Plus d’un mois après le drame d’Ogossagou 2, la MINUSMA a rendu public un rapport accablant pour la communauté Dogon et les Forces Armées Maliennes.
Au terme de son enquête, la mission onusienne au Mali dit avoir établi que «le 14 février 2020 vers 05h du matin, ce sont des paisibles citoyens sans défense qui ont subi l’assaut de groupuscules alors qu’ils se trouvaient à la mosquée de Ogossagou-Peul pour la prière matinale. C’est de là que les habitants du village ont tenté de se mettre à l’abri des coups de feu en provenance du côté Est de leur contrée, mais ils se retrouveront dans les griffes acérées de plusieurs dizaines d’assaillants arrivés à pied sur les lieux.
L’attaque, ajoute selon le rapport, a été menée par au moins trois vagues successives composées chacune d’une dizaine d’hommes armés à pied. Et tandis que certains tiraient sur les maisons ou forçaient les portes pour obliger leurs occupants à sortir de leurs cachettes, d’autres incendiaient les habitations et les greniers ou volaient les biens matériels se trouvant dans les maisons ou les magasins (céréales, bijoux, argent, matelas, nattes, vêtements). Le pillage n’a également pas épargné leurs réserves de vivres (au moins deux boutiques alimentaires ont été vidées) ainsi que le bétail emporté par vagues innombrables de têtes à bord de tricycles motorisés.
En termes de bilan, la division des droits de l’homme de la Minusma a comptabilisé au moins 35 personnes tuées tous membres de la communauté peule, dont une (1) femme, trois (3) garçons, et deux (2) filles ont perdu la vie et au moins trois autres ont été blessés. Les corps de 32 victimes ont été enterrés dans une fosse commune au Nord du village, mentionne le rapport, qui fait état en même temps d’au moins 19 personnes dont cinq (5) enfants toujours portées disparues depuis l’attaque. Ce n’est pas tout. Au moins 136 habitations (légères ou maçonnées) ont été détruites par incendie volontaires ou rendues inhabitables, 32 greniers et hangars de stockage de vivres ont été rendus inutilisables dans les mêmes conditions, sans compter la destruction par incendie pour certains de nombreuses charrettes, bâtiments commerciaux (cuisine, rôtisserie et boutique) et enclos de bétail, etc.
Quant à l’identité question des assaillants, ces derniers ont été désignés dans le rapport comme des chasseurs traditionnels appuyés par des hommes en tenue militaire et des membres présumés de la communauté Dogon. Des témoins directs, mentionne le document, ont même identifié certains d’entre eux comme des habitants du village voisin. Cependant, les enquêtes n’ont pas permis de déterminer les liens des agresseurs à un quelconque groupe armé.
Ces faits constituent des atteintes graves aux droits de l’homme, notamment des privations arbitraires du droit à la vie, des atteintes à l’intégrité physique et morale et des atteintes au droit à la propriété. Au regard de la loi malienne, ces actes peuvent constituer des crimes prévus et punis par le code pénal malien. Ces graves atteintes aux droits de l’homme pourraient également être qualifiées de crimes contre l’humanité, si jugées par un tribunal compétent, en vertu du droit international pénal, particulièrement l’article 7 du Statut de Rome, ont prévenu les enquêteurs en déplorant par ailleurs l’impunité qui entourent les agissements malgré ses sonnettes d’alarme au lendemain de la première tragédie d’Ogossagou.
Amidou KEITA
Source: Le Témoin