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Cour constitutionnelle : Le regard d’un juriste et de trois acteurs politiques

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Dans les lignes ci-dessous, un constitutionnaliste et trois acteurs politiques se prononcent sur la mise en place de la nouvelle Cour constitutionnelle dont les 9 membres ont prêté serment hier devant le président de la République. Ils s’expriment également sur la mise en place de l’équipe gouvernementale restreinte

Fousseyni Doumbia, constitutionnaliste : «Beaucoup d’espoir pour
le dénouement de la crise»

L’avènement de la nouvelle Cour constitutionnelle suscite beaucoup d’espoirs pour le dénouement de la crise sociopolitique au Mali et le rétablissement de la confiance démocratique avec la population. Il est important de rappeler que la fonction particulière de la justice constitutionnelle conduit nécessairement à une éthique et à une déontologie des membres des juridictions constitutionnelles. La Haute juridiction constitutionnelle regorge désormais en son sein de personnalités aux compétences reconnues, expériences et civismes avérés en matière juridique.
Fruit d’un consensus à la suite de l’implication de l’ensemble des forces politiques et sociales du pays, la nouvelle Cour constitutionnelle ainsi composée d’hommes et de femmes, est réellement représentative de la société, même s’il reste à déplorer en son sein l’absence de professeurs de droit comme le prévoit l’article 91 de la Constitution du 25 février 1992. De toutes les manières, Il s’agit en somme d’une étape très importante pour la poursuite du processus de sortie de crise dans notre pays, suivant les recommandations de la Cedeao.
La feuille de route proposée par le président de la République à son Premier ministre dénote sa volonté de dénouement définitif de la crise politique et sociale que traverse le Mali depuis quelques mois, et cela dans une démarche inclusive et consensuelle. Cette démarche est le signe de l’estime qu’il manifeste à l’égard de l’opposition incarnée par le Mouvement du 5 Juin. Il s’agit donc d’une feuille de route plus respectueuse des principes de la démocratie, de l’état de droit, de la paix et des valeurs qui consacrent la construction d’un consensus dans une société.
Elle s’impose en conséquence comme moyen de prévention ou de résolution de la crise sociopolitique au Mali et méthode pour s’ouvrir aux reformes politiques et institutionnelles dont le pays a besoin pour consolider la démocratie, la paix et l’état de droit, dans le but de rétablir une confiance démocratique avec l’ensemble des acteurs du processus démocratique.

 

Niankoro Yeah Samaké, membre du M5-RFP : «Une fuite en avant»

Ce sont des actes désespérés d’un président impopulaire en manque crucial de solution à la crise multiforme. La mise en place  spontanée du mini gouvernement sur instructions des chefs d’état de la Communauté économique des états de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) est une claire indication de la faiblesse du président Ibrahim Boubacar Keïta et une humiliation du peuple souverain du Mali. La nomination des membres de la Cour constitutionnelle et la mise en place du gouvernement de service minimal est juste une fuite en avant qui ne sert ni IBK ni le peuple malien. Au lieu de narguer son peuple, Ibrahim Boubacar Kéïta doit réaliser que nul ne saurait diriger tout un peuple par la menace et le mépris. La situation exige le compromis et l’apaisement. Les recommandations de la Cedeao ne sont ni appliquées ni applicables, M. Ibrahim Boubacar Keïta aurait pu être un tant soit peu plus décisif pour dissoudre l’Assemblée nationale et démettre le Premier ministre comme base de négociations franches.

Oumar Ibrahima Touré, président de l’APR : «Trouver diligemment des solutions au contentieux électoral»

Je pense que toute initiative allant dans le sens de la poursuite et de l’approfondissement du dialogue est à saluer. Ce que j’ai retenu d’essentiel, c’est-à-dire comme cœur du message du président de la République, en plus des actions urgentes liées aux ministères dits régaliens, c’est la nécessité de trouver rapidement des solutions pour une sortie de crise définitive. J’ose espérer, qu’en plus des instructions données au Premier ministre, le président lui-même s’impliquera afin de trouver des solutions avec le M5-RFP. Il le faut.
C’est à la fois une urgence et une nécessité. Je pense qu’il faut nécessairement trouver un consensus avec le M5 avant la formation du gouvernement d’union nationale. Un tel préalable mettra éventuellement le pays à l’abri de la poursuite de l’enlisement. L’implication personnelle du président de la République me semble à la fois nécessaire et efficace.
Quant à la nomination des membres de la nouvelle Cour constitutionnelle, je l’inscris dans la même dynamique. Si l’on s’en tient aux précisions apportées par le nouveau ministre de la Justice, Garde des sceaux, au JT de 20h de l’ORTM du 8 août 2020, une fois installée, la nouvelle Cour constitutionnelle doit s’atteler à trouver diligemment  des solutions au contentieux électoral lié aux dernières élections législatives. On le sait, ces élections font partie du casus belli que le pays connaît depuis quelques mois sans en être évidemment la seule cause. La nouvelle Cour constitutionnelle constitue donc une étape salutaire dans la recherche de solutions consensuelles pour une sortie de crise.
Il faut donc nécessairement la poursuite du dialogue entre la majorité présidentielle et le M5. Dans ces efforts de médiation, notre société civile peut et doit également jouer sa partition. Il faut éviter à tout prix une nouvelle dégradation de la situation, surtout des confrontations. Cela n’est possible qu’avec des efforts mutuels et des sacrifices des deux côtés. C’est important de le dire avec insistance, malgré la mobilisation de la majorité présidentielle, je pense que le président est la clé essentielle de sortie de crise. Son implication personnelle peut constituer un levier accélérateur.

Moussa Mara, président de Yéléma : «Résoudre l’imbroglio
des élections législatives»

La reconfiguration de la Cour constitutionnelle est une bonne chose et elle a été sollicitée il y a plus de deux mois. Espérons maintenant que cette nouvelle Cour travaille pour résoudre l’imbroglio des élections législatives créé par l’ancienne équipe de l’institution.
Pour le gouvernement, la reconduction du Premier ministre et la mise en place d’une équipe restreinte de manière unilatérale ne vont pas dans le sens de l’esprit de l’unité nationale recherchée. Tout ce qui découle de cela créera des tensions nouvelles comme nous sommes malheureusement en train de le constater. Je ne suis pas optimiste pour la suite sur cette question qui constitue pourtant le cœur des contestations et des tensions.

Propos recueillis par
Massa SIDIBE

Source : L’ESSOR

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