Donald Trump a attaqué frontalement le président français Emmanuel Macron mardi avant le sommet du 70e anniversaire de l’Otan et donné un ton offensif à une rencontre organisée dans un contexte tendu entre les Alliés.
Ces commémorations s’annonçaient peu festives vu les différends sur la Syrie ou le financement de l’organisation et Emmanuel Macron a jeté de l’huile sur le feu en jugeant l’Alliance née en 1949 “en mort cérébrale”.
Avant même les rencontres officielles au complet, mardi soir à Buckingham Palace et mercredi dans un golf de luxe en périphérie de Londres, le président américain s’en est pris à ce jugement, le qualifiant de “très insultant”.
C’est un jugement “très, très méchant a l’adresse de 28 pays”, a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse avec le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg. Donald Trump s’est dit “très surpris” par la déclaration d’Emmanuel Macron, qu’il doit rencontrer mardi dans la journée, et l’a jugée “très dangereuse” pour la France.
“Personne n’a besoin de l’Otan plus que la France”, a-t-il affirmé.
Et il a critiqué très durement la volonté de la France de vouloir taxer les géants technologiques américains. L’administration Trump a déjà menacé d’imposer des droits de douane pouvant atteindre 100% sur l’équivalent de 2,4 milliards de dollars de produits français dont le roquefort, les yaourts, le vin pétillant.
– “Mauvais payeurs” –
“Je suis en désaccord” avec Emmanuel Macron a pour sa part déclaré Jens Stoltenberg. “Il ne faut pas mettre en doute l’unité et la volonté des alliés de se défendre les uns les autres”, a-t-il ajouté précisant que c’est la base de la dissuasion.
Jens Stoltenberg doute que ce différend puisse être réglé lors du sommet. Le secrétaire général espère que les alliés vont lui confier à Londres la mission de conduire une réflexion sur les moyens d’améliorer la réflexion stratégique au sein de l’Otan.
Hôte de la rencontre, le Premier ministre britannique Boris Johnson veut appeler les 29 pays membres à l’unité mais les noms d’oiseaux avaient commencé à pleuvoir dès la semaine dernière.
Répliquant aux déclarations d’Emmanuel Macron sur l’Otan, le président turc Recep Tayyip Erdogan lui avait lancé: “Fais d’abord examiner ta propre mort cérébrale!”
Leur contentieux porte sur l’intervention lancée par Ankara en octobre dans le Nord-Est de la Syrie sans en informer les autres membres de l’Alliance. Les deux chefs d’Etat doivent se retrouver mardi après-midi avec Boris Johnson et Angela Merkel pour discuter du conflit syrien.
A l’exception de cette rencontre potentiellement explosive, l’attitude de Donald Trump était considérée comme la principale inconnue du sommet. Sa première intervention avant le début de la réunion a donné le ton, comme l’an dernier quand il avait critiqué Angela Merkel.
Outre ses attaques contre la France, il a abordé pendant 52 minutes, face à la presse, un vaste nombre de sujets, défendant des Iraniens “tués pour le simple fait de manifester” et jetant un coup de froid sur les espoirs d’un accord commercial avec la Chine en disant que cela pourrait attendre une éventuelle réélection l’année prochaine.
Le milliardaire américain, qui depuis son élection pousse ses alliés à augmenter leurs budgets militaires pour partager davantage le fardeau, a lancé une nouvelle charge contre les “mauvais payeurs” de l’Otan, notamment l’Allemagne.
Donald Trump veut maintenir la pression sur les alliés pour leur faire respecter leur engagement de consacrer 2% de leur PIB pour leur budgets militaires en 2024. La France dépensera l’équivalent de 2% en 2025, mais l’Allemagne, à 1,42% en 2020, ne respectera pas son engagement avant le début de la décennie 2030.
S’il s’est félicité d’avoir “obtenu 130 milliards de dollars”, en référence à la somme que le Canada et les membres européens auront ajoutée aux budgets de la défense en quatre ans, il s’est dit insatisfait.
La visite du président américain à Londres est scrutée de près au Royaume-Uni, dans un contexte politique explosif à neuf jours des législatives. Boris Johnson espère gagner une majorité suffisante pour mettre en oeuvre le Brexit, pour lequel ont voté 52% des Britanniques en 2016.
Le milliardaire républicain compte rencontrer le Premier ministre britannique, un homme “très compétent”, mais il a assuré ne pas vouloir se “mêler de ces élections”. Il a toutefois redit être favorable au Brexit dont le Premier ministre britannique s’est fait le champion.
AFP