Il répond au nom d’Abdoul Karim Konaté, promoteur et directeur du Collège Abdoul Karim Konaté (CAKK), qui a ouvert ses portes en octobre 2007. Cet établissement d’un effectif de plus de 550 élèves relève du Centre d’Animation Pédagogique (CAP) de Lafiabougou,Académique Rive Gauche. Le responsable du collège a accordé une interview, à votre hebdomadaire d’informations générales « Malisadio » dans laquelle, il parle des impacts des grèves de l’année dernière, des propositions sur le système éducatif malien dans le cadre du dialogue national inclusif…
MALISADIO : Qui est Abdoul Karim Konaté ?
AKK : A l’état civil, je suis Abdoul Karim Konaté. Je suis promoteur et directeur du Collège Abdoul Karim Konaté en abrégé « CAKK » du CAP de Lafiabougou, Académie Rive Gauche. C’est une école fondamentale de la 1ère à la 9ème année qui compte plus de 550 élèves, 12 enseignants pour le premier cycle et une quinzaine au niveau du second cycle. Nous enseignons l’anglais dès la 4ème année pour préparer les élèves à mieux comprendre cette langue qui est indispensable aujourd’hui. C’est vrai, dans le programme officiel, l’anglais commence en 7ème année, mais c’est une innovation de notre part. Nous enseignons également l’Informatique en 7ème année. Ce sont les deux innovations en plus des cours classiques. Au-delà de ce programme classique, nous mettons l’accent sur la discipline, l’éducation civique et morale. Chaque lundi, c’est la montée de drapeau, accompagnée du chant de l’hymne national du Mali en français et anglais.Le vendredi, on le fait descendre. La coiffure et le mode d’habillement aussi en font partie. Nous respectons les consignes du CAP en se conformant au programme officiel et on fournit les rapports demandés.
MALISADIO : La rentrée scolaire de cette année, comment vous l’avez accueillie ?
AKK : La rentrée scolaire de cette année s’est déroulée comme celle des années précédentes. Nous nous sommes conformés au programme officiel de l’Etat comme je l’ai dit ci-dessus. La rentrée était prévue pour le 1er octobre 2019 et nos élèves étaient en classe le même jour. La date était fixée en amont et on l’a respectée. Le même jour, nous avons reçu la visite des officiels du Centre d’Animation Pédagogique. Bref, il n y a pas eu de désagréments majeurs.
MALISADIO : Quelleest la place des écoles privées dans l’éducation malienne ; jouent-elles un rôle important ?
AKK : Les écoles privées contrairement à ce que certains pensent qu’elles constituent une baisse de niveau, jouent un rôle très important. Elles contribuent d’ailleurs au rehaussement du niveau des élèves. Pour ce qui estdes meilleurs aux examens de Baccalauréat et au Diplôme d’Etudes fondamentales, ce sont généralement les élèves des écoles privées qui sont en tête de peloton. Grâce aux écoles privées, beaucoup d’élèves vont à l’école car, l’Etat n’arrive pas à offrir des classes à tous les enfants et ce sont les écoles privées(ou communautaires) qui relèvent ce défi. Il y a plus d’élèves dans le privé que dans le public maintenant.
MALISADIO : Qu’en dites-vous de la subvention de l’Etat ?
AKK : (Rires). Les écoles fondamentales ne bénéficient pas de subvention de l’Etat. Nous demandons à ce que l’Etat subventionne les écoles privées, pas forcément l’argent, mais de contribuer à la formation du personnel et de mettre l’accent sur le suivi et l’évaluation de l’Etat. Ce sont les écoles privées qui s’occupent de la formation de leurs propres enseignants.
C’est vraiment une situation à laquelle l’Etat doit faire face. Toutefois, nous reconnaissonsl’effort de l’Etat, notamment la prise en charge de l’organisation des examens du DEF. Les candidats y participent sans payer.
MALISADIO : L’année dernière a été marquée par des grèves qui ont perturbé l’école malienne. Pouvez-vous parler un peu des conséquences de celles-ci ?
AKK : Vous savez, la grève est un droit reconnu. Mais, le problème est qu’on prive ceux qui ne veulent pas aller en grève de travailler. C’est ce qui est arrivé l’année dernière. Les enseignants de l’école publique étaient en grève et à un moment, l’AEEM a impliqué les écoles privées en oubliant les conséquences que ces écoles peuvent subir. Dans les écoles privées, si les enseignants ne sont pas en classe, les parents d’élèves ne paient pas. Et nous avons fait deux à trois mois comme ça. Donc, les écoles privées sont fermées avec ces impayés. Beaucoup d’écoles souffrent aujourd’hui à cause de ça. Ceux qui sont partis en grève ont eu gain de cause mais les enseignants des écoles privées qui ont été privés de travailler n’ont rien bénéficié, pas même le salaire.
MALISADIO : Quel est votre avis par rapport au retour des épreuves orales au BAC ?
AKK : J’ai deux constats : ça peut rehausser le niveau s’ils croient réellement à cela, ça peut aussi déplacer le problème. La baisse de niveau n’est pas seulement au niveau des écrits ; mais est-ce que les enseignants qui sont chargés de dispenser les cours sont aussi bien formés ?Est-ce qu’on arrive à épuiser le programme comme il le faut ? Chaque année, beaucoup passent aux examens avec des lacunes. Ce sont les programmes cumulés inachevés qui font qu’il n’y a pas de niveau souhaité. Alors, avant d’aller aux épreuves orales, qu’on arrive à épuiser le programme d’abord.
MALISADIO : Actualité oblige. Le dialogue national inclusif est en cours. Ilporte sur tout. Si vous avez des propositions sur l’éducation malienne, lesquelles feriez-vous ?
AKK : J’ai deux propositions. Que les écoles privées restent en marge des mouvements de l’AEEM. Que l’Etat crée une direction nationale pour l’enseignement privé. Cela permettra l’implication des écoles privées dans les prises des décisions. Les écoles privées sont là pour aider l’Etat, mais les décisions sont prises sans elles.
MALISADIO : Votre mot de fin ?
AKK : J’invite les parents d’élèves à jouer pleinement leur rôle. Car, si les parents d’élèves décident d’amener leurs enfants dans les écoles où il y a l’excellence, forcément toutes les autres écoles seront excellentes.
Réalisée par Drissa Keita
Mali Sadio