“On n’a pas le droit de se louper”: l’Elysée, le gouvernement et la majorité appellent à faire bloc autour de la réforme des retraites, dont l’avenir se joue en bonne partie mercredi avec sa présentation par Edouard Philippe.
Quelques heures avant l’allocution du Premier ministre, prévue à midi, une dernière réunion se tient mardi soir à l’Elysée où Emmanuel Macron réunit les ministres impliqués et les cadres de la majorité.
Ce dîner sera l’occasion d’un ultime “calage” de la réforme, à la fin d’une deuxième journée de manifestations à l’appel des syndicats qui s’y opposent, la CGT et FO en tête.
“Chacun autour de la table sait ce qu’est une réforme indispensable à son pays et ce qu’elle implique d’être menée. Ça relève de l’action du gouvernement et des annonces qui seront faites demain (mercredi)”, a insisté Emmanuel Macron dans la nuit de lundi à mardi. Il répondait à une question sur le mouvement social en France à l’issue d’une rencontre à l’Elysée consacrée à l’Ukraine, et en a profité pour rassurer, avec une pointe d’ironie, son homologue russe Vladimir Poutine “que les manifestations à Paris ne concernait absolument pas la réforme des retraites menée en Russie”.
L’objectif du rendez-vous de mardi soir est aussi de “mettre en cohésion” la majorité, chargée de convaincre une opinion très méfiante du bien-fondé de cette “réforme de progrès et de justice sociale”, selon l’Elysée.
“Dans des situations comme celle-là, la question de l’unité et de l’alignement de l’exécutif et de la majorité est cruciale”, souligne Gilles Le Gendre, le patron des députés LREM.
Edouard Philippe pourra sonder l’état d’esprit des troupes en rendant visite dans la matinée au groupe parlementaire LREM.
Pour de nombreux députés de la majorité, l’enjeu est de taille car “une grosse partie de notre potentiel politique et de notre mandat se joue cette semaine”, selon Fabien Gouttefarde, élu en Marche de l’Eure.
“C’est une réforme qui nous lie et nous avons la volonté d’aller au bout. Je sens de la sérénité par rapport à cet objectif”, assure le député Pieyre-Alexandre Anglade à l’AFP. “Il faut néanmoins beaucoup, beaucoup expliquer” car “c’est normal que la réforme inquiète”, selon lui. Après son discours au Conseil économique, social et environnemental (Cese), Edouard Philippe s’expliquera une nouvelle fois mercredi soir au 20H00 de TF1.
– L’opposition aux aguets –
Si 76% des Français se disent favorables à une réforme des retraites (76%), 64% ne font pas confiance à Emmanuel Macron et au gouvernement pour la mener à bien, selon un sondage Ifop publié par Le Journal du dimanche.
Dans cette “bataille de l’opinion”, l’exécutif est surtout critiqué de toutes parts sur la méthode avec laquelle il mène son projet depuis près de deux ans, marquée par un flou qui a exacerbé les inquiétudes des Français.
“Vivement mercredi”, répond le député LREM Laurent Pietraszewski, qui a “l’envie d’avoir un projet concret à défendre” et “d’aller dans le détail” d’un projet “dans l’ADN” macroniste.
Face aux contestations, “il faut tenir sur l’architecture globale tout en faisant preuve de souplesse” sur l’application de la réforme, selon ce député, pressenti pour être rapporteur de la réforme à l’Assemblée.
Donc surtout “pas de brutalité”, mais une volonté exprimée par plusieurs élus LREM que “ce soit rapide” désormais, avec un projet de loi “voté avant les municipales (de mars 2020) ou juste après”.
Mais l’opposition n’entend pas désarmer. Au premier rang de laquelle Jean-Luc Mélenchon qui a appelé le pouvoir à reporter la réforme jusqu’à la présidentielle de 2022.
Sur un ton plus feutré, la droite cherche à faire entendre sa voix, affirmant parler au nom de “la majorité silencieuse” à la fois contre la grève et contre le “soupçon d’injustice” lié au projet du gouvernement, selon Aurélien Pradié, numéro trois des Républicains.
Quant au Rassemblement national, il soutient la mobilisation contre la réforme sans toutefois appeler à manifester et à prolonger la grève. Car “le tête-à-tête entre la CGT et Macron, c’est exactement la stratégie de Macron”, a dénoncé lundi l’eurodéputé Nicolas Bay.
AFP