La Chine a célébré mercredi la fin du bouclage de Wuhan, la ville à l’origine du Covid-19, mais la pandémie qui a déjà fait près de 83.000 morts dans le monde continue de s’étendre notamment en Europe et aux Etats-Unis, provoquant une récession inédite depuis la Seconde guerre mondiale.
Des dizaines de milliers de passagers se sont rués dans les gares de Wuhan, à la faveur de la levée du blocage imposé fin janvier dans cette mégapole de 11 millions d’habitants.
“Je me suis levée à 4 heures aujourd’hui. Ça fait tellement de bien!”, explique Hao Mei, une jeune femme de 39 ans, avant de monter dans le train pour rejoindre ses enfants dont elle a été privée pendant plus de deux mois.
L’aéroport a recommencé à accueillir des passagers et de nombreux automobilistes ont pris la route pour quitter la ville. Les contrôles sanitaires restent toutefois stricts. Seuls deux morts ont été recensés au cours des dernières 24 heures en Chine.
Si la pandémie apparaît sous contrôle dans ce pays, trois mois après le premier décès, elle poursuit son périple mortel à travers le monde, notamment aux Etats-Unis où près de 2.000 patients ont succombé en 24 heures, un record.
Continent le plus touché avec plus de 58.600 décès, l’Europe a commencé à prendre la mesure de l’impact économique dévastateur que la pandémie aura pour elle comme pour le reste du monde. L’Organisation mondiale du commerce a d’ailleurs prévenu mercredi que la chute du commerce mondial pourrait atteindre 32% en 2020.
– Chute des PIB –
Premier des grands pays industrialisés à publier ses chiffres de croissance, la France a annoncé mercredi une baisse d’environ 6% de son produit intérieur brut (PIB) au premier trimestre, pourtant partiellement épargné par la pandémie.
Locomotive du continent, l’Allemagne ne devrait guère mieux s’en sortir: ses instituts tablent sur un recul de près de 10% au deuxième trimestre, après une baisse limitée à un peu moins de 2% les trois premiers mois.
L’Organisation internationale du travail (OIT) a prévenu que 1,25 milliard de travailleurs risquent d’être directement affectés par la crise à travers la planète, où plus de 4 milliards de personnes, soit plus de la moitié de l’humanité, sont contraintes ou incitées par leurs autorités à rester chez elles.
Face à cette crise inédite, l’UE continue de se déchirer: après une nuit de discussions, ses 27 ministres des Finances ne sont pas parvenus à s’entendre sur une réponse économique commune.
“Mon objectif reste le même: un filet de sécurité européen solide contre les retombées du Covid-19”, a assuré Mario Centeno, le président de l’Eurogroupe.
– Barre des 100.000 morts –
Mais l’Allemagne, comme les Pays-Bas, ont réaffirmé leur refus catégorique d’une mutualisation des dettes publiques pour relancer l’économie.
Aux Etats-Unis, l’administration de Donald Trump a engagé de nouvelles discussions avec le Congrès pour débloquer 250 milliards de dollars supplémentaires pour préserver l’emploi.
Le bilan de la pandémie approche la barre des 100.000 décès dans le monde. Ce comptage, à partir de sources officielles, est toutefois parcellaire, de nombreux morts hors des hôpitaux n’étant ni testés, ni comptabilisés.
La France a été mardi le quatrième pays à dépasser les 10.000 morts, après l’Italie, l’Espagne et les Etats-Unis.
L’Espagne a pour sa part annoncé mercredi une deuxième hausse consécutive du nombre de décès (757 en 24 heures), pour un total de 14.555 morts.
– Une crise s’ajoutant à la crise –
Dans l’Etat de New York, le plus touché des Etats-Unis, les autorités s’accrochent néanmoins à une lueur d’espoir. “La moyenne sur trois jours est en baisse, ce qui est une bonne nouvelle”, a souligné le gouverneur Andrew Cuomo.
Idem en Italie, pays le plus endeuillé (plus de 17.000 morts), où la situation s’est notamment stabilisée à Rome, avec “une légère baisse du nombre des admissions”, que constate Girolamo De Andreis, coordinateur infirmier à l’hôpital Tor Vergata.
Le sud du pays, encore relativement épargné, craint toutefois le pire si la vague devait frapper de plein fouet un système hospitalier en bout de course.
Comme à Locri, en Calabre, où l’hôpital local offre selon l’un de ses médecins “un service digne du tiers-monde” avec un manque chronique de docteurs et un scanner qui fonctionne un jour sur deux.
Le Covid-19, “c’est une crise qui vient s’ajouter à la crise”, s’alarme le maire de la localité, Giovanni Calabrese.
En Grande-Bretagne, le Premier ministre Boris Johnson a passé sa deuxième nuit en soins intensifs après avoir été contaminé par le coronavirus. “Il s’en tirera, c’est un battant”, a affirmé le ministre des Affaires étrangères, Dominic Raab, qui assure l’intérim.
– Confinement cinq étoiles –
Si le virus frappe indifféremment puissants et anonymes, il n’en contribue pas moins à accentuer les inégalités.
Dans plusieurs régions des Etats-Unis, le Covid-19 tue ainsi de façon disproportionnée les Noirs, population souvent plus pauvre et exposée.
Confinés dans des palaces cinq étoiles à leur retour de l’étranger, de riches Koweïtiens ont eux provoqué l’indignation en se plaignant d’une “tache de café non nettoyée”.
Les armées ne sont pas épargnées: la France a rappelé son porte-avions Charles de Gaulle, où une quarantaine de cas suspects ont été détectés.
A Bruxelles, la Commission européenne a renoncé à rendre publiques mercredi ses recommandations pour une sortie du confinement, tandis que l’Autriche et le Danemark envisagent de lever progressivement les restrictions.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a prévenu qu’en dépit de “signes positifs” dans certains pays européens, tout assouplissement était prématuré. “Il est temps de doubler et de tripler une fois de plus nos efforts”, a-t-elle souligné.
AFP