Avec un traitement mensuel de 150 millions sur les avoirs de la république pour IBK et 75 millions de francs CFA par mois comme salaire pour son Premier ministre. Dans un appel qui se veut pressant, les plus hautes autorités de la république invitent chacune et chacun à sacrifier à l’effort de solidarité nationale afin de parvenir à bout de la méchante pandémie du Coronavirus.
Invitation certes louable puisqu’il s’agit, en clair, de contribution citoyenne à l’effort de guerre contre un ennemi furtivement malin et pernicieusement dévastateur. À la limite, une souscription obligatoire, s’il le faut, s’imposerait. Nul doute, quand la nation est en péril, comme l’a dit IBK dans son adresse à la nation le 25 mars, la mobilisation générale est de mise, qu’on la décrète ou pas. Mais la participation à l’effort de guerre déclarée au virus ravageur, au nom du peuple malien par la voix la plus autorisée de la république, celle du même d’Ibrahim Boubacar Keïta devrait mobiliser aux avant-postes, d’abord les plus hauts responsables de l’État, en tout cas dans l’esprit des citoyens et selon une conception partagée lorsque la patrie commune est attaquée. Malheureusement, à ce jour, ceux-ci, ces grands commis de l’État, ont l’air de demeurer sur la réserve pendant que ce sont des organisations de la société civile, des opérateurs économiques et des particuliers, parmi lesquels des notabilités et autres autorités coutumières, qui ont manifesté, et continuent de le faire, leurs soucis pour le salut de tous en apportant des contributions. Le ciel les en rétribuera. Au sommet de l’État, il y a, en effet, comme un désintérêt de plus en plus patent face à la virulence du fléau. Les médecins, qui constituent sans aucun doute le bataillon le plus exposé sur le front de guerre, se sont vus en tout cas contraints d’adresser à leur ministre de tutelle un communiqué dénonçant l’incurie de l’État. Dans cette communication qui vaut à la fois alerte, accusation et mise en garde, le Syndicat des Médecins du Mali (SY.ME.MA) fait part de son inquiétude et de son indignation au ministre Michel Hamala Sidibé face à la pénurie, voire à l’absence de matériels de protection pour les médecins et autres personnels sanitaires dans les structures de santé, et cela sur toute l’étendue du territoire national. Cette négligence coupable se confond vite à l’insouciance condamnable, surtout que Michel Hamala Sidibé, pour avoir managé hier l’Onu-Sida, devrait agir non seulement en homme hautement averti, mais aussi en responsable consciencieux. Nul mieux que lui au Mali, et peut-être en Afrique, voire dans le monde, n’est à même de cerner avec perspicacité les vilains tours que pourrait s’amuser à jouer le Coronavirus. Michel Hamala Sidibé a d’ailleurs semblé vite compris les enjeux dramatiques en se rendant rapidement aux frontières terrestres pour constater leur porosité nuisible. Officiellement, le cruel virus a fait son apparition au Mali dans la nuit du mardi 24 mars 2020, quand les structures sanitaires ont mis en évidence deux cas testés positifs, qui ont motivé le lendemain matin un communiqué du gouvernement et dans la nuit une adresse à la nation du chef de l’État. Depuis, son spectre va intumescent, avec toutes les angoisses et les anxiétés qui y sont liées, lesquelles jettent les populations dans un immense désespoir. Il faut d’ailleurs relever que les deux cas testés positifs l’ont été après la réunion extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense Nationale consacrée justement à la pandémie, exactement une semaine après, jour pour jour, et c’est important à garder en mémoire. Or, cette assise extraordinaire, jugée d’ailleurs venue tard selon nombre de nos concitoyens, a été l’occasion pour Ibrahim Boubacar Keïta qui l’a présidée en personne, d’informer le Mali entier de la mise à disposition d’une enveloppe initiale de 6 300 000 000, pactole destiné à la prévention et à la lutte, car « Nous sommes en guerre ». Le montant de cette enveloppe donnait du reste à penser que des estimations rigoureuses avaient été faites en amont et que les ajustements progressifs seront faits au fur et à mesure que l’ennemi Coronavirus découvrira son front. Mais ce château financier mirobolant contre la pandémie s’écroulera vite comme un échafaudage de cartes à la toute première épreuve décisive. En effet, douze jours après la réunion extraordinaire du Conseil Supérieur de la Défense Nationale, les élections législatives se tenaient le dimanche 29 mars. À cette occasion, il a été constaté avec amertume que le président de la République et son gouvernement n’avaient en réalité rien fait pour prémunir les centres de vote des indispensables moyens de protection. Les présidents des bureaux de vote, leurs assesseurs, quid des votants, étaient sans masques, sans gants, sans gel hydroalcoolique, en tout cas dans la grande majorité des lieux visités par la presse et les observateurs nationaux. Les rapports produits à cet effet et les vidéos réalisés en ces circonstances ne donnent aucune chance de démenti au pouvoir en place.La question est maintenant de savoir à quoi aura servi la mise à disposition d’une enveloppe initiale de 6 300 000 000 pour une guerre patriotique à laquelle elle a manqué le jour certain de l’offensive de l’ennemi? Question grave qui mérite réponse. Il est impensable que des lenteurs injustifiables soient de mise. Il est tout aussi impensable que le Trésor public n’ait pas pu accélérer les choses pour la mise à disposition rapide de cette arme imparable. L’argent n’est-il pas le nerf de la guerre? Faut-il alors croire qu’IBK a juste lancé en l’air cette contribution étatique pour seulement matraquer les esprits par le vertige de l’argent? Il convient de rire de colère avant de s’étonner qu’un président de la République assure la mise à disposition d’une enveloppe initiale de guerre alors que son Premier ministre est aussi ministre de l’Économie et des Finances, et que rien ne soit fait. Une énigme politique et humanitaire sur une scène de tragi-comédie !Nonobstant tout, le peuple a été appelé à contribuer à l’effort de guerre. Il n’a pas tardé, de l’intérieur comme de l’extérieur, à réagir positivement. Mais à l’exception notoire du ministre de la mobilité, qui a mis son salaire de ministre d’un mois à la disposition des agents sécuritaires aux frontières pour la cause, aucun autre responsable haut perché n’a encore fait le geste solidaire. IBK, en particulier, qui affirma avec emphase dans son adresse à la nation du 25 mars qu’il est le premier serviteur de la nation, surtout lorsqu’elle est en péril comme aujourd’hui et qu’il reste à la disposition entière de tous, qu’a-t-il fait à ce jour à titre personnel ? Sur les subsides de l’État, il a pourtant un traitement mensuel de 150 millions de francs CFA ; sur les avoirs de la république, il dispose à sa guise d’une caisse de souveraineté de plus de dix milliards par an. Son Premier ministre, dans les mêmes conditions, empoche allègrement 75 millions de francs CFA par mois comme salaire, sans compter différents fonds secrets à sa disposition. On pourrait continuer les calculs, mais ils donneront la céphalée au peuple qui ne sait plus que faire pour échapper au Coronavirus. Bien sûr, en attendant la justice immanente qui s’exercera contre ses serviteurs perfides.
Ibrahim Kolado Djittèye
LE COMBAT