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Que peut discuter le Mali avec les chefs djihadistes ? : Me Cheick Oumar Konaré s’exprime à cœur ouvert sur le sujet.

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Voici ce qu’il nous raconte :

Lors de mon dernier débat sur AFRICABLE, j’ai été frappé par le fait que plusieurs débatteurs affirment que le Mali n’a rien à discuter avec les chefs islamistes qui sèment la désolation sur son sol.

Je réponds qu’ils ont tort et pour les raisons suivantes:

Toute guerre, quelle que soit sa nature ou son ampleur, finit par des discussions;

Le Mali a signé, en 2015, un accord de paix avec la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) dont les voix les plus autorisées (ONU, Barkhane) indexent la complicité avec les groupes dits djihadistes;

De grandes puissances comme les Etats-Unis ont, malgré leur force, fini par engager des pourparlers officiels avec les Talibans afghans, pourtant considérés comme djihadistes;

Si Iyad Ag Ghali et son lieutenant Amadou Koufa ne veulent que la charia (loi islamique), il est possible de leur donner gain de cause dans le cadre d’une réforme territoriale, d’une relecture de la notion de laïcité et d’un référendum tendant à déterminer les localités qui souhaitent la charia: après tout, au Nigéria, certains États fédérés vivent sous la charia et d’autres non;

Contrairement à ce beaucoup croient, la loi islamique respecte les libertés, notamment la liberté de culte des chrétiens et des juifs : à Médine, premier Etat islamique sur Terre, le Prophète (paix et salut sur lui) n’a jamais empêché les chrétiens et les juifs de pratiquer leur religion et tous les Califes qui lui ont succédé ont fait de même ;

Beaucoup confondent liberté et laïcité : or, la laïcité n’est qu’un moyen de réaliser la liberté. Ainsi, une République laïque peut être dictatoriale (cas de la Chine de Mao, de la Russie de Staline, de la Guinée de Sékou Touré ou de l’Ouganda d’Idi Amin Daddah), alors qu’un Etat islamique peut être démocratique (cas du Qatar, de l’Iran ou du Koweït);

Au reste, je ne suis pas du tout convaincu qu’il soit très démocratique de décréter la laïcité ou d’interdire les partis islamiques dans un pays majoritairement musulman: la démocratie ne suppose-t-elle pas le pouvoir de la majorité dans le respect des droits de la minorité ? A-t-on d’ailleurs la certitude que le seul fait de se réclamer d’une religion assurerait la victoire électorale d’un candidat?

Enfin, s’il s’avère qu’Iyad et Koufa ne veulent pas vraiment la charia, mais plutôt un territoire ouvert à tous les trafics (de drogue, d’armes et d’esclaves), alors le Mali décidera de rompre le dialogue car il peut discuter avec des djihadistes, mais pas avec des narcoterroristes. En tout cas, il n’aura rien perdu à tenter le dialogue…

Propos recueillis par Sinaly Daou

Ciwara Info

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