentaire agriculteur. Parfois et inévitablement il y a eu quelques difficultés liées à l’occupation de l’espace commun. Peuhls et Dogons étaient jusque-là parvenus à surmonter ces écueils dus à la promiscuité pour vivre en symbiose et dans la complémentarité.
Bien avant l’arrivée de la monnaie scripturale, les deux communautés troquaient leurs produits. Mieux, en raison de la multiplicité de leurs langues, les Dogons ont sciemment adopté la langue peuhle pour se faire comprendre entre eux. Encore que depuis fort longtemps, les deux communautés ont scellé des liens de mariage. Comment peuvent-elles en arriver à un tel point de rupture? Non !
A l’une comme à l’autre, les suppôts de Satan ont fait suffisamment de mal. Vivement le sursaut commun pour extirper de leurs rangs l’ennemi commun ! Cela par la raison et non la passion !
Gaoussou M. Traoré
Le Challenger