La population a encore manifesté dans plusieurs villes de l’est de la République démocratique du Congo. Elle proteste contre l’inaction de l’armée et surtout de la Monusco. Les incursions des groupes armés ont fait près de 80 victimes civiles depuis le début du mois de novembre dans la région de Beni.
La tension s’est diffusée ce mardi dans les environs de Beni. À Butembo, les jeunes ont dressé des barricades pour bloquer les axes principaux de la ville. Une voiture a été incendiée et un manifestant blessé par un tir est décédé à l’hôpital dans la matinée.
Chaffi Musity, un des leaders du groupe Veranda Mutsanga à Butembo, exprime sa défiance envers la Mission des Nations unies au Congo (Monusco) : « On égorge la population à côté du campement de la Monusco, souligne-t-il. C’est inacceptable. Nous voulons que cette Monusco puisse partir. »
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À Goma, la capitale du Nord-Kivu, aussi, des échauffourées ont éclaté près des locaux de la mission des Nations unies. Les activités académiques ont été suspendues.
Enfin, la population s’est de nouveau mobilisée à Beni. Comme la veille où cinq personnes avaient été tuées, elle s’est rendue devant les locaux de la Mission des Nations unies. Un manifestant a été tué après une confrontation violente avec les casques bleus. Une enquête est en cours.
Une confiance qui sera difficile à rétablir
Lundi, la présidence congolaise a annoncé de futures opérations conjointes de l’armée et de la Monusco et l’installation d’un poste de commandement avancé à Beni, mais ces déclarations peinent à convaincre le député de Goma et Butembo, Muhindo Nganzi : « La Monusco n’a pas de forces capables de pouvoir suivre les FARDC dans la forêt pour combattre les ADF vu leurs méthodes de combat, affirme-t-il. Pendant cinq ans, ils ont essayé de travailler ensemble et ils n’ont pas pu trouver de solution. »
Il estime qu’il sera très difficile de rétablir la confiance. « Il était maladroit que la Monusco dise qu’elle ne va pas participer aux opérations contre les ADF, explique-t-il. Cette très mauvaise communication de la Monusco est à la base de toute cette colère de la population. Bien sûr, on sait que les FARDC ont des problèmes structurels réels qui empêchent la Monusco de collaborer, mais, dans le contexte de cette guerre généralisée et de tueries, c’était quand même risqué de communiquer qu’elle ne va pas participer à cette opération. Le gouvernement essaie d’expliquer à la population qu’il est encore possible d’organiser les opérations ensemble avec la Monusco, mais je crois que pour la population, la confiance est déjà définitivement retirée à la Monusco. Même du côté de l’armée, il y a des officiers qui sont très méfiants vis-à-vis de la Monusco, puisqu’elle a refusé d’accorder de l’assistance dans le cas de militaires blessés sur le front. Donc ça va être très difficile pour rétablir la confiance entre la population et la Monusco, ou même entre l’armée et la Monusco. »
La recrudescence des attaques contre les populations dans la région correspond au lancement d’une opération unilatérale des Forces armées de RDC (FARDC) contre les rebelles des Forces démocratiques alliées (ADF).
« Nous demandons à la population de ne pas faire d’amalgame »
Une délégation emmenée par le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur congolais Gilbert Kankonde est arrivée mardi à Goma pour évaluer la situation sécuritaire. Il a rappelé les efforts en matière de sécurité et de renforts militaires sur place. Mais il a aussi lancé un message à la population pour ne pas s’en prendre à la Monusco.
« Nous demandons à la population de ne pas faire d’amalgame, a-t-il exhorté. Il ne faut pas que la population suive des messages de manipulation qui voudraient faire croire que la Monusco ferait partie du problème, alors que ce sont des soutiens internationaux qui nous ont été nécessaires et qui sont encore nécessaires pour nous permettre de sortir le pays de là où il est, et le mettre définitivement sur la voie de la paix et du développement. Donc, nous demandons encore une fois à nos populations de garder leur calme. Je sais que c’est difficile quand on est frappé comme on l’est souvent dans la région de Beni. Mais c’est la dernière station – si je peux m’exprimer ainsi – pour que nous mettions cette région définitivement hors de portée des forces criminelles qui l’ont endeuillée. »
RFI