La chaine Panafricaine, Africable Télévision, a organisé un débat le 22 septembre 2019 entre certains leaders politiques pour parler du Mali, de l’indépendance à l’ère démocratique. Un débat très riche en enseignements, mais truffé également de contrevérités. Il a été non seulement un tribunal contre le régime ADEMA, dont les leaders ont malheureusement encore brillé par leur absence, mais aussi et surtout, une occasion pour certains de réécrire l’histoire du Mouvement démocratique et pour d’autres de la falsifier tout simplement. Ces trois leaders que sont Mariko, Tall et Maiga, n’ont-ils pas été de tous les régimes de l’avènement de la démocratie à nos jours ? Est-ce une fuite de responsabilité que de ne pas reconnaitre leur part de responsabilité dans la gestion du pays pendant les 20 dernières années ?Le 22 septembre étant la fête de l’indépendance, la parole a été donnée par la chaine aux acteurs politiques, une manière pour elle de contribuer de façon qualitative aux débats politiques. Le choix de ce numéro spécial s’est porté sur trois imminences grises de la scène politique malienne, à savoir Me Mountaga Tall Président du CNID Faso Yiriwa Ton, Docteurs Oumar Mariko de SADI et Choguel Kokalla Maiga du MPR. Les deux premiers leaders cités sont du mouvement démocratique tandis que le troisième est de l’ancien régime dictatorial du Général Moussa Traoré.
Après un bref rappel des grandes dates du Mali indépendant et des événements qui ont eu lieu tout au long du parcours jusqu’à la démocratie, les débats ont été surtout focalisés sur le Mouvement démocratique. L’une des questions du confrère qui conduisait les débats était de savoir si le Mouvement démocratique a fait mieux que l’ancien régime qu’il a combattu ? Quelle ne fut notre surprise de constater que Me Mountaga Tall et l’ancien leader estudiantin Oumar Mariko se sont désolidarisés de la gestion du pays du 8 juin 1992 à nos jours. Pour Me Tall, le Mouvement démocratique n’a géré le pays que du 26 Mars 1991 au 8 juin 1992, date de l’investiture du nouveau Président élu Alpha Oumar Konaré. Cette allégation a été soutenue par le Président de SADI Oumar Mariko. Mariko et Tall ont-ils réfléchi un petit instant avant de tenir ces propos qui sont à la fois illogique et mensonger.
Me Tall pourrait-il se désolidariser du bilan de la gestion du Mali sous l’ère démocratique, lui qui a été d’abord député sous la première mandature d’Alpha Oumar Konaré, avant de prendre part à la gestion du pays sous ATT et IBK ? Qui ne se rappelle pas des interpellations des ministres ADEMA par Me Tall, au point que quand les ministres sont convoqués, ils se sentaient soumis à un examen de passage.
Sous ATT, il est encore revenu à l’Assemblée Nationale où il a même été vice-président avant de nourrir l’ambition de ravir la vedette à Dioncounda Traoré, le Président du parti majoritaire au sein de la Majorité Présidentielle pour le perchoir et cela au nom du grand regroupement autour d’ATT, alors même qu’il n’avait que quelques députés.
Qui ne se rappelle pas de l’incident électoral que Me Mountaga Tall et Choguel K Maiga ont failli provoquer en attribuant un score nord-coréen à ATT alors même que les instances habilités pour le faire ne se sont pas prononcées ? Dr Mariko se rappellera certainement du sobriquet moqueur qu’il a donné à Tall et Choguel, à savoir Garanké Mamou I et II. Me Tall doit assumer sa part de responsabilité dans la gestion du pays par le Mouvement démocratique.
Quant à Oumar Mariko, bien que n’ayant pas occupé de poste administratif, ne demeure pas moins un acteur du Mouvement démocratique dont il est l’éternel député de Kolondiéba. Que dire de l’entrée au gouvernement du parti SADI sous le premier mandat d’ATT, Cheick Oumar Sissoko était le ministre de la culture. Mais, Oumar Mariko a remis en cause les idéaux du 26 Mars et s’est désolidarisé du bilan du Mouvement démocratique au point qu’il a donné raison à Choguel quand ce dernier a eu la maladresse d’affirmer que l’honorable Mariko a été seulement emprisonné pendant 11 mois sous le régime militaire du Général Moussa Traoré, tandis qu’il a failli être assassiné sous Alpha Oumar Konaré.
Oumar Mariko et Mountaga Tall pensent-ils pouvoir faire du mal aux leaders de l’ADEMA en remettant tout en cause ? Ils contribuent plutôt à discréditer l’homme politique. Leurs discours sont aux antipodes des actes qu’ils ont posé et ils doivent faire leur autocritique. Sinon, comment comprendre que l’un des leaders de premier plan pourrait tomber aussi bas au point d’aller s’acoquiner avec les putschistes du 22 mars 2012 ?
Choguel Kokalla Maiga, lui, au contraire, est resté constant dans son combat pour la falsification de l’histoire récente de notre pays. Il a battu en brèche tout ce qui a été fait sous l’ère démocratique y compris sa propre gestion. Il a été ministre de l’industrie et du commerce sous ATT, mais il dit n’avoir pas pris part à la gestion catastrophique du Mali sous les « pseudos démocrates ». Qui ne se rappelle du scandale de l’huile frelatée incriminant son ministère ? Choguel Maiga en essayant de critiquer le bilan du Mouvement démocratique a parlé des journalistes disparus ou bâillonnés, en oubliant que sous Moussa, il n’y avait pas de liberté d’opinion et qu’en 1989, quand il a autorisé l’ouverture médiatique, il n’y avait que deux ou trois journaux.
La liberté d’association et de réunion étaient interdites. Les leaders des syndicats étaient arbitrairement mutés ou arrêtés. Dioncounda Traoré, Issa N’Diaye, Tiébilé Dramé, Victor Sy, feux Ibrahima Ly et Mamadou Lamine Traoré, Marie Bernard Sissoko, pour ne citer que ceux-ci, n’avaleront jamais l’amère couleuvre de la bonne gestion du pays par Moussa Traoré, distillée par Choguel Maiga. Certains ont fait le cachot de Kidal. Que vont penser les héritiers de Modibo Keita, d’Amadou Traoré dit Amadou Djicoroni quand ils entendront les propos de Choguel Maiga distribuant des points à Moussa Traoré sous les regards complices et complaisants de Me Tall et Dr Oumar Mariko.
En somme, le discrédit dont l’homme politique malien fait l’objet est dû en grande partie par lui-même. Il passe aujourd’hui pour celui qui change en fonction de ses intérêts. Me Tall et Choguel ayant géré sous ATT et IBK, n’ont jamais tari d’éloges pour ces deux Présidents quand ils étaient aux affaires, mais une fois à la touche, ils sont devenus leurs irréductibles opposants et niant jusque leurs responsabilités dans le bilan. La politique a-t-elle sa morale que la morale elle-même ignore ?
Youssouf Sissoko
Inf@Sept