L’mam Mahmoud Dicko, après la forte mobilisation du 5 avril dernier, est allé, hier, à Nioro du Sahel pour s’entretenir avecle Chérif Mohamed OuldCheicknèHaïdara, guide de la communauté hamalliste. L’objet de ce déplacement de Dicko dans le fief de M’Bouillé est connu : échanger et adopter une position commune dans la bataille engagée contre le régime en place. Les deux religieux, après un meeting, le 10 février dernier, étaient passés à la vitesse supérieure, le vendredi dernier, en mobilisant des centaines de milliers de Maliens, à la place de l’indépendance à Bamako. Mais,avant son voyage à Nioro du Sahel, Mahmoud Dicko, a rencontré, le mercredidernier, de nombreux militants d’associations et groupements de la société civile, au siège du Haut conseil islamique. Quel était l’objet de cette rencontre ? Réponse.
C’est dans un climat électrique que l’imam Dicko a accueilli des représentants de nombreuses associations et mouvements de jeunes activistes au siège du Haut Conseil. Le modérateur de la rencontre donne le ton en déclarant : « Depuis la fin du rassemblement du 05 avril, beaucoup d’associations et de simples citoyens ont demandé de venir témoigner et réaffirmer leur soutien à l’Imam… Nous avons donc jugé nécessaire d’organiser une rencontre générale entre lui et l’ensemble de ces groupements afin de parler du rassemblement de vendredi dernier. Il s’agit aussi de parler des actions futures à mener ».
La parole fut donnée à trois personnes afin qu’elles s’expriment aux noms des associations. C’est ainsi que pour les associations féminines, Mme Diawara Djénébou Sidibé a été désignée comme porte-parole. Aussi, deux hommes aux noms des associations de l’intérieur et de la diaspora, ont tour à tour pris la parole. Les trois intervenants ont tous abondé dans le même sens : Soutien sans faille à l’imam Dicko. Pour eux, la revendication principale (depuis lemeeting du 10 février 2019) doit changer : le départ du Premier ministre, n’est plus d’actualité. Mme Diawarahausse le ton : « Là où nous sommes actuellement, le départ du Premier ministre, qui est ardemment protégé par le Président de la République, ne résoudra rien aux problèmes. C’est ce dernier même qui est le problème et il doit partir». Elle ajoute: « La seule et unique chose que nous demandons actuellement est la démission immédiate et sans condition du Président Ibrahim Boubacar Keita. Nous demandons solennellement à notre très respecté imam Dicko d’en faire notre exigence pour sauver le pays…». Des propos accueillis par une pluie d’ovation de la part de l’auditoire. Après ces interventions enthousiastes, l’imam Dickos’est adressé à la foule.
Imam Dicko : « Vous avez évité le piège… »
C’est avec beaucoup de sérénité que l’imam Mahmoud Dicko a pris la parole. Il a félicité le patriotisme ainsi que la loyauté de tous ceux qui ont répondu à l’appel du 05 avril sans causer aucun dégât: « Vendredi dernier, vous êtes sortis comme personne ne pouvait l’imaginer. Et sur place, contrairement aux pièges qu’on a voulu nous tendre, évitant l’image de déstabilisateurs avec laquelle certains ont voulu nous vêtir, vous avez su être à la hauteur en marquant l’histoire de mobilisation de ce pays de la plus belle manière». Face à ses fidèles, Mahmoud Dicko a tenu un langage de vérité, notamment sur les multiples « négociations » entreprises par différentes personnes (maliennes et étrangères) pour l’annulation de la manifestation du 05 avril. Eux tous ont exprimé leur crainte de voir la manifestation débordée et de conduire à… l’irréparable.Mais, l’imam a révélé qu’il a donné des assurances aux différents médiateurs quant au bon déroulement de la manifestation. « Je vous en remercie au nom du Cherif Bouyé Haidara de Nioro et de tous mes autres compagnons.» a-t-il déclaré à la foule avant de s’expliquer sur la suspension de la sortie du vendredi prochain.
« Les manifestations ne sont pas terminées, mais… »
L’un des temps forts de la rencontre fut les explications de l’imam sur la décision de la suspension de la prochaine sortie qui devait avoir lieu initialement ce vendredi.
L’imam Mahmoud Dickoa rassuré la foule en ces termes : « J’ai ressenti votre inquiétude par rapport à la décision de la suspension de la sortie prochaine, mais soyez rassurés que c’est juste une stratégie dans la lutte pour montrer notre bonne foi à l’opinion nationale et internationale ».Le leader religieux précise : «Après le meeting du vendredi dernier, nous avons reçu la visite d’une délégation de la famille fondatrice de Bamako. Ils nous ont demandé de surseoir à notre décision de sortir chaque vendredi. En retour, ces médiateurs se sont engagés à entamer des négociations entre nous et le régime. Nous avons donc jugé nécessaire de donner une chance à leur initiative. Il ne s’agissait nullement d’un recul, mais pour prouver notre bonne volonté…».Cependant, l’imam Dicko est catégorique : « Les médiateurs ont très peu de temps pour accomplir leur mission. Dans le cas contraire, une nouvelle sortie aura lieu et qui, non seulement concernera chaque partie du Mali, mais risque d’être la dernière car on réglera tout le problème, une bonne fois pour toute». C’est avec ces propos et promesses que l’imam a réussi à calmer l’ardeur de la foule
Koulouba : « Ce fut une rencontre vide de contenue… »
Selon l’Imam, c’est dans la nuit du dimanche qu’ils ont reçu une invitation de la Présidence pour prendre part à une rencontre entre le chef de l’Etat et toutes les confessions religieuses du pays. Tout en continuant, il dira : «Nous avons été très surpris de ne connaitre l’objet de la rencontre ni au moment d’être invité, ni dans la salle où elle a lieu. Le Président m’a donné la parole sans que je ne sache la raison de mon invitation. Qu’allais-je donc dire ? Je lui ai exprimé ma gratitude pour l’invitation en saluant toute la salle avant de rejoindre ma place. Et le Président de la République, aussi, dans son intervention n’a rien évoqué comme mesure allant dans le sens de nos revendications, nous jugeons donc que ce fut une rencontre totalement vide de contenue car elle ne nous a pas fait avancer». Le leader religieux, devant la déception de ses fidèles, a tenté d’apporter des apaisements. Cet ainsi qu’il a annoncé son voyage à Nioro pour s’entretenir avec le chérif M’Bouillé. Entre les deux hommes, c’est un engagement réciproque…
« J’irai m’entretenir avec le Chérif… »
L’imam Dickoa tenu à rassurer ses partisans sur sa détermination à poursuivre le « combat » engagé. Aussi, il a informé l’assistance de son déplacement à Nioro du Sahel pour y consulter le chérif M’Bouillé Haïdara. « J’irai m’entretenir avec le Chérif de Nioro demain pour faire le point avec lui et décider ensemble de la marche à suivre. Cette décision vous sera communiqué dès mon retour», a-t-il déclaré. Précision : le Chérif de Nioro est un soutien de taille pour Dicko. A ce titre, il a toujours indiqué la voie à suivre, notamment lors du meeting du 10 février dernier et le rassemblement du 5 avril.
Entre temps, les Maliens interrogent sur la suite de ce bras de fer. Aussi, de nombreuses questions sont posées : Que décideront M’Bouilé et Dicko ? Vont-ils appelés les Maliens à descende dans la rue le vendredi prochain ? Que décidera IBK face à la principale exigence des deux religieux, le départ de Soumeylou B Maïga ?
Pour le moment, du côté de Koulouba, le président IBK semble être plus préoccupé par d’autres sujetscomme la révision constitutionnelle au lieu de faire face aux urgences actuelles qui se manifeste à Bamako et dans le reste du pays par la grogne sociale qui ne cesse de croitre chaque jour. Il a invité, le matin du mercredi dernier, une délégation de l’EPM (Ensemble Pour le Mali) de la majorité présidentielle pour la remettre l’avant-projet de la nouvelle constitution qui devra être apprécié et adopté en conseil des ministres avant de passer sous l’appréciation directe du Peuple via un référendum dans un Mali dont l’Etat n’a plus le contrôle des 2/3 du territoire.
Ousmane Dembélé
L’Aube