Bamako (AFP) – Les pourparlers sur la recherche d’une solution politique à l’aggravation de la crise au Mali commencent samedi, entravés par une opposition sceptique et peu de signes de soutien sur le terrain.
Surnommées “dialogue national inclusif”, les pourparlers offrent au président Ibrahim Boubacar Keita assiégé une chance de reprendre son élan après des mois de violence jihadiste et ethnique.
Les islamistes ont tué plus de 140 soldats maliens depuis septembre, dans une insurrection grandissante qui a également enflammé les effusions de sang entre éleveurs peuls et agriculteurs sédentaires dans le centre du pays.
Les attaques djihadistes font partie d’une insurrection à l’échelle du Sahel que les forces armées nationales, soutenues par 4 500 soldats français, ont du mal à contenir.
Mardi, 71 soldats au Niger sont morts lorsque des centaines de djihadistes ont frappé leur base près de la frontière avec le Mali.
– Pas seulement la sécurité –
L’échec d’une réponse militaire incite désormais beaucoup à conclure que la recherche d’une solution doit aller au-delà de la simple sécurité – la pauvreté, les droits ou le changement climatique doivent également être abordés. Et certains sont également favorables à un dialogue avec les djihadistes.
Les neuf jours de pourparlers, réunissant partis politiques et associations, sont destinés à être un creuset de débat pour des solutions alternatives.
Keita a promis que le dialogue sera “fructueux et réformateur” et que l’occasion appartient au “peuple et avenir du Mali”.
“Toutes les préoccupations doivent et doivent être exprimées sans tabou”, a-t-il promis.
Un diplomate occidental, qui a refusé d’être nommé, a fait valoir que le dialogue pourrait briser “l’immobilité de la classe politique (qui) ne fait qu’élargir le fossé avec les Maliens”.
Mais beaucoup doutent que la conférence aura beaucoup de poids ou de crédibilité.
Soumaile Cisse, finaliste des élections présidentielles de 2018, snobe la réunion, tout comme les anciens premiers ministres et candidats à la présidentielle Modibo Sidibe et Cheick Modibo Diarra.
“Le dialogue est une astuce IBK pour garder les rênes”, a déclaré un responsable proche de Cissé, utilisant un surnom pour le leader malien, et qui a demandé l’anonymat.
Brema Ely Dicko, professeur de sociologie à Bamako, a déclaré que même si toute la classe politique du Mali y participait, il y avait le sentiment que les pourparlers étaient simplement une reprise des efforts précédents.
En 2017, la majorité électorale et les partis d’opposition se sont réunis lors d’une conférence nationale avant les élections présidentielles de l’année suivante.
Mais ses recommandations n’ont jamais été suivies – notamment la suggestion de tenir des pourparlers directs avec les dirigeants djihadistes Amadou Koufa et Iyad Ag Ghali.
“Personne n’est sûr que les résolutions politiques de ce dialogue seront appliquées”, a déclaré Dicko.
– «Indifférence» –
Des consultations ont eu lieu dans plus de 600 villes au cours des mois précédant les pourparlers.
Mais Anw Ko Mali Dron – un forum qui comprend des partis politiques et des groupes de la société civile – a déclaré que le processus était embourbé dans “l’indifférence, sans passion, sans esprit d’éveil national”.
Le groupe ne participe pas aux pourparlers.
La position des groupes armés qui ont signé un accord de paix avec le gouvernement de Bamako en 2015 visant à ramener la paix dans le nord du Mali est également peu claire.
Dans une déclaration conjointe de ce mois-ci, les deux principales coalitions de groupes armés, la Plateforme et la Coordination des mouvements de l’Azawad, ont déclaré qu’elles “n’offriraient pas d’objection” aux pourparlers tant que le traité de 2015 resterait en suspens.
Keita a provoqué la colère de certaines milices en ouvrant la porte à la révision des accords de 2015. Ils étaient destinés à désarmer les groupes rebelles et à les intégrer dans l’armée nationale mais n’ont pas été mis en œuvre.
Une proposition de 2017 visant à réviser la constitution et à introduire davantage de décentralisation a également été bloquée, l’opposition du Mali n’ayant pas approuvé le projet.
AFP