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Quels enjeux autour du sommet de Nouakchott ?

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D’ores et déjà présenté comme le bilan d’étape des engagement pris à Pau par la France et le G5 Sahel, le sommet de Nouakchott, qui aura lieu mardi 30 juin, semble se préparer sous de bons auspices. Si certaines réussites militaire ces derniers mois semblent en effet indiscutables, il n’en demeure pas moins que la situation est encore loin d’être emportée même si le bilan global est encourageant.

Il y a maintenant six ans qu’a débuté l’opération Barkhane, directement après l’opération Serval (2014). De nature trans-nationale, Barkhane vise à combattre et éliminer la présence terroriste djihadiste menaçant la stabilité de la région du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina-Faso, Niger, Tchad). En 2019 la situation, loin d’être améliorée semblait échapper à tout contrôle et cela au prix de centaines de victimes au sein des forces coalisées. Face à la crise de légitimité entrainée par cette situation, et la progression de narratifs anti-français au sein des population, fût décidé, à l’initiative de la France, la tenue du sommet de Pau. Ce dernier déboucha sur la confirmation de la volonté commune d’œuvrer à l’éradication de la menace terroristes, à la rationalisation des objectifs militaire sur le théâtre d’opération, la synchronisation entre le temps militaire et le temps du développement et la mobilisation internationale : la sécurité du Sahel étant porteuse d’enjeux allant bien au-delà de l’Afrique. L’application concrète de ses vœux se matérialisât dans la création d’une « coalition pour le Sahel », organisme destiné à harmonisé tout les autres et reposant sur quatre piliers : le combat contre les Groupes Armés Terroristes (GAT), la formation et l’équipement des armées du G5, le développement et enfin l’amélioration de la gouvernance. Six mois plus tard, quel bilan peut-on faire ? Et quels sont les enjeux à prendre en compte ?

Un bilan militaire prometteur à consolider

Face aux revers, l’effort de la coalition, jusque-là éparpillée sur l’ensemble du Sahel, fut alors concentrée dans la région dite des trois frontières (à la jointure du Malin, du Niger et du Burkina), zone d’implantation la plus dense de l’Etat Islamique au Grand Sahel (EIGS). Avec un rythme et une agressivité redoublée, le dispositif Barkhane et les sahéliens ont imposés une pression permanente à l’EI et sérieusement entamé son potentiel humain et logistique. Outre l’action des forces françaises, on a vu monter en puissance les forces du G5 Sahel qui ont pris une part redoublée dans les combats. Ainsi grâce à une synchronisation nouvelle entre Barkhane, la force conjointe du G5 (FC-G5S) et les unités nationales on observe aujourd’hui de vrais effets sur le terrain : gains dans le Liptako Nigérien, à Tiloa (Niger), à Labezzanga (Mali), retour de l’état Malien au nord du Mali, neutralisation d’Abdelmalek Droukdel (Al Qu’aida) …. Par ailleurs les formations dans le cadre du Partenariat Militaire Opérationnel (PMO) se poursuivent : création d’unité spécialisées, apprentissage de nouvelles capacités tactiques (contre-terrorisme, combat aéroterrestre…). En outre les livraisons de matériels s’intensifient (blindés lourds Bastion, équipement léger…) à hauteur de deux enveloppes de 100 millions d’euros.

On constate une remotivation importante des soldats du G5 et une reprise de confiance des populations, plus enclines à coopérer (renseignement, etc). Cette dynamique, toute positive qu’elle soit, doit être consolidée dans la durée car l’objectif de Barkhane est de progressivement autonomiser les forces du G5 afin qu’elles puissent prendre en main, seules, leur sécurité. Si les pertes ont baissées, l’autonomie réelle est encore loin d’être une réalité et les armées du G5 souffrent encore de fortes carences organiques : et l’Etat Islamique tout comme les groupes liés à Al Qu’aida disposent encore d’importante capacités de combat. Toutefois les résultats sur le terrain semblent porteurs et l’objectif d’internationalisation pourrait devenir une réalité. Outre le maintien Américain, Danois et ou Britannique, on note le déploiement prochain de la Task Force Takuba (opérations spéciales, soutien à la FC-G5S) qui regroupe déjà treize pays européens. Par ailleurs la mission de formation EUTM Mali sera bientôt densifiée (côté Allemand et Espagnol) et la Minusma devrait annoncer le renouvellement de son mandat. Enfin, une des nouvelles les plus encourageantes réside dans la volonté de l’UA de s’inscrire pleinement dans le conflit avec la constitution d’une force de 3000 hommes.

L’effort de développement : un défi politique et international

Les deux derniers piliers du sommet de Pau concernent les axes de développement civils et politiques. La Coalition pour le Sahel a pour but d’harmoniser les avancées sur le plan militaire avec le développement économique et la gouvernance : solutions de long termes irremplaçable pour stabiliser la région. Jusque-là, en dehors du manque de coordination, les différentes initiatives – d’essence internationales- telles que l’Alliance pour le Sahel (800 projets et 12 milliards d’euros), l’Agence Française de développement (300 projets) ou le P3S européen, n’agissaient pas de concert. Le lancement international de la coalition pour le Sahel les 28 Mars et 12 juin derniers, ou encore la première assemblée générale de l’Alliance Sahel (le 25 février) furent les premiers jalons de cette coordination nouvelle. Une coordination notamment destinée à drainer plus efficacement les financements ou échanger un maximum d’informations.

Ces initiatives doivent maintenant se coordonner avec les missions de développement de proximité de l’armée française afin de faire émerger, dans un second temps, des forces de sécurité (Missions européenne Eucap) et des institutions judiciaires adaptées. Ce point là est particulièrement important car les développements (écoles, énergie, eau, agriculture, transport…) de plus grande ampleur ne pourront voir le jour sans une stabilité réelle et garantie par des forces non-militaires. C’est la raison pour laquelle les aides ont tendance à se focaliser les zones contestées, les zone urbaines poursuivant sans trop d’embuches leurs projets. C’est la raison pour laquelle devrait être décidé à Nouakchott un recentrage des moyens dans la même logique qui a prévalu pour Barkhane et la FC-G5S : concentrer une large part des moyens sur une zone en particulier afin d’aboutir rapidement à des résultats significatifs. Cet aspect là devra être particulièrement discuté à Pau car il s’agit pour l’instant du parent faible de la coalition. Et cela même si les moyens structurels sont aujourd’hui bel et bien mis en place.

 

Pour conclure, on observe bel et bien des avancées et ces dernières se situent dans la lignée du sommet de Pau. Mais leur examen plus minutieux rappelle tout de même qu’elles ne pourront durablement s’installer qu’avec un maintien et sans faille et volontaire. Si la présence française restera, à priori, constante, il lui faudra aussi confirmer sa capacité à exercer un leadership international pour la conduite et le succès de la coalition sera décisive. Enfin de grand efforts politique doivent être fait au niveau eu G5 lui-même avec la mobilisation plus ample, dans les trois frontières, de la Mauritanie et du Tchad (piliers du G5), l’augmentation des moyens déployés au Burkina-Faso (maillon faible de la région) ou la stabilité politique du Mali qui fait craindre un basculement dans son rapport à la coalition à chaque élection. A la veille du sommet de Nouakchott tout est désormais possible et c’est une bonne chose : mais il lui faut réussir. Cependant, au vu de l’évolution générale de la situation depuis janvier et du changement de rapport de force : on peut se permettre d’être optimiste.

 

Abdoulaye Sanogo

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