Un bilan qui dépasse 5.000 morts et des dirigeants mondiaux qui réagissent en ordre dispersé: le coronavirus pousse les Etats à se replier sur eux-mêmes pour lutter contre une pandémie qualifiée de “plus grave crise sanitaire depuis un siècle” par le président français Emmanuel Macron.
Avec 134.000 personnes contaminées et plus de 5.040 décès, la pandémie bouleverse la vie quotidienne de centaines de millions de personnes avec écoles et lieux publics fermés, déplacements limités, frontières closes, événements sportifs et culturels annulés ou reportés.
“J’ai envoyé un message à un ami: +buvons un verre ensemble avant qu’ils ne nous l’interdisent+!”, a témoigné à Madrid Victor Rodriguez, 43 ans, en buvant un vermouth dans un bar d’habitude très populaire, mais qui était quasi-vide jeudi soir. Le maire de la capitale espagnole a annoncé vendredi qu’il allait ordonner la fermeture des terrasses et il a recommandé aux bars et restaurants de fermer d’eux-mêmes.
Preuve que le virus se joue des frontières ou des barrières sociales, la femme du Premier ministre canadien, Sophie Grégoire Trudeau, a été testée jeudi positive au coronavirus et restera donc en quarantaine. Son époux Justin Trudeau “est en bonne santé” mais sera à l’isolement pendant 14 jours.
La veille, on apprenait le placement à l’isolement en Australie de l’acteur hollywoodien Tom Hanks et de son épouse.
L’interdiction temporaire d’entrée aux Etats-Unis des voyageurs en provenance d’Europe, décrétée mercredi soir par Donald Trump, a déclenché un choc dont les ondes se sont propagées sur tous les continents.
– En ordre dispersé –
La France, l’une des nations les plus touchées d’Europe, a rejoint la liste des pays dont les écoles, crèches et universités vont fermer. Emmanuel Macron a aussi demandé aux plus de 70 ans de rester chez eux, sans toutefois décider le report du premier tour des élections municipales, prévu dimanche.
De probables fermetures de frontières seront probablement nécessaires dans les jours ou les semaines à venir, “mais il faudra les prendre à l’échelle européenne”, a assuré M. Macron, dont les mesures pour faire face à la crise économique provoquée par le coronavirus – dont l’indemnisation des salariés en chômage partiel – coûteront des dizaines de milliards de dollars.
Sans attendre, deux pays européens ont pris de telles décisions: la Slovaquie a annoncé jeudi la fermeture de ses frontières à tous les étrangers à l’exception des Polonais, très impliqués dans la vie économique locale, et la République tchèque va fermer à partir de lundi ses frontières, tant aux étrangers voulant entrer dans le pays qu’aux Tchèques voulant partir à l’étranger.
Ces réactions en ordre dispersé, ajoutées aux mesures jugées décevantes des autorités monétaires comme la Banque centrale européenne pour contrer la panique, ont affolé les marchés qui ont connu jeudi une dégringolade historique, frappant de plein fouet les secteurs du transport aérien et du tourisme et faisant redouter une récession mondiale.
Vendredi, les Bourses européennes ont toutefois rebondi, Milan reprenant 9,25% à la mi-journée, Paris 5,1%, Londres 4,56% et Francfort 3,74%.
– Chute des contaminations en Chine –
Parmi les Bourses asiatiques, Tokyo a cependant poursuivi sa dégringolade, perdant plus de 6% tandis que Hong Kong finissait en retrait de 1,14%.
En attendant, l’épidémie continue à bouleverser la vie quotidienne des populations, comme en Italie, qui a enregistré jeudi son millième mort et compte désormais plus de 15.000 cas, où tous les commerces, sauf ceux jugés essentiels, sont désormais fermés.
Et l’Iran a annoncé vendredi 85 nouveaux décès, le plus lourd bilan en une journée depuis le début de l’épidémie dans ce pays, pour un total de 514 morts.
En Chine en revanche, point de départ de l’épidémie, le nombre de nouvelles contaminations a chuté vendredi à huit, le chiffre le plus bas depuis le début de la publication des statistiques à la mi-janvier.
Furieux d’entendre parler de “virus chinois”, un porte-parole de la diplomatie de Pékin a laissé entendre sur Twitter que la maladie aurait pu être importée dans le pays par l’armée américaine, citant à l’appui la thèse d’un site conspirationniste.
– Accès à l’Everest fermé –
Pékin avait pourtant très clairement désigné en début d’année un marché de Wuhan comme le berceau de l’épidémie, lorsque le virus se serait transmis d’une espèce animale à une autre avant de contaminer l’homme.
Signe du retour à la normale qui se dessine dans le géant asiatique, Apple a annoncé la réouverture de ses 42 magasins chinois.
Mais l’Inde a annoncé jeudi un premier décès. Et un premier cas a été enregistré en Afrique de l’Est, une étudiante kényane de retour des Etats-Unis via Londres.
La pandémie sème aussi le chaos dans le calendrier sportif.
Le Grand Prix d’Australie, qui devait se tenir ce weekend sur le circuit de Melbourne, a été annulé vendredi. La flamme olympique des JO de Tokyo a été allumée jeudi sur le site antique grec d’Olympie, alors que l’opportunité de maintenir ces jeux fait débat.
Côté alpinisme, le Népal a emboîté le pas à la Chine et suspendu la délivrance des permis d’ascension de l’Everest, fermant ainsi l’accès du “Toit du monde”, à quelques semaines du début de la haute saison.
AFP