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Conseil de sécurité des Nations Unies :Intervention de SE Soumeylou Boubey Maiga Premier Ministre de la Républicain Du Mali

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Monsieur le Président, 
Distingués Membres du Conseil,

Au nom de Son Excellence Monsieur Ibrahim Boubacar KEITA, Président de la République du Mali, ma délégation et moi-même vous adressons, Monsieur le Président du Conseil, nos chaleureuses félicitations pour l’accession de votre pays, la France à la Présidence du Conseil de Sécurité pour ce mois de Mars 2019. Soyez assuré de la pleine coopération de mon pays à cet égard.

Je voudrais également offrir mes vœux de plein succès à l’Afrique du Sud, l’Indonésie, la République Dominicaine, la Belgique et l’Allemagne dans l’accomplissement de leur 
mandat de nouveaux membres du Conseil.

Je saisis aussi cette occasion pour féliciter et remercier les délégations de la Bolivie, de l’Éthiopie, du Kazakhstan, de la Suède et des Pays-Bas pour leur contribution à la recherche de la paix et de la sécurité internationale.

Je voudrais saisir le privilège que m’offre la présente séance pour transmettre à tous les membres du Conseil de Sécurité, au Secrétaire Général des Nations Unies, Monsieur Antonio Guterres, et à l’ensemble du personnel des Nations Unies en charge du Dossier du Mali, la profonde reconnaissance du Président de la République du Mali, Son Excellence Monsieur Ibrahim Boubacar Kéita, du Gouvernement et du Peuple Maliens pour leur engagement constant en faveur de la paix et de la sécurité au Mali, au Sahel et dans le reste du monde.

Ma délégation et le Peuple Maliens tenons à exprimer toute notre compassion et présentons aux pays contributeurs de troupes au Mali et à la famille des Nations Unies, toutes nos condoléances pour la perte des soldats de la paix tombés avec honneur sous les balles des ennemis de la paix.

Monsieur le Président, 
Distingués Membres du Conseil,

Conformément au paragraphe 6 de la Résolution 2423 (2018) du Conseil de Sécurité, et en référence au paragraphe 4 de la Résolution et des éléments d’appréciation des résultats obtenus développés dans le Pacte pour la paix, je voudrais vous rendre compte des progrès réalisés par le Gouvernement du Mali six mois après que dans sa prestation de serment le Président Ibrahim Boubacar KEITA ait pris l’engagement de maintenir résolument le Mali sur la voie de sortie de crise.

Ma délégation prend acte du rapport du Secrétaire Général sous examen et félicite Monsieur Jean Pierre Lacroix, Secrétaire Général Adjoint aux Opérations de Maintien de la Paix pour la clarté de sa présentation et pour ses mises à jour sur les développements dans mon pays. Nous prenons également bonne note des observations ainsi que des attentes fortes et pressantes formulées dans le rapport.
Je voudrais tout d’abord assurer les membres du Conseil que le Président de la République du Mali, le Gouvernement du Mali, la Coordination des Mouvements de l’Azawad, la Plateforme des Mouvements du 14 juin 2014 et tous les groupes associés à l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali issu du processus d’Alger restent totalement engagés pour la mise en œuvre diligente et inclusive de ses dispositions.

L’établissement d’un Ministère en charge de la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali a permis de consolider la coopération entre le Gouvernement et les Mouvements signataires. Il a également favorisé l’inclusion de tous les autres groupes ayant accepté l’Accord. Tous se reconnaissent aujourd’hui en tant que parties maliennes. La mention faite de cette cohésion dans le rapport sous examen est un motif de satisfaction pour ma délégation.

Monsieur le Président, 
Distingués Membres du Conseil,

Comme le Conseil le sait certainement, l’élection présidentielle s’est déroulée les 29 juillet et 12 août 2018 dans un climat apaisé. Le Président Ibrahim Boubacar Kéita, qui a été réélu avec plus de 67% des suffrages exprimés, a prêté serment le 4 septembre 2018. Je tiens à relever la remarquable contribution au bon déroulement du processus électoral des Mouvements signataires et ceux associés à L’Accord. Ces parties maliennes ont joué un rôle important dans l’instauration d’un climat apaisé à travers la sécurisation du processus partout où elles se trouvaient. Leur implication positive montre à suffisance leur engagement fort aux cotés du Gouvernement, dans la mise en œuvre des dispositions de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation.

Je voudrais aussi reconnaitre le rôle important que la MINUSMA a joué tout au long du processus électoral. La Mission des Nations Unies nous a apporté un soutien financier, logistique et technique indispensable à la réussite des opérations de votes et à l’apaisement du climat électoral. Sa coopération avec les organes de gestion du processus électoral, sa participation à la sécurisation des opérations de vote et la formation dispensée par elle aux différents acteurs politiques et sociaux sur la prévention des violences liées aux élections ont fortement contribué à la réussite de la présidentielle.

Ma délégation saisit donc l’opportunité du rapport pour rendre un hommage très appuyé au Représentant Spécial du Secrétaire Général, Monsieur Mahamat Saleh Annadif, pour son rôle exemplaire et sa contribution à la tenue de l’élection présidentielle apaisée dans mon pays.

Monsieur le Président, 
Distingués Membres du Conseil,

Depuis sa mise en place, le Gouvernement a accéléré la mise en œuvre des dispositions de l’Accord pour la paix et la Réconciliation, notamment en ce qui concerne les réformes institutionnelles et la mise en œuvre des arrangements sécuritaires. A cet égard, le chef de l’Etat nous a instruit d’engager un processus consensuel et inclusif de révision constitutionnelle et de réformes institutionnelles.

Le processus qui doit aboutir à l’adoption d’une nouvelle Constitution à travers un Référendum a débuté avec l’installation d’un Comité d’Experts pour la réforme de la Constitution qui a commencé ses travaux le 16 février dernier. Ce Comité est chargé de faire la revue des projets de révision constitutionnelle élaborés par le passé, des dispositions de l’Accord pour la paix et la Réconciliation. Il doit aussi tenir compte de l’évolution de la vie politique malienne et conduire de larges consultations au plan national.

En soutien au travail des Experts, le Gouvernement du Mali a mis sur pied un Cadre de Concertation National qui intègre les partis politiques, les mouvements signataires et associés et les organisations de la société civile.

Enfin, pour renforcer le caractère consensuel de la révision constitutionnelle, le Président de la République a récemment initié des rencontres avec tous les leaders de la majorité et de l’opposition en vue de recueillir leur analyse de la situation nationale et leurs propositions pour une vie politique et sociale animée autour d’une vision commune des grands problèmes de notre nation.

Monsieur le Président, 
Distingués Membres du Conseil,

En même temps que le Gouvernement conduit les réformes constitutionnelles et institutionnelles, il accélère la mise en œuvre du processus de décentralisation et de la régionalisation.

Le Code des Collectivités et la loi portant conditions de la libre administration des 
collectivités territoriales promulgués le 2 octobre 2017 ont établi des bases solides pour la réforme administrative et la décentralisation. Ces lois déterminent l’élection des Conseillers municipaux, de cercles et régionaux au suffrage universel direct ainsi que le transfert de 30% des recettes budgétaires de l’Etat aux collectivités territoriales.

Dix neuf (19) décrets fixant le détail des compétences transférées de l’Etat aux collectivités territoriales ont été adoptés. La mise en œuvre de ces mesures susmentionnées a permis de porter le taux de transfert à plus de 21% des recettes budgétaires en 2019. Ainsi, le montant des ressources transférées a été doublé entre 2015 et 2019 avec une augmentation de plus de 190 millions de dollars.
En additionnant les ressources et les crédits inscrits en faveur des administrations déconcentrées de l’Etat, dont le transfert aux collectivités territoriales est envisagé dans le cadre de l’Accord, le taux de transfert sera même supérieur au 30% prescrits.
Le Gouvernement a par ailleurs adopté le 20 février 2019 le Décret sur les modalités de transfert des services déconcentrés de l’Etat aux collectivités territoriales, conformément à l’article 14 de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation. Ce transfert permet de fournir les services sociaux de base aux populations, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’eau et de l’assainissement. Il créée également les conditions du développement régional, notamment dans les domaines de l’agriculture, de la fiscalité locale, de l’emploi des jeunes et de l’énergie.

Je me réjouis que le rapport sous examen du Secrétaire général ait constaté que le pourcentage des Administrateurs civils et autres représentants de l’État dans les régions du Nord et du Centre a connu une légère augmentation au cours des six derniers mois.

S’agissant des autorités intérimaires, leur présence dans toutes les Régions du Nord du Mali permet d’encadrer la fourniture des services sociaux de base aux populations.
Pour l’installation et le fonctionnement de ces autorités intérimaires, le budget d’Etat a mobilisé un peu plus de 45 millions de dollars.

Monsieur le président,
Distingués Membres du Conseil,
Ces acquis, bien qu’encourageants, ne sauraient nous faire perdre de vue l’extrême volatilité de l’environnement sécuritaire dans lequel s’exerce l’action des autorités maliennes. La menace terroriste continue de s’étendre du Nord au Centre et rend plus compliquée la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation. Les groupes terroristes suscitent, entretiennent et exacerbent les violences intercommunautaires en ressuscitant des litiges anciens et quelques rivalités séculaires.
Pour contrer les nouvelles menaces, le Gouvernement du Mali a élaboré et mis en oeuvre un Plan de Sécurisation Intégrée des Régions du Centre (PSIRC), comportant un renforcement des dispositifs de sécurité à travers notamment le déploiement pour l’année 2018, de 13,000 hommes et la création de 16 nouveaux postes de sécurité, ainsi que des actions de mobilisation sociale, de travaux à haute intensité de main d’œuvre, d’activités génératrices de revenus en faveur des femmes et des jeunes, et des programmes de communication visant à promouvoir la cohésion sociale.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Le Gouvernement a lancé le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) accéléré le 6 novembre 2018, à Gao, Tombouctou et Kidal. Cette opération concerne les éléments du Mécanisme Opérationnel Conjoint. Elle a permis l’enregistrement et le désarmement de plus de 1.400 combattants sur 1.600 prévus, tous issus des deux Mouvements signataires de l’Accord et des autres groupes armés ayant accepté l’Accord. Ce processus se poursuivra pour accueillir 417 ex-combattants supplémentaires.
Ces soldats suivront une formation sous les auspices du Ministère de la défense, de la MINUSMA et de l’Union Européenne. A la fin de leur mise à niveau, les combattants seront affectés à la sécurisation de la suite du processus de DDR dans un environnement que le Conseil sait difficile.
Entre février 2018 et mars 2019, plus de 74.405 combattants ont été préenregistrés par la Commission DDR, parmi lesquels 23.427 ont des armes. 17.000 ont rempli les critères d’éligibilité pour participer au processus de DDR.
Je salue içi la collaboration de la MINUSMA qui a fortement contribué au succès de ce processus ainsi que la Banque Mondiale qui a mis à disposition 15 millions de dollars pour la réintégration des 4000 premiers ex-combattants à démobiliser.
Nous avons, parallèlement, entrepris dans le Centre un programme de désarmement pour la réduction de la violence entre les communautés au terme duquel 1.500 éléments ont été recensés et devraient rejoindre dans les semaines à venir le camp de Soufouroulaye près de Mopti pour passer différents tests.
Monsieur le Président
Distingués membres du Conseil
Concernant le processus de réforme du secteur de la sécurité, le Gouvernement a organisé à Bamako du 12 au 14 décembre 2018 un atelier de haut niveau, au cours duquel un consensus a été trouvé avec les Mouvements signataires, particulièrement sur les concepts d’armée reconstituée, d’unités spéciales et de police territoriale.
Conformément aux dispositions de l’Accord, le Gouvernement a rappelé les anciens éléments des Forces Armées maliennes. A ce jour, 505 parmi eux ont réintégré les forces de défense et de sécurité. La question des quotas continue à faire l’objet de discussions avec les mouvements signataires.
Grâce au soutien de l’Union Européenne, de EUCAP Sahel Mali et EUTM, les forces de défense et de sécurité maliennes continuent de renforcer leurs capacités tout en accentuant leur déploiement dans le Nord. Le Gouvernement a d’autre part décidé de la création d’un corps de gardes-frontières en vue d’une meilleure surveillance des sept frontières du Mali.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Nous avons également fait des efforts pour créer un environnement favorable au développement et à l’action humanitaire. En dépit de conditions difficiles, le Gouvernement a maintenu une croissance économique de 5.3% et réduit le déficit budgétaire de 2.9% en 2017 à 2.5% en 2018.
S’agissant de la mise en œuvre de la stratégie spécifique de développement des régions du Nord, il est à signaler que l’instrument de sa mise en œuvre est le Fonds de Développement Durable (FDD). Dans le cadre de l’opérationnalisation du FDD, les textes relatifs à sa création, à son organisation et à ses modalités de gestion ainsi que ceux portant création et fonctionnement de ses comités de pilotage et de gestion ont tous été adoptés entre Février et Novembre 2018.
En attendant l’opérationnalisation effective du Fonds de développement Durable, le Gouvernement a mobilisé 20 millions de dollars pour financer les dépenses prioritaires urgentes dans les régions de Kidal, Ménaka, Tombouctou et Gao.

Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Les valeurs de liberté, de dignité et de solidarité sont chères au Peuple Malien et constituent notre boussole morale. C’est l’attachement à ces valeurs qui explique que pendant plus de cinq décennies notre pays a participé à des missions de maintien de la paix en Afrique et hors du continent. De 1960 à tout récemment, le Mali a fourni plus de 2000 hommes – militaires – gendarmes – policiers, qui ont été déployés du Congo à Haiti en passant par l’Angola, le Burundi, la Centrafrique, le Darfour, le Libéria, le Rwanda et la Sierra Leone.
Pendant plus d’un demi-siècle, notre pays a répondu sans hésitation et sans calcul chaque fois qu’il a été sollicité, que ce soit pour ramener la paix dans des territoires en conflit, pour aider à un retour à la normale et à la restauration de la démocratie, pour contribuer à la reconstitution de la cohésion nationale, ou pour participer au rétablissement du dialogue entre des communautés déchirées.
Au cours de nos interventions, nous avons accompli ce que nous considérons comme notre devoir sacré en tant que nation éprise de paix et de concorde. Par un juste et éloquent retour de l’Histoire, nous avons eu droit à un engagement total de la part des nations amies quand nous avons été, à notre tour, confrontés à une terrible tragédie. Pour la libération des régions du Nord, pour le rétablissement de son intégrité territoriale, pour la sécurisation de ses populations, notre pays a bénéficié d’un solidarité internationale d’une ampleur exceptionnelle.
Cette solidarité pour laquelle nous ne remercierons jamais assez nos amis et partenaires s’est encore manifestée tout récemment quand notre pays a subi en moins d’une semaine deux terribles tragédies qui ont donné à la barbarie un visage que nous ne connaissions pas. Le 17 Mars, vingt trois de nos soldats ont succombé lors de l’attaque de leur camp par des terroristes dans le village de Dioura. Le 23 Mars le comble de l’horreur a été atteint avec le massacre de plus de cent trente habitants du village d’Ogossagou. Ces évènements soulignent une fois de plus la mobilisation et la vigilance extrême qui doivent être observées dans le combat que nous menons pour sauvegarder l’avenir de notre nation.
Les évènements d’Ogossagou et de Dioura ont suscité dans le monde entier une impressionnante vague de compassion et de solidarité à notre endroit. Ils ont révélé à nos compatriotes qu’ils ne sont pas abandonnés dans l’épreuve. Tous les citoyens, toutes les personnalités attachés à la restauration de la paix et de la sécurité dans notre pays se sont en ces circonstances déclarés être Maliens selon la touchante formule du Secrétaire Général des Nations Unies.

Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Je voudrais exprimer au nom de Son Excellence Monsieur le Président Ibrahim Boubacar Keita, au nom du Peuple Malien et au nom du Gouvernement du Mali notre gratitude émue pour toutes les marques de sympathie qui nous ont été prodiguées. A nos amis et à nos partenaires, je voudrais réitérer notre détermination à poursuivre sans faiblesse le combat contre les groupes terroristes et les extremismes, contre tous ces ennemis sans visage ou aux milles visages qui n’ont de cesse de vouloir détruire nos institutions démocratiques et républicaines, la cohésion et le vivre ensemble séculaire de nos sociétés.
Je voudrais donner l’assurance que nous rechercherons par tous les moyens les auteurs et complices des différents massacres pour les traduire devant les juridictions compétentes.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Les Nations Unies figurent parmi les partenaires qui dès les premières heures de la crise de 2012, se sont impliqués dans la sauvegarde de notre pays. Le Conseil a maintes fois réaffirmé sa conviction que le rétablissement et la préservation de la paix dans le monde, la gestion de la sécurité globale de la planète font apparaître de nouveaux impératifs de solidarité et d’entraide auxquels nulle nation ne devrait se soustraire.
C’est pourquoi je voudrai souligner avec force l’importance que toutes les parties maliennes attachent au maintien de la MINUSMA et au renforcement des capacités de celle-ci afin qu’elle continue à conforter le processus de paix en cours. Les initiatives à réduire le budget, à réduire ou à reconfigurer le mandat, sont porteuses de risque de remise en cause des acquis fragiles.
En effet pour la première fois depuis sa signature, l’Accord pour la Paix et la Réconciliation connait des avancées significatives et une véritable dynamique s’est enclenchée. La pérennisation de cette dynamique nécessite tout le soutien de la MINUSMA qui travaille sans cesse auprès des groupes signataires et ceux impliqués dans la mise en œuvre de l’Accord pour faciliter la mise en place du DDR et des autorités intérimaires entre autres.
La MINUSMA fournit aujourd’hui des services vitaux aux populations les plus fragiles en attendant que la reconstruction de l’Etat malien soit effective et joue donc aussi à ce titre un rôle déterminant dans la stabilisation du pays.
Une réduction des moyens ou des missions de la MINUSMA aura donc des conséquences extrêmement négatives sur la situation économique, qui aboutira au final au renforcement des groupes terroristes et à une nouvelle dégradation de la situation. De même, bien que la MINUSMA ne prenne pas directement part aux actions antiterroristes elle joue un rôle essentiel en soutien aux forces qui assurent cette mission, à commencer par la Force Barkhane et la Force Conjointe du G5-Sahel, dont elle est le complément indispensable.
Les groupes terroristes ont connu des revers importants ces derniers mois. Ces succès ouvrent une fenêtre d’opportunité contre les groupes terroristes et plaident pour un maintien en l’état de la MINUSMA afin de l’exploiter pleinement.
Plus largement, toutes les forces doivent être mobilisées pour empêcher le transfert vers notre pays de combattants étrangers terroristes qui aboutira au renforcement de la menace terroriste dans le Sahel et son extension vers de nouvelles zones, à commencer par les pays du Golfe de Guinée comme le Ghana, le Togo, le Benin ou la Côte d’Ivoire.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Le Mali se réjouit de l’extrême attention portée par le Conseil de Sécurité à l’évolution de la situation dans notre pays. C’est justement cette constance du Conseil à notre égard qui nous incite aujourd’hui à soumettre à votre perspicacité nos préoccupations sur la situation sécuritaire dans la zone sahélo-saharienne.
Le Président de la République, Son Excellence Ibrahim Boubacar Keita a souligné à plusieurs reprises et en des circonstances solennelles que le Mali est engagé en première ligne et est en mission du monde dans le combat contre le terrorisme dans le Sahel. Notre pays fait en effet barrage à un danger terroriste dont il convient de ne sous-estimer ni la dimension, ni la capacité de se projeter au delà même des frontières de notre continent.
C’est pourquoi le Chef de l’Etat a souhaité que ne faiblisse pas l’attention des partenaires à l’égard du Mali. Lui même s’est investi lors de son mandat de Président en exercice du G5 Sahel pour accélérer l’opérationnalisation de la Force conjointe de cette organisation. Aujourd’hui, les résultats déjà obtenus nécessitent d’être vigoureusement soutenus par tous nos partenaires à travers la mise à disposition effective des soutiens annoncés lors de la conférence de Nouakchott du 06 décembre 2018.

Tout en réitérant la gratitude du Mali pour le très significatif élan de solidarité qui s’est manifesté lors de cet évènement, je réitère l’appel des Chefs d’Etat du G5 Sahel pour un financement prévisible et pérenne des activités de la Force conjointe de l’organisation.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Les récents évènements ont démontré que les risques et les menaces que font peser les groupes terroristes et criminels sont désormais non seulement transfrontaliers, mais aussi multidimensionnels et dynamiques. Ces risques et ces menaces se manifestent également sur un espace continu qui dépasse largement le territoire malien. Or, les mesures qui sont prises pour les neutraliser voient leur efficacité réduite par les limites intrinsèques de l’architecture internationale actuelle en matière de paix et de sécurité.
Nous ne devons, en effet pas ignorer le fait que l’expansion prise par les groupes terroristes et criminels ne menace pas uniquement la zone sahélo-saharienne. La menace pourrait se projeter dans un très court terme dans toute la région ouest-africaine. Son traitement solidaire intéresse donc dès maintenant les Etats de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) non membres du G5 Sahel. Par conséquent, le Mali souhaite voir le Conseil de Sécurité étudier la nécessité d’impliquer ces Etats aussi bien dans le renforcement capacitaire de la MINUSMA que dans un appui aux actions de la Force G5 Sahel.
Il est important de souligner que les nouvelles initiatives à envisager avec l’implication accrue de la Communauté ne doivent pas se substituer aux actions déjà menées par la MINUSMA et par le G5 Sahel, ni faire double emploi avec celles-ci. Le but recherché est de mettre en place avec la CEDEAO des arrangements et des articulations qui par leur flexibilité et leur efficacité renforceront la lutte contre le terrorisme et la criminalité transfrontalière organisée.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Dans le contexte difficile que nous traversons, il me revient au nom de Son Excellence le Président de la République du Mali et au nom du Peuple malien de saluer le travail remarquable de la MINUSMA, sous le leadership de Monsieur Mahamat Saleh Annadif, Représentant spécial du Secrétaire Général au Mali et Chef de la Mission. Notre gratitude va aussi à la force française Barkhane, aux pays contributeurs de contingents à la MINUSMA ainsi qu’à tous les partenaires multilatéraux comme bilatéraux, pour leur accompagnement constant en faveur du règlement durable et définitif de la crise dans mon pays.
Nos pensées vont en cet instant aux valeureux combattants amis tombés lors des affrontements et dont le sacrifice scelle à jamais un pacte de sang entre nos peuples.
Monsieur le Président,
Distingués membres du Conseil,
Pour conclure, je dirai qu’il nous faut remettre les choses en perspective : il y a 7 ans, mon pays était menacé de disparition. Une grande partie du territoire du Mali était sous la coupe de groupes terroristes. L’Etat était en faillite absolue. Les souffrances des populations étaient extrêmes.
Aujourd’hui, en large partie grâce à l’investissement gigantesque consenti par la Communauté Internationale, en premier lieu via la MINUSMA, au leadership du Président Ibrahim Boubacar Keita et à la détermination des Maliennes et des Maliens, le Mali a relevé la tête et est redevenu une nation debout : les djihadistes ont reflué, la situation sécuritaire est globalement apaisée, un accord de paix historique a été signé et le processus de consolidation de l’Etat se poursuit – la très bonne tenue de l’élection présidentielle à l’été 2018 en a été la démonstration manifeste.
Mais nous devons être lucides et réalistes : si des progrès ont été réalisés au regard de la situation de 2013, la situation de mon pays reste particulièrement préoccupante : la menace jihadiste perdure malgré les succès militaires, notamment dans le Centre, où les antagonismes ancestraux sont instrumentalisés et engendrent la plus grande souffrance de la population comme les tragiques évènements du 23 Mars nous l’ont cruellement rappelé. La mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la réconciliation, malgré nos efforts inlassables et les progrès enregistrés, reste lente et fragile. Trop fragile pour que nous relâchions nos efforts. Trop fragile pour que la communauté internationale se retire. Trop fragile pour considérer que le travail est terminé.
Je le dis solennellement : le Mali est aujourd’hui à la croisée des chemins. Deux perspectives s’offrent à lui : soit la paix s’enracine et le développement socio-économique peut enfin avoir lieu sur tout le territoire, soit on assiste à un grand bond en arrière au plan politique et sécuritaire. Le risque est réel et toute la communauté internationale doit en être très consciente.
Tous nos efforts, dans tous les domaines, visent aujourd’hui à ce que la première voie soit prise par le Mali. La voie de la stabilité, de la paix et du développement. Comme vous le savez, la MINUSMA et au sens large toute la communauté internationale joue un rôle central dans le fragile équilibre et dans les progrès actuels. Dès lors, tout mouvement de retrait sera interprété comme un signe de faiblesse par nos ennemis communs, et comportera un risque élevé d’engendrer un coup d’arrêt fatal à la mise en œuvre déjà laborieuse et complexe de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation.

La réussite du Mali sera la réussite de la Communauté Internationale, tout comme l’échec du Mali sera aussi celui de la Communauté Internationale. Les enjeux du Mali, vous le savez tous, sont des enjeux globaux.
Je lance aujourd’hui un appel solennel à maintenir et à renforcer la mobilisation internationale qui constitue pour nous une source permanente de motivation et d’engagement. Car donner des raisons de croire en la paix et en la stabilité grâce à la solidarité internationale est notre devoir à tous vis-à-vis du Peuple Maliens et des populations du Sahel.

Je vous remercie de votre aimable attention

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