Réaliser le Brexit et augmenter les moyens du système de santé: Boris Johnson donne corps à ses promesses de campagne dans son programme de politique nationale présenté jeudi aux députés lors du traditionnel discours du trône de la reine Elizabeth II.
Cette fois, il n’y aura ni carrosse ni couronne pour la souveraine de 93 ans, dont le discours sous les ors de la Chambre des Lords marque l’ouverture de la nouvelle session parlementaire, une semaine après la consécration des conservateurs aux législatives anticipées.
Le cérémonial très chargé accompagnant généralement cet événement a été réduit: Noël approche et le dernier discours de la reine remonte à deux mois seulement, avant le scrutin voulu par le gouvernement alors minoritaire pour avoir les coudées franches sur le Brexit.
Le programme législatif devrait rester peu ou prou identique à celui détaillé le 14 octobre. Il prévoit aussi des moyens supplémentaires pour les écoles, de meilleures infrastructures et des peines d’emprisonnement plus lourdes pour les infractions terroristes, selon un communiqué du 10, Downing Street.
– Intransigeance –
Boris Johnson, qui a séduit un électorat populaire dans des régions votant jusqu’alors pour les travaillistes, revendique être à la tête d’un “gouvernement du peuple” chargé de répondre aux aspirations des Britanniques en matière de services publics, de justice sociale ou encore d’infrastructures.
Mais la première des priorités est la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, dont il n’a eu de cesse de promettre la mise en oeuvre le 31 janvier, après trois reports.
Rien d’étonnant dès lors à ce que le premier texte soumis à la Chambre des communes dans sa nouvelle composition, dès vendredi, soit l’accord de divorce négocié avec Bruxelles, censé terminer 47 ans de mariage difficile et plus de trois ans de psychodrame ayant suivi le référendum de 2016.
Après un vote en deuxième lecture vendredi, son adoption devrait s’achever après les fêtes. Elle fait peu de doute, les conservateurs disposant de 365 sièges sur 650 à la Chambre des communes.
“Il est maintenant impossible de faire dérailler les intentions du gouvernement comme nous l’avons vu au cours des douze derniers mois”, a estimé Jill Rutter, du centre de réflexion UK in a Changing Europe.
Déjà, Boris Johnson se projette dans l’après-Brexit. Il veut conclure un accord commercial avec l’UE en moins d’un an et interdire dans la loi d’application de l’accord de retrait toute extension au-delà de 2020 de la période de transition censée ménager le temps de discuter la future relation entre Londres et Bruxelles.
Cette intransigeance a fait ressurgir les craintes d’une sortie sans accord dommageable à l’économie. L’UE a rétorqué qu’elle ferait le “maximum” pour aboutir à un accord avant l’échéance, tout en prévenant qu’un “no deal” aurait “plus d’impact sur le Royaume-Uni” que sur les Européens.
– Référendum écossais –
Outre l’accent mis sur le Brexit, Boris Johnson doit aussi annoncer jeudi une hausse à coups de milliards de livres du financement du service public de santé (NHS), affaibli par des années d’austérité.
Il a déjà réitéré sa promesse de 50.000 infirmiers de plus (en incitant 19.000 y travaillant déjà à y rester) en recevant des infirmiers à Downing Street mercredi. “Nous réalisons le plus gros investissement dans le NHS de mémoire d’homme”, a-t-il affirmé à cette occasion.
Le programme législatif du gouvernement fera l’objet d’un débat à la Chambre des communes suivi d’un vote en janvier des députés.
Signe des fissures infligées par le Brexit à l’unité du Royaume-Uni, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon a réaffirmé jeudi vouloir en 2020 un nouveau référendum sur l’indépendance de l’Ecosse, après celui perdu en 2014. Boris Johnson s’y oppose fermement.
S’appuyant sur la forte avancée de son parti nationaliste SNP aux élections, Mme Sturgeon a écrit au Premier ministre pour lui demander un transfert des pouvoirs permettant aux Ecossais, majoritairement opposés à la sortie de l’UE, de décider eux-mêmes d’organiser une telle consultation, actuellement laissée au bon vouloir de Londres.
“L’Ecosse a très clairement indiqué la semaine dernière qu’elle ne veut pas qu’un gouvernement tory dirigé par Boris Johnson nous sorte de l’Union européenne”, a-t-elle plaidé lors d’une conférence de presse. “La démocratie doit l’emporter et l’emportera”.