Les deux négociateurs sur le Brexit, Michel Barnier pour l’UE et Stephen Barclay pour les Britanniques, se sont retrouvés vendredi à Bruxelles autour d’un petit-déjeuner pour évaluer les chances de déblocage des discussions, au lendemain d’un regain d’optimisme affiché par Londres et Dublin.
Depuis Chypre, le président du Conseil européen, Donald Tusk, chef d’orchestre du sommet du 17/18 octobre, a estimé à propos de la rencontre Barnier-Barclay que “la moindre chance” de trouver un accord devait être “exploitée”.
“Un +no deal+ ne sera jamais le choix de l’Union européenne”, a-t-il redit aux médias lors d’une visite dans l’île méditerranéenne.
Jeudi, les dirigeants britannique Boris Johnson et irlandais Leo Varadkar ont quelque peu ravivé l’espoir d’un accord d’ici la date fatidique du 31 octobre.
Ils ont assuré entrevoir un “chemin” vers un compromis sur la question clé de la frontière irlandaise. Sans cependant dire concrètement comment ils comptaient sortir les négociations de l’ornière. L’Irlande, très soutenue par les Européens, sera en première ligne en cas de divorce sans accord le 31 octobre.
La secrétaire d’Etat française aux Affaires européennes, Amélie de Montchalin, a repris vendredi la même métaphore d’un “chemin étroit, qui est encore possible”, tout en jugeant “probable” un divorce brutal.
Les Européens ont donné jusqu’à vendredi à Londres pour présenter un compromis acceptable, avant le sommet européen de la semaine prochaine.
Après un petit déjeuner d’une durée de deux heures avec Stephen Barclay, Michel Barnier, qui négocie au nom de l’UE, devait ensuite informer en début d’après-midi les ambassadeurs des 27 de la possibilité, ou non, d’engager de véritables négociations.
– “Farfelue”
“Barnier doit dire si on peut entrer ou non en négociations sur un texte”, explique une source européenne. “Après, la route sera longue, imaginer un texte d’accord pour le sommet est une idée complètement farfelue”, ajoute cette source.
Le traité de divorce conclu en novembre 2018 entre les 27 et l’ancienne Première ministre britannique Theresa May, rejeté par trois fois par la Chambre des communes, a nécessité 18 mois de négociations.
Outre l’absence de progrès, la semaine écoulée a été marquée par de fortes turbulences entre Londres et Bruxelles, qui se sont rejetés mutuellement la responsabilité du blocage et de ses conséquences économiques potentiellement désastreuses.
Londres a ouvert les hostilités en critiquant les Européens, en particulier Dublin et Berlin, ce qui avait entraîné mardi une réplique cinglante de Donald Tusk qui avait alors accusé Boris Johnson de jouer avec “l’avenir de l’Europe”.
Le petit-déjeuner Barclay-Barnier devait “permettre de faire le point sur les réponses des Britanniques aux questions des Européens”, avec l’objectif de “limiter les dégâts avant le sommet et faire retomber la tension”, a estimé Eric Maurice, expert de la Fondation Robert Schuman.
La question des contrôles douaniers entre l’Irlande, membre de l’UE, et l’Irlande du Nord, province britannique, après le divorce est la principale pierre d’achoppement des discussions. Londres exige la suppression du filet de sécurité (“backstop”) prévu dans le traité de retrait, estimant qu’il porte atteinte à son indépendance commerciale.
Ce dispositif a été prévu pour empêcher le retour d’une frontière dure entre les deux Irlandes, afin de préserver la paix sur l’île, tout en protégeant les intérêts du marche unique européen.
Le plan de Boris Johnson prévoit de sortir l’Irlande du Nord de l’union douanière européenne tout en refusant des contrôles des biens à la frontière ou à proximité.
“Ce qui nous est demandé est d’accepter un système qui n’est pas développé, pas testé, de contrôles dispersés sur l’île d’Irlande”, a fustigé mercredi Michel Barnier, soulignant l’importance de contrôles “rigoureux à chacune des limites du marché unique et de notre union douanière”.
Face aux désaccords persistants pour aboutir à un divorce à l’amiable, un “no deal” fin octobre ou un troisième report semblent être les seules options sur la table du sommet.
Faute d’accord le 19 octobre, une loi adoptée par le Parlement britannique impose au Premier ministre de demander un report de trois mois, bien que Boris Johnson ait promis un Brexit “coûte que coûte” le 31 octobre.
AFP